Une nouvelle fois fébrile, Wall Street a fortement baissé vendredi après des chiffres contrastés sur l'emploi américain, qu'elle a choisi d'interpréter de façon pessimiste, notamment à l'aune des perspectives monétaires aux États-Unis: le Dow Jones a perdu 1,29% et le Nasdaq 3,25%.

Selon des résultats définitifs, l'indice vedette Dow Jones Industrial Average a cédé 211,75 points à 16 204,83 points et le Nasdaq, à dominante technologique, a particulièrement souffert en chutant de 146,41 points à 4363,14 points.

Jugé le plus représentatif par de nombreux investisseurs, l'indice élargi S&P 500 a reculé de 35,43 points, soit 1,85%, à 1880,02 points.

«Je suis très étonné d'une telle baisse après des chiffres sans grande surprise sur l'emploi», a reconnu Alan Skrainka, de Cornestone Wealth Management. «Je me creuse vraiment la tête...»

Principal indicateur économique de la semaine aux États-Unis, le rapport du département du Travail s'est révélé contrasté pour le mois de janvier, en faisant certes état d'une chute inattendue des créations d'emplois, mais aussi d'une décrue du chômage à son plus bas niveau en 8 ans.

Pour aggraver encore la confusion, certains observateurs estiment que ce sont les bonnes nouvelles du rapport, dont une nette avancée des salaires, qui ont plombé le marché, car elles pourraient pousser la Réserve fédérale (Fed), la banque centrale américaine, à poursuivre à un rythme soutenu le retrait de son soutien à l'économie, entamé en décembre avec sa première hausse de taux depuis 2006.

«On craint que la Fed regarde tout cela et décide de relever encore ses taux, peut-être dès mars», date de sa prochaine réunion de politique monétaire, a avancé Bill Lynch, de Hinsdale Associates, se montrant toutefois lui aussi interloqué par la réaction brutale de Wall Street.

Depuis le début de la semaine, les responsables de la banque centrale avaient plutôt multiplié les déclarations prudentes sur le sujet, ce qui a d'ailleurs contribué à rendre la Bourse instable plus qu'à la rassurer, et peu d'observateurs se laissent désormais aller à essayer de prévoir son attitude face aux chiffres de vendredi.

«La seule chose qui me semble cohérente» pour expliquer la chute des indices, «c'est que la Fed est bien décidée à monter ses taux, alors que l'économie montre des signes de faiblesses et que les gens s'inquiètent de la voir plonger en récession», a commenté M. Skrainka.

Il estimait par ailleurs que la performance particulièrement mauvaise du Nasdaq s'expliquait par le fait que les investisseurs perdent de plus en plus confiance dans les titres à fort potentiel de croissance - largement répandus dans le secteur technologique - et se tournaient vers des valeurs plus traditionnelles, à l'écart moins élevé entre leurs bénéfices réels et leur capitalisation boursière.

Le marché obligataire avançait très légèrement. Vers 16 h 20, le rendement des bons du Trésor à dix ans baissait à 1,843% contre 1,852% jeudi soir, et celui des bons à 30 ans à 2,680% contre 2,682% précédemment.