Le trader français, basé à Londres et soupçonné d'avoir contribué à faire perdre des sommes colossales à la banque américaine JPMorgan (JPM) demeurait sans visage vendredi mais a gagné un nouveau surnom: «Voldemort», le méchant aux immenses pouvoirs de la saga Harry Potter.

Ce trader, Bruno Michel Iksil, était jusque-là connu comme «la baleine de Londres», en référence aux sommes gigantesques qu'il aurait englouties dans certains produits aussi complexes que risqués.

L'annonce surprise jeudi par le PDG Jamie Dimon d'une perte de courtage de 2 milliards de dollars lui a donné une dimension supplémentaire.

Jamie Dimon a semblé établir un lien entre cette perte colossale et les activités du trader, révélées en avril, tout en insistant sur le fait que la responsabilité était avant tout collective.

Ça n'empêche pas la presse et les milieux financiers d'insister sur le rôle du trader français.

De mammifère marin, il est passé au rang de héros malfaisant, après avoir été appelé «Voldemort» par un confrère anonyme, un surnom qui a aussitôt fait florès sur internet comme dans les salles de marché.

«C'est sans doute pour décrire un personnage irréel aux pouvoirs incroyables», explique un trader dans un cabinet de courtage, souhaitant lui aussi garder l'anonymat.

«L'affaire fait pas mal de bruit parmi nous, car elle met à nouveau en évidence le pouvoir qu'une poignée de personnes peut détenir pour influencer tout le marché», a-t-il ajouté. Mais il admettait, comme un autre de ses collègues interrogés, ne connaître personne ayant rencontré M. Iksil.

De fait, le personnage restait vendredi largement mystérieux, d'autant qu'aucune photo de lui n'a été publiée par la presse.

Il est sorti de l'École centrale de Paris (ECP) en 1991 avec un diplôme d'ingénieur.

À en croire les éléments glanés par les médias, c'est un homme «discret», qui «approcherait de la quarantaine» et travaille pour JPMorgan depuis 2005.

Selon le Daily Mail, il rentre le jeudi soir à Paris pour y passer de longs week-ends avec sa femme et leurs quatre enfants.

«C'est un homme très tranquille, qui aime la vie de famille. Il n'a pas de voiture de sport clinquante et son passe-temps favori est la cuisine», a dit de lui sa soeur Sandrine au tabloïd.

Il a été employé par Ixis, ancienne émanation de la Caisse des dépôts fusionnée avec Natexis Banques Populaires en 2006 pour créer Natixis.

Après avoir quitté Ixis en 2002, il a rejoint Natexis Banques Populaires jusqu'en mai 2005, a indiqué Natixis.

L'agence financière Dow Jones, citant des «sources proches de la banque», assurait vendredi qu'il occupait toujours son poste à JPMorgan.

Le registre public de l'Autorité des services financiers (FSA) précise uniquement que Bruno Michel Iksil détient ce poste depuis 2007 et qu'il n'a fait l'objet à ce jour d'aucune action disciplinaire.

Certains analystes, comme Anita Paluch du cabinet de courtage Gekko, avaient souligné lors de l'éclatement de l'affaire que Bruno Iksil «ne devait pas être assimilé à un trader fou» dans la mesure où ses activités semblaient parfaitement connues et encadrées par sa hiérarchie.

Et, contrairement à certains confrères ayant défrayé la chronique comme l'employé de la Société Générale Jérôme Kerviel, ses interventions sur le marché étaient a priori légales.

La FSA et l'Autorité de lutte contre la délinquance financière (SFO) n'ont d'ailleurs pas annoncé à ce jour l'ouverture d'une enquête.

Interrogées par l'AFP, elles se sont refusées vendredi à tout commentaire, tout comme le porte-parole londonien de JPMorgan.