Vivendi est monté en puissance dans deux éditeurs français de jeux vidéo, devenant le premier actionnaire du géant Ubisoft et confirmant le recentrage de ses activités sur les créateurs et diffuseurs de contenus.

Une semaine exactement après être entré au capital d'Ubisoft et Gameloft à hauteur de plus de 6%, Vivendi a augmenté sa participation à plus de 10% dans ces deux éditeurs, via l'acquisition de titres sur le marché.

Celle-ci a été réalisée à l'aide de la «trésorerie disponible» du groupe «pour un montant total respectivement de 244 millions d'euros et 34,41 millions d'euros», soit un total de 278,41 millions (413 millions de dollars CAD).

Suite à cette prise de participation à hauteur de 10,39% du capital, Vivendi devient le premier actionnaire du géant français des jeux vidéo interactifs Ubisoft devant le fonds FMR LLC et la famille Guillemot qui en détiennent plus de 9% chacun.

Mais «par le jeu des droits de vote double», les frères Guillemot, fondateurs d'Ubisoft au milieu des années 1980, «restent encore les principaux décisionnaires», souligne le courtier Gilbert Dupont dans une note.

Connu notamment pour les jeux Lapins Crétins, succès décliné en série télévisée et en attraction au Parc du Futuroscope, Ubisoft, interrogé par l'AFP, a refusé de commenter l'opération.

La semaine dernière, le groupe breton avait qualifié l'entrée à son capital de Vivendi de «non sollicitée» et affiché dans un bref communiqué sa volonté «de rester indépendant».

Parallèlement, Vivendi détient désormais 10,20% du capital de Gameloft, l'éditeur de jeux vidéo pour téléphone fondé par l'un des frères d'Yves Guillemot, PDG et cofondateur d'Ubisoft.

Au départ, le groupe dirigé par Vincent Bolloré avait présenté son irruption dans les deux acteurs comme un «placement de ses liquidités», évaluées à 9 milliards d'euros. Un trésor de guerre issu principalement de la cession de SFR au groupe Altice de Patrick Drahi.

Vivendi n'exclut pas d'aller plus loin

Mais cette opération semble plus stratégique que financière car, désormais, le groupe, recentré sur les médias et la production de contenus, ne cache plus ses ambitions et «n'exclut pas d'augmenter sa participation dans ces deux sociétés en fonction des conditions de marché».

Tout en se réservant la faculté, le moment venu, de demander à être représenté à leur conseil d'administration.

Dans le scénario d'un rachat des deux entités, «Vivendi mettrait la main sur une société créatrice de contenus avec des IP solides (c'est-à-dire un portefeuille de jeux à succès NDLR) (Ubisoft), tout en s'assurant une audience importante et diversifiée (Gameloft), le tout devant s'intégrer dans la galaxie média mise en place par Bolloré», analyse le courtier Gilbert Dupont.

Pour l'heure, la montée en puissance de Vivendi au capital des deux sociétés «fait sens» et confirme «le statut de véritable nouveau média des jeux vidéo», souligne le courtier qui estime qu'une fusion d'Ubisoft et Gameloft aurait aussi du «sens».

Le groupe s'est déjà, à coup d'acquisitions ciblées, constitué une collection d'entreprises dans les médias et contenus, dont la plateforme internet de vidéo DailyMotion et une part du producteur de télévision Banijay-Zodiak, qui produit notamment les émissions de l'animateur Cyril Hanouna, et est le n°3 européen de son secteur.

Ce retour en force dans les jeux vidéo constitue néanmoins un virage surprenant de la part du groupe français, qui s'était au contraire retiré quasi totalement depuis deux ans du colosse américain des jeux vidéo, Activision Blizzard, éditeur de séries au succès planétaire comme Call of Duty, Warcraft, Diablo ou Starcraft. Il n'en détient plus que 5,8%, contre 61% en 2013.

Troisième éditeur de jeux vidéo au monde, Ubisoft a réalisé un chiffre d'affaire de 96,6 millions d'euros au premier trimestre, en baisse de 73,2% par rapport à la même période l'an dernier, qui avait bénéficié de la sortie du succès Watch Dogs.

Spécialisé dans la production de jeux vidéo pour mobile, Gameloft a, de son côté, enregistré une perte nette de 16,6 millions d'euros au premier semestre, contre une perte de 0,1 million sur la période correspondante de 2014, à cause notamment de ventes décevantes sur les marchés chinois et japonais.