La livre britannique a subi une chute éclair vendredi au début des échanges en Asie, des courtiers perplexes évoquant des raisons techniques, voire une erreur humaine, sur fond de craintes d'un «Brexit dur» ravivées par des propos de François Hollande.

Peu après 8 h vendredi matin à Tokyo, la livre sterling a ponctuellement chuté à 1,1841 dollar, soit un nouveau plus bas depuis 1985, avant de se redresser autour de 1,24 dollar. Elle valait deux heures plus tôt 1,2614 dollar, soit un décrochage brutal de 6,1 %.

La livre n'avait pas été aussi secouée depuis l'annonce le 23 juin des résultats du référendum sur le Brexit, qui avaient provoqué le chaos sur les marchés financiers de la planète et fait plonger la livre de plus de 10 %.

Elle était déjà sous forte pression cette semaine, après l'annonce par la première ministre britannique, Theresa May, du lancement d'ici fin mars 2017 de la procédure de sortie de l'Union européenne par le Royaume-Uni.

Mais de là à dégringoler autant... «Ce qui s'est passé était insensé - appelez cela une chute éclair - mais des mouvements de cette ampleur montrent jusqu'où la monnaie peut descendre», a réagi Naeem Aslam, analyste de Think Markets, dans une note citée par l'agence Blommberg News. «La livre sterling est hantée par les craintes d'un Brexit dur».

«Inévitable»

Des courtiers ont avancé des facteurs techniques pour expliquer la dégringolade.

«Il semblerait qu'une série d'ordres automatiques soient tombés en même temps, probablement du fait de raisons techniques, ce qui a provoqué la chute de la livre dans une période de faible activité avant la publication des chiffres de l'emploi américain», plus tard dans la journée, a commenté auprès de l'AFP Minori Uchida, responsable des changes chez Bank of Tokyo-Mitsubishi UFJ.

Certains ont même évoqué la possibilité d'un «fat finger», la maladresse involontaire d'un seul homme.

Mais d'autres ont jugé que cette chute était inévitable alors que se dessine la perspective d'un divorce sans compromis sur le plan économique avec Bruxelles, qui serait le pire scénario pour les milieux d'affaires, avec à la clé la possible perte de l'accès au marché unique.

«Ce n'était qu'une question de temps avant que ne survienne un tel plongeon», a estimé Yosuke Hosokawa, de Sumitomo Mitsui Trust Bank. «Les éléments négatifs se sont accumulés jusqu'à ce que la digue cède. Nous n'avons pas encore vu le pire, le record de 31 ans (face au dollar) peut désormais être battu».

Les déclarations du président français François Hollande, qui a plaidé jeudi soir pour la «fermeté» face à Londres dans les futures négociations, ont pu jouer un rôle déclencheur, ont argué des analystes.

«Il faut qu'il y ait une menace, il faut qu'il y ait un risque, il faut qu'il y ait un prix, sinon nous serons dans une négociation qui ne pourra pas bien se terminer et qui, forcément, aura des conséquences économiques et humaines», a lancé M. Hollande dans un discours à Paris.

«Le Royaume-Uni a décidé de faire un Brexit, je crois même un Brexit dur, eh bien, il faut aller jusqu'au bout de la volonté des Britanniques de sortir de l'Union européenne», a insisté le chef de l'État.