Les investisseurs ont joué de prudence avec Amaya hier, durant ce qui était la première séance où le titre pouvait se négocier depuis la confirmation, vendredi soir, que la direction de l'entreprise montréalaise discutait d'un projet de fusion avec la britannique William Hill.

L'action d'Amaya a cédé 4 % au NASDAQ hier pendant que la Bourse de Toronto était fermée pour le congé de l'Action de grâce au Canada. Le titre du propriétaire du site PokerStars avait soudainement bondi de 9 %, à 23,41 $, vendredi après-midi à Toronto, avant que les négociations soient interrompues. L'activité boursière suivait la publication d'une dépêche de l'agence Reuters selon laquelle Amaya suscitait l'intérêt de plusieurs acquéreurs potentiels, notamment William Hill et GVC Holdings.

Hier, le Financial Times a rapporté que GVC Holdings s'était effectivement montrée intéressée, mais que cette entreprise britannique ne l'est plus depuis quelques semaines déjà.

Dans une note transmise hier à ses clients, Ralph Garcea, de la firme Cantor Fitzgerald, s'est demandé si une offre pour Amaya venant d'une firme privée d'investissement n'allait pas suivre bientôt. 

« Bien que j'aime la possibilité d'assister à une fusion entre Amaya et William Hill, je crois que les fonds d'investissement privés n'ont pas encore montré leur jeu. »

- Extrait de la note de Ralph Garcea, de la firme Cantor Fitzgerald, publiée hier

Cet analyste torontois estime qu'un fonds d'investissement pourrait être disposé à payer jusqu'à 35 $ par action pour acquérir Amaya.

Le marché est bien loin d'escompter une telle transaction, mais le fonds d'investissement américain BlackRock a néanmoins un important intérêt en jeu. BlackRock est le cinquième actionnaire de William Hill avec 6 % des actions en circulation, en plus d'être également le troisième actionnaire d'Amaya avec 9 % des actions en circulation sur une base pleinement diluée. Blackstone - une autre firme d'investissement - ainsi que le cofondateur et ex-PDG David Baazov sont les deux plus importants actionnaires d'Amaya.

DEUX ENTREPRISES MALMENÉES

Le marché a plusieurs raisons de réagir timidement au projet de fusion discuté entre Amaya et William Hill. Il ne s'agit pour l'instant que de discussions et elles mettent en cause deux entreprises qui donnent des maux de tête à leurs actionnaires. À preuve, le titre de William Hill affiche un recul de 15 % depuis un an, la direction a révisé en baisse ses perspectives au printemps et elle est toujours dirigée par son chef des finances sur une base intérimaire depuis le départ soudain du PDG en juillet.

Depuis un an, l'action d'Amaya montre un repli de 25 % en Bourse. L'entreprise de Pointe-Claire est lourdement endettée, ce qui l'oblige à affecter une tranche importante de ses flux de trésorerie au service de sa dette, qui s'élevait à 2,6 milliards US en début d'année. La compagnie fait aussi face à la possibilité de devoir payer une amende de 870 millions US imposée par un juge du Kentucky en décembre dernier. Et comme William Hill, Amaya a vu son PDG quitter ses fonctions cette année.

L'analyste Ralph Garcea croit malgré tout que si un regroupement d'Amaya et de William Hill devait survenir, une telle transaction apporterait une multitude de possibilités sur le plan des ventes croisées. La stratégie de croissance de William Hill serait immédiatement affectée et les synergies réalisées pourraient atteindre plus de 125 millions de dollars, pense M. Garcea.

« Amaya et William Hill discutent d'une fusion entre égaux tout en titres par laquelle William Hill acquerrait Amaya dans le cadre d'une prise de contrôle inversée et les actions de la nouvelle entité seraient listées à Londres. Il est probable que l'actuel PDG d'Amaya, Rafi Ashkenazi, serait alors nommé à la tête de l'entreprise fusionnée », souligne l'analyste.

AMAYA EN BREF

L'entreprise dont le siège social est situé en bordure de l'autoroute Métropolitaine à la hauteur de Pointe-Claire a été cofondée il y a 12 ans par David Baazov. Accusé de délit d'initié en mars, ce dernier a quitté officiellement ses fonctions de PDG en août, mais demeure le plus important actionnaire individuel de la société. Amaya est devenue il y a deux ans la plus importante entreprise de jeu en ligne du monde à la suite de l'acquisition de la maison mère du site PokerStars au coût de 5 milliards US. Amaya a commencé l'année avec un effectif d'environ 2000 employés, mais moins de 300 travaillent au Canada.

WILLIAM HILL EN BREF

Le preneur aux livres britannique se spécialise dans le pari sportif et ses actions sont inscrites à la Bourse de Londres. L'entreprise existe depuis 1934 et son effectif est d'environ 16 000 employés. Elle n'offre pas que du pari sportif et ne l'offre pas que par internet. La stratégie numérique de l'entreprise serait d'ailleurs une des raisons expliquant le départ du PDG cet été. Le chiffre d'affaires annuel de William Hill a atteint environ 2,6 milliards CAN l'an passé, ce qui se compare à des revenus de 1,4 milliard CAN pour Amaya en 2015.