Bien que le Canada semble à l'abri des problèmes qui touchent plusieurs pays européens, son marché boursier continue de traîner la patte comparativement au marché américain.

Il est inquiétant en effet de constater que même la reprise du mois de juin a été beaucoup moins vigoureuse sur le parquet canadien qu'aux États-Unis. Pendant que le S&P 500 gagnait 7%, l'embellie du S&P/TSX se limitait à 4,5%.

Pire encore, depuis le début de l'année, la Bourse américaine est en hausse de 5,6%, alors qu'au Canada, l'indice composé de la Bourse de Toronto perd 4,8%.

Depuis deux mois, le S&P/TSX s'est retrouvé à plusieurs reprises à 11 300 points. Cela constitue un niveau de support important, signale Dennis Mark, analyste technique à la Financière Banque Nationale. Mais ce niveau tiendra-t-il longtemps? «Tout dépendra du dollar américain», répond sans hésiter Luc Fournier, gestionnaire de portefeuilles à l'Industrielle Alliance.

Depuis un an, le dollar américain est en hausse de plus de 12% comparativement à un panier composé des principales devises (DXY). Tant qu'il demeure sur cette poussée, c'est le signe que les investisseurs ne veulent prendre aucun risque et préfèrent la sécurité des obligations. Tous les actifs plus risqués, telles les matières premières, perdent leur attrait. «On ne jure plus que par la sécurité du capital», dit Luc Fournier. «Et tant que ce phénomène durera, la Bourse canadienne n'ira nulle part compte tenu de sa pondération dans le secteur des ressources», ajoute-t-il.

Une lueur d'espoir

S'il existe un espoir de reprise du marché boursier canadien, il vient du fait que le consensus des investisseurs concernant le dollar américain est relativement unanime, explique Luc Fournier. «Tout le monde est du même côté de la trade», dit-il, pour reprendre une expression propre au milieu de l'investissement.

«Les hedge funds ont tous des positions d'acheteurs sur le dollar américain», ajoute-t-il. Mais l'expérience a souvent démontré que les renversements de tendance se produisent lorsque la majorité des investisseurs sont du même avis, rappelle le gestionnaire de l'Industrielle Alliance.

Pour Dennis Mark, le regain des marchés en juin reflétait le fait que ceux-ci avaient beaucoup baissé en avril et en mai et avaient atteint un état de survente élevé. La hausse de juin a permis de corriger cette situation. La suite pourrait être plus ardue. «Nous connaissons un marché boursier difficile au Canada depuis un bon moment, et cela pourrait se poursuivre, car le bull market amorcé en 2009 arrivera bientôt à maturité, si ce n'est pas déjà fait», dit-il.

Il sera important que le niveau de support de 11 300 de l'indice S&P/TSX freine la baisse, sinon les investisseurs pourraient devoir courir aux abris une fois de plus.

Un secteur financier fragilisé

Outre les matières premières, les banques ont été pendant plusieurs années un moteur de croissance pour la Bourse canadienne. Rappelons que le secteur financier représente autour de 30% de la capitalisation boursière de l'indice S&P/TSX.

Les actions des banques canadiennes ont subi les contrecoups des craintes des investisseurs envers les institutions financières partout dans le monde. À l'exception de la Banque Nationale, il faut remonter plus d'un an en arrière pour retrouver le sommet des actions des autres banques qui ont plafonné pour la plupart au printemps 2011, et même en 2010 dans le cas de la Banque Royale.

Mais aussi, les résultats des banques canadiennes sont tributaires de la croissance et de la qualité du crédit au Canada. Et à ce chapitre, les prochains trimestres n'ont rien d'encourageant.

Le 21 juin, le ministre des Finances a annoncé de nouvelles mesures qui toucheront le marché du crédit immobilier, dont une diminution de la période d'amortissement maximum de 30 à 25 ans, ainsi que des règles plus strictes concernant l'attribution des prêts.

Ces mesures freineront la croissance du crédit hypothécaire à un moment où le taux de croissance du crédit à la consommation est déjà en net repli, et ce, depuis 2010, ont écrit les analystes de Brockhouse Cooper dans une note adressée à leurs clients hier.