Valeant Pharmaceuticals (T.VRX) International devra beaucoup renchérir dans les prochains jours si elle veut mettre la main sur le géant américain Allergan (AGN). Et ce n'est pas la seule embûche à la conclusion de la supertransaction stratégique pour la multinationale lavalloise.

L'opération publique d'achat hostile initiée il y a près de quatre mois échoit vendredi, à moins d'être bonifiée d'ici là. Valeant a déjà majoré deux fois sa proposition pour la porter à 53,5 milliards US. On parle maintenant de plus de 61 milliards US.

La plus grosse société pharmaceutique canadienne en Bourse offre 72$US comptant et 0,83 de ses actions pour chaque action d'Allergan. Avec la chute boursière de 12% du fleuron, cela ne vaut plus que 162$US comparé à 174$US il y a 2 semaines.

Selon l'analyste Sean Lanvin, de la firme new-yorkaise BTIG, le laboratoire californien mérite plus de 200$US par action avec son récent plan d'économies de 475 millions US impliquant 1500 suppressions de postes d'ici la fin de l'année. Avant même l'annonce du plan de restructuration, David Maris, de BMO Marchés des capitaux, estimait lui-même à plus de 200$US sa valeur par action en tant que société autonome, sans même de prime de contrôle.

Pas de croissance interne

Valeant, qui nous avait habitués à boucler rapidement des acquisitions toujours plus ambitieuses, se bute à la résistance du fabricant du traitement antirides Botox. Refusant même toute rencontre, Allergan accuse son poursuivant d'avoir un modèle d'affaires basé sur l'acquisition de brevets et la fermeture des laboratoires, à défaut de croissance interne.

L'analyste Thomas Tobin, de la firme Hedgeye Risk Management, du Connecticut, donne raison à Allergan. Selon lui, la révision à la baisse des prévisions financières de Valeant, au début du mois, prouve le tarissement de la source.

Plusieurs produits-vedettes de l'entreprise lavalloise feront bientôt face à la compétition de produits génériques. C'est le cas pour l'antidépresseur Wellbutrin, son deuxième vendeur, et l'antibiotique contre l'acné Solodyn, son numéro six.

Le groupe a par ailleurs dû se départir le mois dernier de la division des produits injectables de Medicis, à forte croissance, afin de prévenir les objections réglementaires à l'acquisition des seringues de Botox.

Valeant n'investit que 3% de ses revenus en recherche et développement, comparativement à 16% pour les autres fabricants de médicaments, selon un reportage accablant publié en fin de semaine dans le magazine américain Barrons et donnant beaucoup de place à l'expert de Hedgeye.

D'autres embûches

Barrons laisse croire que le projet de la multinationale canadienne pourrait faire face à l'opposition de Barack Obama. Le président a annoncé que son administration se dresserait contre les entreprises qui cherchent à payer moins d'impôts en déplaçant leur siège social en dehors des États-Unis.

Valeant était une société américaine jusqu'à la prise de contrôle inversée de la canadienne Biovail. Elle profite aujourd'hui d'un taux d'imposition de 3%, selon Barrons.

Les détenteurs d'obligations de Valeant s'inquiéteraient par ailleurs de l'accroissement de leur risque avec le surendettement du groupe, surtout s'il doit renchérir pour Allergan. Le taux de «junk bonds» est passé de 6,2% à 6,5% ces dernières semaines, relève encore le magazine américain.

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LA RECOMMANDATION

Selon Thomas Tobin, analyste pour Hedgeye Risk Management, l'action de Valeant pourrait grimper jusqu'à 200$US, advenant l'acquisition d'Allergan, grâce aux gains fiscaux prévisibles. Par contre, en l'absence de croissance organique au sein de l'entreprise, elle chutera à 70$US, croit-il, en cas d'échec, scénario qui lui paraît de plus en plus probable. Le titre a perdu 2,2%, à 117,14$, hier. Valeant a perdu deux de ses partisans dans la communauté financière ces dernières semaines. Il reste tout de même encore 17 analystes sur 21 qui en recommandent l'achat.