Le très sérieux quotidien financier The Wall Street Journal (WSJ) s'offre une page légère d'histoire pour son 125e anniversaire. Le journal à l'aspect austère jette un regard bien contemporain sur l'actualité de ce jour du 8 juillet 1889 qui l'a vu naître. En voici quelques titres.

Le télégraphe accélère la vitesse des transactions

Il faut moins de 30 secondes pour que le prix d'une transaction à la Bourse de New York soit relayé à Boston, en 1889. La vitesse de négociation va crescendo avec l'électricité, souligne le chroniqueur-vedette Jason Zweig qui raconte que le parquet de la Bourse de New York, avec ses téléphones et télégraphes, est l'un des centres technologiques les plus avancés du monde:

«La caverneuse salle principale est bordée de téléphones où les clercs reçoivent les ordres qui affluent de partout au pays. Les préposés gribouillent les commandes sur des bordereaux qui sont bourrés dans des tubes pneumatiques qui les soufflent d'un bout à l'autre du parquet jusqu'aux stations de négociation en forme de fer à cheval. Quand la transaction est conclue, souvent en une minute ou moins, le numéro du courtier est inscrit instantanément en tête du tableau géant sur les murs, lui signalant qu'il devrait prendre le téléphone.»

Ailleurs, le chroniqueur pince-sans-rire relate que la Bourse de New York utilisera sa nouvelle filiale télégraphique pour vendre des données de transaction à des courtiers prêts à payer pour connaître les prix avant les autres clients. Les «telegraph boys» sont-ils les précurseurs des «golden boys» ?

Des spéculatrices bouleversent les traditions de Wall Street

Les femmes tentent leur chance à la Bourse, et les jupes à volants bruissent à Wall Street, raconte aussi le WSJ dans son édition spéciale du 8 juillet 1889:

«En 1880, Mary Cage, une amie de la militante féministe Elizabeth Cady Stanton, a ouvert à Broadway une Bourse pour les femmes qui veulent spéculer sur les titres de chemins de fer et de mines. Madame Stanton est elle-même réputée spéculer beaucoup.»

Suit l'histoire - tout aussi véridique - de Hetty Green, que l'on croit être la femme la plus riche aux États-Unis et qui détient très probablement le plus gros portefeuille d'actions de l'époque. L'approche de la «sorcière de Wall Street» rappelle celle de l'oracle d'Omaha, Warren Buffett: acheter et garder ses actions pendant des années, voire des décennies. Elle conseille aussi de ne pas avoir de bureau et de manger lentement.

Quoi de neuf ?

On retrouve également à la une du numéro factice du WSJ du 8 juillet 1889 la fameuse colonne (alignée à la gauche, depuis 2006) consacrée au sommaire des nouvelles de la journée. Extraits:

> «L'indice Dow Jones de 12 titres a clôturé samedi à 87,71 points [NDLR: près de 17 000 maintenant], en baisse de 0,4% pour la séance, mais en hausse de 1,4% depuis le début de l'année. Au total, 96 520 actions ont été brassées à la Bourse de New York.»

> «Alors que le Trésor américain continue son programme massif d'achat d'obligations, plusieurs investisseurs craignent une bulle du marché obligataire.»

> «Le courtier de papiers commerciaux Goldman, Sachs & Co. voudrait joindre la Bourse de New York.»

> «Le mouvement pour l'annexion du Canada aux États-Unis gagne des adeptes malgré une défaite au Parlement.»

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125 ans

Le Wall Street Journal est le porte-voix de la finance américaine depuis 125 ans. Il est le quotidien économique et financier le plus vendu au monde et sa diffusion aux États-Unis dépasse celle du quotidien généraliste USA Today. Créé par les trois fondateurs du groupe Dow Jones, Charles Dow, Edward Jones et Charles Bergstresser, puis racheté en 1902 par son correspondant de Boston, Charles Barron, le journal est passé aux mains du groupe News Corp. de Rupert Murdoch en 2007. Le quotidien de Wall Street a obtenu 33 prix Pulitzer, considérés comme les plus prestigieux du monde journalistique.