TransCanada Corporation, conseillée par le cabinet d'envergure mondiale Edelman pour vendre aux Québécois son controversé projet de pipeline, a réussi à calmer les angoisses de ses propres actionnaires en faisant miroiter hier une forte croissance de leur dividende.

L'entreprise de Calgary, dont le plan de communication a fait l'objet d'une fuite très médiatisée cette semaine, s'est maintenue en Bourse hier, malgré le rejet par le Sénat américain d'une proposition visant à accélérer l'approbation du projet d'oléoduc transfrontalier Keystone XL. Mieux, le titre a gagné près de 2,7%, à 57,50$, dans un marché plat.

«Nous comprenons l'importance que nos actionnaires accordent à un dividende croissant, fort et prévisible», a déclaré le chef de la direction, Russ Girling, à l'occasion d'une journée d'information pour les investisseurs tombant à pic, à Toronto, hier.

TransCanada projette une croissance d'au moins 8% par année de son dividende, presque deux fois plus que le rythme des cinq dernières années, grâce à ses différents projets de petite et moyenne importance projetés dans les cinq prochaines années - ce qui exclut le très gros XL. «Le succès des projets majeurs pourrait entraîner un taux de croissance de 10% et plus, a ajouté Russ Girling.

Scission

L'entreprise de services publics fait face au militantisme de gros actionnaires qui souhaitent sa dislocation pour isoler le risque de Keystone. Trente-quatre fonds de couverture détiennent de ses actions, selon les dernières déclarations d'intérêts soumises aux autorités règlementaires. C'est trois fois plus qu'il y a trois mois.

L'investisseur milliardaire Thomas Sandell presse notamment TransCanada de convertir ses avoirs aux États-Unis en une société en commandite pour profiter d'avantages fiscaux, et d'essaimer sa division énergétique qui exploite notamment la centrale de cogénération de Bécancour. Sandell Asset Management Corp., qui détenait 0,13% de TransCanada à la fin de septembre, précise dans sa présentation que la scission du groupe permettrait de séparer les projets d'oléoducs Keystone XL et Énergie Est, en prévision d'un rejet.

L'analyste Faisel Khan, de la firme Citigroup, évoquait déjà cet été la dislocation de TransCanada en soulignant que la diversité des opérations manquait de synergie et était «un fardeau de gestion». Jason Stevens, du service de recherche Morningstar, souligne par ailleurs dans un rapport récent que TransCanada risque de perdre «d'importants capitaux en plus d'opportunités d'investissements futurs attrayants» si XL est bloqué.

Le pipeline Keystone XL transporterait le pétrole des sables bitumineux de l'Alberta jusqu'au golfe du Mexique. La question de son approbation devrait refaire surface au cours de la prochaine année, alors que les républicains, pro-Keystone, reprendront le contrôle du Sénat. Il risque par contre toujours de se buter au veto du président Barack Obama.

Au Canada, 36% de la population soutient le projet d'oléoduc transfrontalier Keystone XL, et 44% y sont opposés, indique un sondage publié hier par l'Université de Montréal. Reste 20% qui n'ont pas d'opinion sur la question.

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LA RECOMMANDATION

Les analystes sont partagés concernant TransCanada. Six en recommandent l'achat pour son potentiel d'expansion, six conseillent de le conserver en portefeuille pour son rendement en dividende de l'ordre de 3,4%, et trois le trouvent trop cher. Le titre s'échange à 25 fois les profits courus ou 22 fois les bénéfices prévus pour les 12 prochains mois. Patrick Kenny, de la Financière Banque Nationale, voit plus de potentiel dans les autres entreprises du secteur comme Enbridge.

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