Ravagées depuis l'éclatement de la crise grecque cet été, les Bourses européennes offrent-elles maintenant un meilleur potentiel d'appréciation que les Bourses nord-américaines?

Entre le début du mois de juillet et le 24 novembre, les indices boursiers français et allemands, le CAC-40 et le DAX, ont chuté de près de 30%. C'est deux fois plus que l'indice S&P 500 aux États-Unis et le S&P/TSX au Canada.

Malgré le rebond spéculaire des 10 derniers jours, les Bourses européennes accusent toujours un retard d'environ 17% sur le niveau de juillet, alors que le S&P 500 n'est plus qu'à 6% de son niveau du milieu de l'été.

Ces performances relatives ont creusé l'écart entre la valorisation des Bourses européennes et américaines. Le CAC-40 et le DAX se négocient actuellement à moins de 10 fois les bénéfices prévus pour 2012. Cela se compare à près de 12 fois pour le S&P 500.

Sur la base des dividendes, les Bourses européennes semblent également plus attrayantes. Alors que le dividende du S&P 500 est légèrement supérieur à 2%, le dividende de l'indice allemand est de 4% et celui de l'indice français de 4,5%.

À deux jours du Sommet européen à Bruxelles, alors que l'espoir d'une entente quant à un plan de stabilisation de la crise des dettes souveraines et de l'euro est nettement plus élevé qu'il ne l'était à l'approche des rencontres précédentes, le moment est-il venu de céder à l'attrait des Bourses européennes?

Le président français, Nicolas Sarkozy, et la chancelière allemande, Angela Merkel, ont en effet annoncé hier s'être entendus sur une série de mesures pour dénouer la crise européenne. Ils les proposeront demain au président de l'Union européenne, Herman Van Rompuy. Ces propositions pourraient également ouvrir la porte à une plus grande participation de la Banque centrale européenne (BCE) pour résoudre la crise financière, ce que souhaitent ardemment les participants aux marchés financiers.

Des prévisions trop optimistes

Malgré ces développements positifs, il ne faut pas trop s'enticher de la valorisation des Bourses européennes, selon Jean-René Adam, stratège chez Hexavest. «Les Bourses européennes semblent bon marché, mais cela reflète les risques macroéconomiques qui existent outre-mer», dit-il.

Les mesures d'austérité que doivent adopter plusieurs des pays européens pour équilibrer leurs budgets vont faire plonger presque assurément la zone euro en récession, croit M. Adam.

Quant à l'économie américaine, suffisamment de données sur l'emploi, les ventes au détail et le commerce extérieur publiées récemment permettent de croire qu'elle maintiendra un taux de croissance positif.

Une croissance économique négative en Europe risque d'avoir un impact sur les bénéfices des sociétés et de rendre beaucoup moins attrayante la valorisation des marchés boursiers. Le ratio cours/bénéfices à moins de 10 fois repose sur une croissance des bénéfices de 6% en France, de 10% en Allemagne et de 16% en Italie, estime Stéfane Marion, économiste en chef et stratège à la Financière Banque Nationale. «Si l'économie européenne devait continuer de se contracter, ces prévisions de bénéfices risquent de ne pas se matérialiser», dit-il.

À la Financière, on ne recommande pas de surpondérer les actions européennes, ajoute M. Marion. Chez Hexavest non plus. «On maintient pour l'instant une pondération égale aux marchés», dit Jean-René Adam.

Les propos encourageants des dirigeants français et allemands en vue du Sommet européen les 8 et 9 décembre ont permis de bien commencer la semaine. L'indice de la Bourse de Paris CAC-40 a gagné 1,15%, alors que le DAX a pris 0,42% sur le parquet de la Bourse de Francfort.

Pour leur part, après un solide départ, les indices nord-américains n'ont pas pu conserver tous les gains réalisés en matinée. Tôt en après-midi, ils se sont tous repliés rapidement alors que le site internet du Financial Times (FT) prévenait que Standard&Poor's annoncerait en fin de journée qu'elle place en observation six pays européens détenteurs de la cote AAA, soit l'Allemagne, la France, les Pays-Bas, l'Autriche, la Finlande et le Luxembourg, selon FT. Cela signifierait que ces pays ont une chance sur deux d'être décotés d'ici 90 jours.

La présence de l'Allemagne sur cette liste aurait été l'élément qui a freiné la hausse des marchés américains. Le S&P 500 a néanmoins clôturé en hausse de 1% et le S&P/TSX de 0,45%.