Les résultats financiers des sociétés américaines sont suffisamment bons pour permettre un rallye boursier de fin d'année. Mais le dénouement toujours incertain de la crise européenne continue de faire ombrage.

Alors que près de 20% des entreprises du S&P 500 ont publié jusqu'à maintenant leurs résultats du troisième trimestre, on peut d'ores et déjà s'attendre à des bénéfices records, estime Marco Lettieri, économiste à la Financière Banque Nationale. Les bénéfices totaux par action pour les quatre derniers trimestres de l'indice atteindront 93,60$, un nouveau sommet historique.

Étnt donné le niveau actuel de l'indice autour de 1200, le ratio cours/bénéfices n'est que de 12,9. «On retrouve généralement un ratio aussi bas lorsque nous sommes en période de récession», dit M. Lettieri.

Pourtant, les résultats sont bons à plusieurs égards. Pour le trimestre qui vient de se terminer, les bénéfices sont en hausse de 13,7%, avec un facteur-surprise positif de 7,3%. C'est donc dire que plus d'entreprises ont surpassé les attentes de bénéfices que l'inverse.

De plus, la hausse des bénéfices est tributaire d'une augmentation des ventes de 9,7% durant le trimestre. Cela est très différent des trimestres précédents, alors que la croissance des bénéfices reposait plutôt sur un élargissement des marges bénéficiaires dû à des coupes dans les dépenses et à des licenciements.

Tergiversations politiques

Si le ratio cours/bénéfices se situe à un niveau de récession, c'est que le dénouement de la crise des dettes souveraines en Europe et son impact sur le système bancaire constituent un facteur de risque additionnel très élevé.

Au bout du compte, on finira bien par mettre l'argent nécessaire, explique Guy Liébart, président de Gestion Sodagep. Mais les tergiversations politiques créent une situation dangereuse. «Les dirigeants français et allemands doivent composer avec un nationalisme résurgent, tout en tenant compte de leurs impératifs politiques», dit-il. Rappelons que nous sommes à moins d'un an des élections présidentielles en France et que le second terme du gouvernement d'Angela Merkel prend fin en 2013.

Ne pas agir assez vite pourrait mettre en péril les banques européennes qui détiennent la dette grecque, ce qui entraînerait une situation similaire à celle de la faillite de Lehman Brothers en 2008.

Les dirigeants européens ont rendez-vous à Bruxelles dimanche dans le but de mettre en place une solution à la crise. Depuis quelques jours, les marchés fluctuent d'heure en heure en fonction des rumeurs et des informations émises quant à ce sommet.

Le problème n'est pas insoluble, car la dette totale des pays membres de l'Union européenne ne représentait au dernier décompte qu'environ 60% de la dette américaine, soit 8685 milliards US comparativement à près de 14 350 milliards US, explique M. Liébart.

Jusqu'à maintenant, les autorités européennes n'ont engagé que 440 milliards d'euros (environ 600 milliards US) dans le fonds européen de stabilité financière (FESF), et la Banque centrale européenne (BCE) n'a joué qu'un rôle limité jusqu'à présent. Cela se compare à une aide de plus de 4000 milliards US aux États-Unis si l'on tient compte des deux rondes d'assouplissement quantitatif (QE1 et QE2) de la Réserve fédérale.

La mise en place des liquidités nécessaires à affronter la faillite imminente de la Grèce et la contagion au système bancaire est donc possible. Mais elle nécessitera la coordination de tous les pays de l'Union.

De ce côté-ci de l'Atlantique, il faudra suivre de près le reste des résultats à venir. Les plus importants seront ceux des industries dites cycliques. C'est-à-dire les secteurs des matériaux, de la production industrielle et de la consommation discrétionnaire. «Des résultats positifs dans ces secteurs indiqueront que l'économie est capable de croître même dans le contexte rempli d'incertitude que nous connaissons actuellement», dit M. Liébart. Cela permettra peut-être un rallye boursier de fin d'année.