L'histoire de France Laure, société québécoise qui fabrique et distribue de produits de beauté, est jalonnée de hauts et de bas. Les moins bons coups de la PME sont minimes, mais ils existent et reviennent la hanter. Quant aux bons coups, ils sont nombreux et ont attiré à l'entreprise familiale des louanges des quatre coins du monde. C'est d'ailleurs en misant sur les exportations que France Laure compte poursuivre sa croissance.

Mais ne cherchez pas les crèmes, laits, lotions, parfums, masques et autres gels de marque France Laure dans un magasin ou une pharmacie près de chez vous. La PME de 40 employés ne vend qu'aux esthéticiennes, aux spas et aux cliniques de soins corporels, où les consommateurs, du reste, peuvent s'en procurer. Le hic, c'est que les esthéticiennes québécoises plus âgées boudent France Laure. Dans leur esprit, il s'agit d'un produit de bas de gamme.

 

«Et elles ont tort!» lance Bruno Fantin, président de l'entreprise et fils du regretté Joseph Fantin. Ce dernier, arrivé sans le sou au Canada, a amené la marque France Laure au Québec dans les années 60. Il en a plus tard acheté les droits pour en faire une entreprise 100% québécoise.

«Nous fabriquons encore aujourd'hui des produits de haut de gamme. Mais à l'époque, mon père voulait les rendre accessibles au plus grand nombre. L'emballage n'était pas très soigné et le prix du produit était relativement bas. Si bien que plusieurs esthéticiennes (dont certaines sont toujours en affaires) ont dit que France Laure, c'était cheap. Encore aujourd'hui, quand j'entends ça, ça m'arrache le coeur», affirme Bruno Fantin.

Ailleurs dans le monde, la perception est tout autre, croit le grand patron de France Laure, dont les activités génèrent des revenus d'environ 10 millions. «En République tchèque, par exemple, nous sommes perçus comme des dieux», dit-il. La PME vend encore la majorité (70%) de ses produits au Canada, dont 60% au Québec. Les 30% restants prennent la route des États-Unis, de l'Iran, du Mexique, des Émirats arabes unis, de Hong Kong, etc.

À moyen terme, les exportations devraient représenter 60% des ventes de France Laure. Et Bruno Fantin croit pouvoir y parvenir sans trop de difficultés. «Nous sommes très intéressants aux yeux des acheteurs étrangers. Les pays habitués à s'approvisionner en Europe se tournent vers nous. Nous offrons d'excellents produits à une fraction du prix», explique M. Fantin.

L'époque des emballages bas de gamme n'est qu'un vieux souvenir. Aujourd'hui, France Laure dit rivaliser avec les plus grandes marques. Fait étonnant: la PME possède sa propre imprimerie, où elle enjolive elle-même ses flacons, ses bouteilles et ses emballages. Elle agit même à titre de sous-traitant pour d'autres entreprises de cosmétiques.

Outre sa division produits de beauté, France Laure fabrique aussi des accessoires pour les salons de beauté et d'esthétique. Sa division Équi-Pro fabrique en effet des chaises longues et autres fauteuils de travail. Encore du haut de gamme, entièrement conçu au siège social montréalais de la PME. Difficile d'imaginer une PME plus intégrée.

Les deux entités appartiennent à parts égales à Bruno Fantin et à son frère, Stéphane. Les deux frangins ont également pris la relève de l'École d'esthétisme et d'électrolyse France Laure, laquelle est encore administrée par Rose-Marie Guédin-Fantin, la mère de Bruno et de Stéphane. Mme Fantin fait partie de la première génération d'esthéticiennes au Québec. Elle a côtoyé les Édith Serey de ce monde.

L'univers des produits de beauté n'est plus ce qu'il était, croit Bruno Fantin. Les marges bénéficiaires (qui pouvaient facilement atteindre 600% à une certaine époque) ont fondu comme neige au soleil. «Nous n'étions que quelques-uns à nous partager la tarte au Québec. Mais maintenant, il doit y avoir une centaine d'acteurs, dont certains sont prêts à tout pour faire des ventes», déplore le président de la PME.

Qu'à cela ne tienne, Bruno Fantin affirme que France Laure est le seul fabricant de produits de beauté de propriété québécoise à avoir le potentiel et la capacité physique de briller à l'étranger. D'où cette volonté d'exporter et de percer de nouveaux marchés.