Les temps sont durs pour les banques américaines. Et ça ne risque pas de changer de sitôt. En plus d'affronter des marchés financiers très volatils et une économie qui peine à se remettre sur pied, de nouvelles règles pourraient réduire leur capacité de générer des revenus au cours des prochaines années.

JP Morgan Chase a ouvert jeudi la saison des résultats trimestriels. Ses profits ont diminué de 4% comparativement au même trimestre de l'année précédente.

Ce sont les activités sur les marchés des capitaux qui ont fait le plus mal. Les bénéfices provenant de ce secteur ont chuté de 14%, signale Peter Routledge, analyste à la Financière Banque Nationale. En conséquence, la banque a annoncé qu'elle supprimerait 1000 emplois de sa division banque d'investissement.

Le marché boursier a vite réagi. Le titre a perdu plus de 6% durant les deux premières heures de négociations. Et il a emporté dans son sillon les actions de Citigroup et de Bank of America qui ont toutes deux chuté de plus de 5%.

Même si les conditions des marchés s'amélioraient, les résultats des banques américaines pourraient continuer de souffrir au cours des prochains trimestres. La consultation annoncée sur la fameuse règle de Volcker s'amorce maintenant. Le but de cette règle, suggérée par l'ex-président de la Réserve fédérale (FED) Paul Volcker, est de limiter l'accès aux activités spéculatives pour les institutions dont les dépôts sont assurés par le gouvernement.

Cette période de consultation devrait durer environ trois mois. Même si les banques s'activeront à trouver toutes les échappatoires pouvant leur éviter d'abandonner ces opérations très lucratives, elles ne pourront certes pas freiner cette volonté des législateurs. D'autant plus que le mécontentement populaire envers les banquiers a de plus en plus de prise dans l'opinion publique, comme en attestent les manifestations anti-Wall Street.

Plusieurs grandes banques seront touchées. Les professionnels affectés à ces opérations se positionnent déjà en conséquence, constate Andrey Omelchak, officier en investissements chez Montrusco Bolton. Plusieurs ont commencé à migrer vers d'autres organisations, tels les hedge funds. De nouveaux fonds pourraient être créés par ces professionnels qui préfèreront exploiter leurs talents d'investisseurs, d'arbitragistes et de spéculateurs sous d'autres cieux.

Même Goldman Sachs songerait à abandonner son statut de banque pour se reconvertir en simple courtier comme elle l'était auparavant. Le but serait de poursuivre sans entrave ses opérations spéculatives sur les marchés des capitaux.

Les banques canadiennes

Les banques canadiennes écoperont également de la faiblesse des marchés pour le quatrième trimestre qui se terminera à la fin du mois d'octobre. Surtout la Banque Royale, car c'est celle dont le pourcentage des bénéfices provenant des marchés des capitaux est le plus élevé, note M. Omelchak.

Quant à la règle Volcker, les banques canadiennes devront se conformer aux changements de règles qui pourraient toucher leurs activités aux États-Unis. Ces changements sont attendus dès l'an prochain.

Outre ces facteurs, les banques canadiennes risquent de ne pas pouvoir s'appuyer sur une forte croissance des prêts. Les hypothèques résidentielles et les prêts à la consommation subiront les contrecoups du niveau d'endettement trop élevé des ménages canadiens, selon Peter Routledge. Les consommateurs devront diminuer leurs emprunts. «S'ils ne le font pas d'eux-mêmes, ce sont les gouvernements qui les inciteront à le faire en resserrant à nouveau les conditions des prêts hypothécaires, tels le terme et le pourcentage des mises de fonds initiales», dit-il.

Dans un rapport sur les perspectives des banques canadiennes publié le mois dernier, l'analyste de la Financière affirmait que les résultats du troisième trimestre terminé le 31 juillet allaient s'avérer les derniers bons résultats des banques pour quelque temps. Une économie sans tonus, la volatilité des marchés et la règle de Volcker pourraient bien lui donner raison.