Il y a du positif et du négatif dans le plus récent numéro de l'influent magazine financier Barron's sur les perspectives boursières. Peut-être plus de négatif si on considère la propension généralement optimiste de cette publication.

«Tired Bull [Le taureau est fatigué]», titre le magazine avec une illustration de la mascotte des marchés haussiers affalée dans un fauteuil, en page frontispice. «Just Chilling [On se calme]», reprend-on en pages intérieures.

La mauvaise nouvelle: seulement 56% des gestionnaires de fortune misent encore sur la croissance du marché boursier américain, comparativement à 68% il y a six mois. La bonne nouvelle: ces mêmes experts croient que le marché boursier pourrait encore s'apprécier de 10% d'ici la mi-2015, ce qui n'est pas à dédaigner. Entre-temps, une correction de l'ordre de 10% n'est pas exclue.

Le magazine financier fondé en 1921 sonde périodiquement l'humeur des grands investisseurs depuis plus de 20 ans. Cent cinquante-deux gestionnaires de fortune américains, les plus grands comme de plus petits, ont participé au plus récent exercice.

«Nous allons voir une vraie hausse dans le marché, ou une vraie baisse», déclare un expert, plutôt mitigé, cité dans l'article. «Le marché n'est pas ridiculement cher comme il l'a été à d'autres sommets, mais il n'est pas bon marché non plus», dit un autre, tout aussi prudent.

Les experts sondés considèrent généralement que les cours actuels reflètent toutes les bonnes nouvelles. Ils misent sur une croissance lente, mais régulière de l'économie américaine. Il faudrait une forte hausse des profits des entreprises pour soutenir une reprise boursière substantielle, croient-ils.

À plus long terme, 54% des répondants croient que le marché boursier va inévitablement baisser quand la Réserve fédérale va commencer à relever les taux. Ce serait dans les plans pour le deuxième semestre 2015, croient près de la moitié des grands financiers.

Les gestionnaires de fortune ont des points de vue plus tranchés sur les titres-vedettes de l'heure. Trois sur quatre misent sur Apple, Berkshire Hathaway ou JPMorgan Chase. Tout autant craignent pour Facebook, Herbalife, Sears Holdings ou Tesla Motors.

Le canari dans la mine

On connaît le rôle historique du canari dans les mines de charbon: celui d'un détecteur de gaz toxiques. Les petites capitalisations sont aussi un bon indicateur de toxicité en Bourse. Or, l'alarme est beaucoup plus nette de ce côté que chez Barron's.

Les gestionnaires de fortune tournent en effet le dos à ces titres qui leur ont rapporté gros au cours des cinq dernières années, raconte l'agence de presse financière Bloomberg. Les spéculateurs, comme les fonds de couverture, ont même gagé 2,8 milliards US ce mois-ci que l'indice général Russell 2000, qui regroupe autant de titres de diverses importances, va baisser. C'est la plus grosse mise moyenne depuis 2004.

Cette volte-face se reflète par un recul de 7,1% des titres juniors par rapport à leur sommet de 2014. Ceux-ci pèsent d'ailleurs sur l'indice global Standard&Poor's 500, qui s'est éloigné de 1,5% de son record du début du mois.

«Les titres de petite capitalisation sont au niveau le plus cher que j'ai jamais vu, et ça fait 20 ans que je fais ça», commente Eric Cinnamond, gestionnaire du fonds Aston/River Road Independent Value, en entrevue à Bloomberg. «Il y a beaucoup de camelote dans le Russell 2000. Pour un fonds de couverture qui voit les gens vendre des titres comme Netflix et Facebook ou des biotechs, une bonne façon de réduire le risque est de vendre le Russell 2000.»

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RECOMMANDATIONS DES EXPERTS

Favorables / Défavorables

Apple: 74% / 26%

Amazon.com: 51% / 49%

Berkshire Hathaway: 78% / 22%

Facebook: 26% / 74%

Herbalife: 14% / 86%

IBM: 49% / 51%

J.C. Penney: 19% / 81%

JPMorgan Chase: 84% / 16%

Netflix: 39% / 61%

Sears Holdings: 6% / 94%

Tesla Motors: 21% / 79%

Source : Barron's