Comme au début de chaque trimestre, La Presse reprend sa consultation de quatre experts en répartition d'actifs. Pour la période estivale, nous leur demandons de revenir sur les faits marquants du printemps, mais surtout d'indiquer leurs attentes pour le trimestre qui s'amorce. On remarquera bien peu de changements apportés à la répartition de leur portefeuille fictif, calibré à 100 000$ le 1er janvier. L'exercice consiste à formuler des recommandations pour faire fructifier ou pour protéger le capital d'un REER autogéré.

Les six premiers mois de l'année ont été particulièrement profitables aux investisseurs qui ont presque eu l'embarras du choix. En fait, tout a grimpé.

C'était particulièrement vrai au trimestre dernier, alors que la quasi-totalité des experts s'était plutôt attendue à ce que les taux d'intérêt nord-américains à long terme mettent fin à leur descente hivernale. Elle s'est en fait accélérée, à la surprise générale et au grand dam de ceux qui avaient prudemment choisi de placer plus de billes en encaisse.

«La structure de taux va se corriger tôt ou tard», lance Michel Doucet, vice-président, gestion de portefeuille, chez Desjardins Marchés des capitaux, pour expliquer sa faible part investie en obligations, un choix qui l'aura pénalisé au printemps.

«Je suis conscient du risque, mais je pense que l'inflation est plus forte que les banques centrales nord-américaines ne l'admettent, pense plutôt Stéfane Marion, économiste et stratège en chef à la Banque Nationale. Au quatrième trimestre, il sera encore possible d'augmenter l'encaisse.»

Bref, rien à signaler sur le front durant l'été. «Le risque va reprendre au plus tôt lors du symposium de Jackson Hole à la mi-août, sinon à l'automne, estime pour sa part François Bourdon, vice-président et chef adjoint des placements chez Fiera Capital. Beaucoup de capitaux veulent se repositionner et ils ne craignent pas les banques centrales.»

Cette année, le thème du symposium qui réunit économistes de renom et banquiers centraux est les nouvelles dynamiques du marché du travail, ce qui paraît un sujet peu porteur pour préconiser des hausses de taux, compte tenu du taux d'activité en deçà des sommets d'avant récession un peu partout, y compris au Canada.

Objectif croissance

«La Réserve fédérale a le seul même objectif qu'il y a un an, deux ans, trois ans, quatre ans: la croissance, souligne Vincent Delisle, stratège chez Scotia Capitaux. Pourtant l'économie s'est améliorée.»

À preuve, peut-on dire, le taux de chômage a baissé à 6,1% en juin, cible de la Fed pour la fin de l'année.

Mais on peut parier que la forte révision de la croissance annualisée au premier trimestre (de -1,1 à -2,9%) fournisse à la Fed une belle assise pour garder le rythme actuel du ralentissement de sa détente quantitative. Cela est de nature à combler d'aise investisseurs et spéculateurs, à exercer des pressions à la baisse sur les taux obligataires et à la hausse sur les indices boursiers.

«On approche d'une surévaluation, prévient M. Bourdon. Il faudra surveiller quand les banques centrales vont lever le pied, mais ce ne sera pas ce trimestre-ci. L'environnement devient de plus en plus dangereux, mais notre pondération en actions reste adéquate.»

«Une correction à court terme reste possible», affirme même M. Doucet.

Il croit néanmoins encore au potentiel du marché américain qu'il estime plus intéressant que le canadien, trop lié à l'énergie à son goût.

Il se distingue aussi en ne boudant plus les marchés émergents, surtout à cause de la Chine dont les fondements structurels s'améliorent.

M. Marion partage la lecture de M. Doucet de l'économie chinoise. Il se démarque toutefois par son fort credo dans les actions canadiennes.

«Le TSX est le seul indice dont les prévisions de revenus sont revues à la hausse, note-t-il. Et les aurifères pourraient donner un coup de pouce puisque Janet Yellen [présidente de la Fed] est complaisante avec l'inflation.»

La forte poussée du S&P/TSX rend la vie bien difficile aux gestionnaires de portefeuille, qui parviennent difficilement à le battre cette année, alors que l'écrasante majorité (95%) l'avait fait en 2013, remarque M. Delisle.

«La Bourse canadienne profite de l'énergie qui améliore les perspectives de profit. L'augmentation des profits estimée en énergie est de 14%, comparativement à 0 pour les sociétés américaines. Pour les financières, c'est 4% comparativement à -4%», précise-t-il.

Bref, un été beau et chaud en attendant les brises automnales.

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RENDEMENT DE NOS EXPERTS

[F. Bourdon | V. Delisle | M. Doucet | S. Marion]

Avoir au 1er janvier : 100 000$ | 100 000$ | 100 000$ | 100 000 $

Rendement au premier trimestre : 4,2% | 4,3% | 4,3% | 4,2%

Avoir au 31 mars : 104 160$ | 104 332$ | 104 252$ | 104 206 $

Rendement au deuxième trimestre : 2,9% | 2,6% | 1,8% | 3,3%

Rendement en 2014 : 7,2% | 7,1% | 6,2% | 7,6%

Avoir au 30 juin : 107 181$ | 107 054$ | 106 175$ | 107 642 $



RÉPARTITION AU 1er AVRIL (EN %)



Encaisse : 10 | 10 | 20 | 5

Obligations (DEX Capital) : 25 | 20 | 10 | 35

Actions canadiennes (S&P/TSX) : 30 | 23 | 15 | 33

Actions américaines (S&P 500) : 25 | 24 | 30 | 12

Actions mondiales (EAEO) : 10 | 15 | 25 | 7

Marchés émergents (MSCI EM) : 0 | 8 | 0 | 8

Pourcentage en actions : 65 | 70 | 70 | 60



RÉPARTITION AU 1er JUILLET (EN %)



Encaisse : 10 | 10 | 20 | 5

Obligations (Dex Capital) : 25 | 20 | 10 | 35

Actions canadiennes (S&P/TSX) : 30 | 23 | 15 | 33

Actions américaines (S&P 500) : 25 | 24 | 30 | 12

Actions (EAEO) : 10 | 15 | 20 | 7

Marchés émergents (MSCI EM) : 0 | 8 | 5 | 8

Pourcentage en actions : 65 | 70 | 70 | 60



RENDEMENT TRIMESTRIEL DES INDICES (EN %)



Encaisse : 0,2

Obligations (DEX Capital) : 2

Actions canadiennes (S&P/TSX) : 6,4

Actions américaines (S&P 500) : 1,6

Actions EAEO (MSCI EAEO) : 0,7

Marchés émergents (MSCI EM) : 3