L'inscription du fournisseur de musique en streaming Spotify prévue ce matin à la Bourse de New York arrive à un moment où la pression est forte sur le secteur des technologies.

C'est une bonne raison pour surveiller comment Wall Street accueillera Spotify. Une autre bonne raison de suivre le déroulement de cette inscription en Bourse en cotation directe est de voir comment la décision de ne pas procéder par un appel public à l'épargne traditionnel affectera le résultat de l'opération.

« Ce sera très volatil d'un bord ou de l'autre, c'est certain », commente un banquier d'affaires québécois qui préfère ne pas être identifié.

« Ça va être intéressant de voir où ça va atterrir, ajoute-t-il. À un moment donné, des courtiers vont commencer à devenir market makers, et le titre va se stabiliser au fil des semaines et des mois. »

La grande différence avec un appel public à l'épargne traditionnel est qu'il n'y a pas vraiment eu de mise en marché de la part de courtiers, souligne Louis Doyle, directeur général de l'organisme Québec Bourse. « Il peut donc y avoir une plus grande volatilité dans les cours au début. »

L'établissement du marché secondaire peut s'avérer plus difficile sans la tournée de promotion organisée par des courtiers auprès d'investisseurs institutionnels, laquelle s'étire habituellement sur deux semaines. Spotify épargne la commission qui aurait accompagné une telle tournée. Mais sans banquier pour établir le cours initial du titre en fonction de l'offre et de la demande des investisseurs, il y a un risque élevé de volatilité au moment où l'action commence à se transiger.

Lorsque des dizaines de gestionnaires de fonds institutionnels se familiarisent avec l'histoire d'une entreprise durant un « road show », ils sont plus susceptibles de vouloir acheter des actions facilement si des actionnaires souhaitent vendre des titres.

Pour l'analyste Rob Sanderson, chez MKM Partners, il est improbable que les conditions de marché actuelles poussent Spotify à reporter son entrée en Bourse. « L'entreprise n'émet pas d'actions et ne tente pas de lever des capitaux. C'est une opération visant à offrir de la liquidité aux employés et aux actionnaires actuels. Il n'y a pas d'incitatif à retarder le processus de cotation. »

COMME LA BOURSE DE MONTRÉAL EN 2007

Spotify se démarque et démontre qu'elle n'a pas peur de faire les choses différemment en choisissant une inscription par cotation directe. Seulement une poignée d'entreprises ont emprunté cette voie depuis 15 ans. Il y a notamment eu des petites sociétés de biotechnologies comme Coronado Biosciences, en 2011, et OvaScience, en 2012, au NASDAQ. Elles n'avaient toutefois pas l'envergure de Spotify.

Au Canada, la cotation directe est aussi un phénomène marginal. En 2007, un an avant la création du Groupe TMX, la Bourse de Montréal avait inscrit ses actions ordinaires à la Bourse de Toronto sous le symbole « MXX ». Aucune nouvelle action n'avait alors été émise.

Il y a fort à parier que plusieurs entreprises, notamment dans le secteur des technologies (Uber, Airbnb, Lyft et autres Pinterest), garderont un oeil intéressé sur l'opération menée par Spotify. La cotation directe pourrait devenir une option à considérer pour certaines entreprises.

SPOTIFY EN BREF

Activités : fournisseur de musique en streaming (diffusion en continu)

Année de fondation : 2006

Bourse : New York

Symbole : SPOT

PDG : Daniel Ek

Siège social : Suède

Concurrents : Pandora, Apple Music, Google Play, YouTube, Sirius XM, etc.

Nombre d'abonnés payants : 71 millions

Nombre d'utilisateurs actifs mensuels : 159 millions

Revenus en 2017 : 5 milliards US

Perte nette en 2017 : 1,5 milliard US

DEUX COURS CIBLES SUR 12 MOIS

Mark Mahaney, RBC : 220 $US

Rob Sanderson, MKM Partners : 200 $US