L'intense utilisation de Twitter par Donald Trump a renforcé la visibilité de la plateforme ces derniers mois. Mais l'effet sur les performances financières du réseau social en difficultés se fait toujours attendre.

L'action du groupe américain a plongé de plus de 12% à Wall Street, après l'annonce d'une progression toujours anémique de son nombre d'utilisateurs. Ils étaient 319 millions fin décembre, soit un gain de 2 millions en trois mois.

Son chiffre d'affaires n'a pas atteint le niveau escompté par les analystes. Et le groupe a renoncé à faire une prévision pour ses revenus cette année, prévenant néanmoins que la croissance de ses recettes publicitaires serait moins rapide que celle de son audience et souffrirait d'un durcissement de la concurrence.

Twitter n'a jamais dégagé un dollar de bénéfice en bientôt onze ans d'existence, et il suscite des inquiétudes persistantes quant à sa capacité à élargir son audience.

Il peut toutefois compter sur un utilisateur très actif: le nouveau président américain Donald Trump a pris l'habitude de court-circuiter les médias traditionnels en communiquant beaucoup sur Twitter.

Son compte personnel @realDonaldTrump est son canal privilégié, avec plus de 24 millions d'abonnés, tandis que @POTUS, le compte officiel mis à sa disposition par la Maison-Blanche, en affiche 15 millions.

Seconde chance? 

S'il n'est pas la première personnalité politique à miser sur les réseaux sociaux, également très prisés de son prédécesseur Barack Obama, Donald Trump a choisi d'y faire beaucoup de grosses annonces.

Résultat: «le président attire une attention constante des médias pour Twitter, le service étant régulièrement mentionné dans des articles à la une des journaux et des émissions d'informations télévisées», ont souligné dans une note les analystes de Loop Capital Market. Cela «devrait être mis à profit par l'entreprise.»

«Les médias sont devenus de facto un outil de marketing géant pour Twitter», estimait aussi récemment Richard Greenfield du cabinet BTIG.

«Trump donne aux consommateurs une raison d'apprendre à se servir de Twitter, renforce les raisons pour les personnalités publiques de mettre du contenu sur la plateforme», et fournit ainsi au réseau «une seconde chance d'attirer et de conserver des utilisateurs», affirmait-il.

Anthony Noto, directeur financier et directeur d'exploitation de l'entreprise, a reconnu jeudi lors d'une conférence avec des analystes que «l'utilisation de Twitter par le président (...) montre le pouvoir de Twitter».

Il en a toutefois relativisé l'effet, notant qu'il était «très difficile pour un événement ou une seule personne d'entraîner une croissance durable» de l'usage du réseau.

Regain d'intérêt difficile à monétiser

Twitter évoque quand même «une accélération» du nombre de personnes qui utilisent son réseau tous les jours: il ne donne pas leur nombre, mais affirme qu'il progresse de 11% sur un an.

Ce regain d'engagement «est très positif pour Twitter», et «c'est en partie à cause de Trump», estime Lou Kerner, partenaire chez Flight VC et spécialiste des réseaux sociaux. Ce n'est «pas seulement pour voir ce que dit le président, mais aussi ce que tous les autres écrivent et disent sur Trump».

Le problème, c'est que ce regain d'intérêt ne fait pas gagner d'argent. Les recettes publicitaires encaissées aux États-Unis ont même baissé de 7% sur un an au quatrième trimestre.

«Les annonceurs continuent d'avoir du mal à voir un retour sur leur investissement» quand ils font de la publicité sur Twitter, reconnaît Lou Kerner.

«Trump est un non-événement du point de vue de la monétisation», assène Trip Chowdhry, analyste chez Global Equities Research. Il explique que pour attirer les annonceurs, il faut des données de bonne qualité sur les utilisateurs afin d'assurer que les publicités servies sont pertinentes. Cela manque toujours à Twitter, qui doit prouver que ses utilisateurs sont «des gens véritables et authentiques».

En outre, malgré les promesses de simplification du fondateur Jack Dorsey depuis son retour aux manettes à l'été 2015, beaucoup de nouveaux utilisateurs ne voient pas ce que le réseau peut leur apporter. «La majorité des gens viennent une fois et ne reviennent pas», relève Lou Kerner.

Le regain d'intérêt suscité par Donald Trump est «un premier pas important», mais les nouveaux utilisateurs ne resteront pas «si le produit ne s'améliore pas», reconnaît Richard Greenfield.