L'éditeur britannique du populaire jeu vidéo Candy Crush a finalement estimé sa valeur à 7,1 milliards de dollars pour son entrée à Wall Street prévue mercredi, une opération très attendue mais jugée risquée par beaucoup d'analystes.

King Digital Entertainment va introduire 22,2 millions d'actions sur le New York Stock Exchange, au prix unitaire de 22,50 dollars, selon les modalités définitives annoncées mardi soir.

Le prix retenu, pile au milieu de la fourchette initialement annoncée de 21 à 24 dollars, lui permettra de lever 500 millions de dollars, et même jusqu'à 574 millions en cas d'exercice ultérieur d'une option de surallocation.

Le cabinet d'études PrivCo prédisait dans une note lundi «une forte demande (...) basée sur la reconnaissance suscitée par Candy Crush», le titre phare de l'éditeur, dans lequel des millions d'accros dans le monde tentent de rassembler et de faire exploser des bonbons multicolores sur leurs téléphones intelligents.

PrivCo pourtant «recommande aux investisseurs d'éviter l'introduction en Bourse de King»: il met en garde contre la trop forte dépendance de King à Candy Crush, qui représentait 97 de ses 144 millions de joueurs quotidiens en février. Les deux titres suivants, Farm Heroes et Pet Rescue, ne revendiquent respectivement que 20 et 15 millions d'utilisateurs.

Trop cher?

Plusieurs analystes avaient déjà jugé King ambitieux lors de la publication il y a deux semaines des premiers détails sur l'opération, qui envisageaient une valorisation allant de 6,6 à 7,6 milliards de dollars.

King estime qu'il vaut davantage que Zynga, le pionnier américain des jeux sur Facebook avec des titres comme FarmVille, évalué à un peu plus de 4 milliards de dollars mardi soir à la clôture. Mais un peu moins qu'un acteur établi des jeux vidéo comme Electronic Arts, créateur notamment de SimCity, qui émarge à environ 9 milliards. Electronic Arts est réputé pour des jeux plus sophistiqués, utilisés sur consoles ou PC par des utilisateurs souvent aguerris.

King personnifie au contraire, comme Zynga, des jeux simples d'accès destinés à un large public. Nés dans les années 1980 avec des titres devenus culte comme Pac-Man ou Tetris, ces jeux connaissent un nouvel élan grâce au succès des téléphones intelligents et des réseaux sociaux.

Le boom des jeux mobiles a permis à King, créé en 2002, de voir sa croissance exploser ces deux dernières années. Son chiffre d'affaires a ainsi bondi à 1,88 milliard de dollars en 2013 contre 164 millions en 2012.

Zynga, l'exemple à ne pas suivre

Les analystes soulignent les nombreuses similitudes entre King et Zynga, qui constitue toutefois un précédent fâcheux.

Zynga aussi avait été gourmand lors de son introduction en Bourse en 2011: il avait levé 1 milliard de dollars et s'était évalué à 7 fois plus.

Zynga comptait à l'époque seulement 54 millions de joueurs et il était comme lui très dépendant d'un titre, FarmVille. Celui-ci ne représentait toutefois que 27% de ses revenus, quand Candy Crush pèse pour 78% dans ceux de King, selon des données compilées par la société spécialisée dans les introductions en Bourse Renaissance Capital.

Passé l'enthousiasme des débuts, quand les joueurs se sont lassés, les bénéfices et le cours de l'action Zynga ont chuté. La société a fermé des studios de création, licencié des centaines de salariés, mais toujours pas retrouvé son élan perdu.

King pourrait bien connaître un sort similaire, préviennent les analystes.

Le groupe britannique n'évoque pour l'instant aucun projet en développement susceptible de soutenir sa croissance à long terme, alors que le succès de Candy Crush «a déjà nettement ralenti», souligne ainsi PrivCo.

«King estime que la longévité d'un joueur payant pour un jeu particulier va de deux à neuf mois», relève le cabinet, rappelant que le début du boom de Candy Crush remonte à un peu plus d'un an et que «beaucoup des joueurs payants de Candy Crush vont bientôt atteindre la fin de leur durée estimée de jeu.»