De retour du Salon aéronautique de Farnborough où ils ont eu l'occasion de rencontrer les dirigeants de Bombardier, trois analystes financiers attachés à de grandes institutions financières canadiennes prévoient des retards plus ou moins importants pour la CSeries.

Cameron Doerksen, de la Financière Banque Nationale, dit demeurer positif pour Bombardier malgré sa performance mitigée à Farnborough. L'entreprise montréalaise a obtenu plusieurs commandes intéressantes pendant le salon: la confirmation d'une commande de 6 CRJ900 de la part de China Express Airlines, une commande pour 15 appareils de la CSeries de la part d'un client anonyme et une lettre d'entente pour 10 appareils de la CSeries signée par AirBaltic. Skywest, important client, lui a par contre préféré la japonaise Mitsubishi pour une importante commande portant sur 100 biréacteurs régionaux.

Le carnet de commandes CSeries (y compris les lettres d'intention et commandes conditionnelles) comprend maintenant 183 avions pour 13 clients. «Nous ne sommes pas préoccupés par le niveau des commandes pour la CSeries et nous croyons que les commandes vont s'accélérer avec les vols d'essai», pose M. Doerksen. L'Embraer 170 avait seulement 112 commandes fermes au moment de son premier vol en 2002, note-t-il. Sa production devait s'avérer très fructueuse avec plus de 1000 commandes fermes.

Le calendrier très serré de production pour la CSeries soulève davantage d'inquiétudes. Bombardier projette toujours un premier vol d'ici à la fin de l'année. L'analyste de la Financière s'attend pour sa part à des délais de trois à six mois, ce qui serait «très gérable et ne mettrait aucunement en péril le programme». On devrait avoir l'heure juste dès septembre, croit-il.

«Il est de plus en plus évident pour nous que le premier vol n'aura lieu qu'en 2013, affirme pour sa part Fadi Chamoun, de BMO Marché des capitaux. L'assemblage du premier avion n'a pas encore commencé et il y a un haut degré d'incertitude quant à la livraison à temps des systèmes de commandes de vol électriques. Un retard de trois à six mois ne surprendra personne qui a suivi le programme de près, étant donné que la société a elle-même souligné que l'échéancier est très exigeant.»

Quant à lui, Walter Spracklin, de RBC Marchés des capitaux, s'en remet au discours officiel: «Quand la direction de Bombardier parle de retards, c'est une question de jours et de semaines, pas de mois ou d'années.» Selon lui, la majorité des systèmes maintenant testés, les craintes quant à la conception du produit, peut-être à leur paroxysme actuellement, vont se calmer. Cela enlèvera aussi la pression exercée par le programme CSeries sur le cours des actions de Bombardier.

Les trois analystes cités classent Bombardier parmi les titres appelés à «surperformer» avec un prix cible de plus de 5$. Au total, 19 des 25 analystes qui suivent le titre en recommandent l'achat. Deux seulement sont vendeurs. Les actions de Bombardier étaient pratiquement inchangées à 3,89$, en baisse de deux cents, hier, à la Bourse de Toronto.