Une course aux valeurs refuges et des marchés boursiers en baisse de 7% durant le dernier mois et demi. Sont-ce là les signes avant-coureurs d'une nouvelle déroute de l'économie et des marchés financiers?

Plusieurs experts que La Presse Affaires a consultés ne le croient pas. L'état des marchés en ce début d'été suscite plutôt une impression de déjà-vu. «Le scénario est en tout point semblable à celui de l'an dernier», dit Guy Liébart, président de Gestion Sodagep.

Jeudi, le taux des obligations américaines de 10 ans est passé sous la barre des 3% et les obligations canadiennes de long terme (30 ans) ne rapportaient plus que 3,38%.

Cette ruée vers les titres les plus sûrs s'explique d'abord par la crise des dettes souveraines qui a refait surface en Grèce, et dont le risque de contagion menace de nouveau la santé financière du système bancaire européen. Mais aussi, par les plus récents indicateurs économiques qui laissent croire que l'embellie du premier trimestre est maintenant chose du passé, et qu'elle fait place maintenant à un ralentissement.

Les mêmes événements s'étaient produits en 2010, rappelle Guy Liébart. Au printemps, les taux obligataires avaient atteint des niveaux encore plus bas que ceux que nous connaissons actuellement, et les Bourses avaient reculé de 17% en deux mois. Mais à compter de juillet, les marchés s'étaient inversés. Les obligations canadiennes de long terme avaient remonté au-dessus de 4%, et les bourses avaient bondi de 30% et plus durant les mois suivants.

Facteurs ponctuels

Revivrons-nous le même scénario? Nul doute que les récentes statistiques économiques américaines sont inquiétantes, explique Yvan Fontaine, premier vice-président d'Addenda- Capital. Mais elles ne justifient pas des taux obligataires aussi bas selon lui. Ces chiffres sont en partie la conséquence de facteurs ponctuels, tels que le tsunami au Japon et le prix élevé de l'essence, facteurs qui commencent maintenant à se résorber. Des taux plus élevés nous attendent à l'automne, croit-il.

Si les Bourses sont actuellement en mode correction, c'est qu'elles escomptent un ralentissement de l'économie mondiale, explique Stéfane Marion, économiste en chef à la Financière Banque Nationale. Mais pour qu'elles continuent de baisser beaucoup plus, il faudra que l'économie mondiale tombe en récession. «Cela est peu probable, car la toile de fond économique est nettement moins fragile aujourd'hui qu'en 2009», dit-il.

Les taux obligataires vont se replacer à un niveau plus compatible avec la croissance économique, croit également François Dupuis, économiste en chef au Mouvement Desjardins. «Comme l'an dernier, les taux obligataires remonteront en deuxième moitié d'année», dit-il.

Quant aux marchés boursiers, ils ne sont pas actuellement surévalués, ce qui diminue grandement le risque d'un écroulement. «L'indice S&P 500 se négocie à peine à 13 fois les profits, ce qui permet de croire à une appréciation éventuelle», dit-il .

Les dividendes sont également attrayants, souligne Stéfane Marion. Le dividende de l'indice S&P 500 est actuellement de 2,5% et celui du S&P/TSX de 2%.

L'année 2011 suivra donc un scénario semblable à celui de l'année dernière: les taux obligataires se normaliseront vers le haut et les Bourses feront mieux en deuxième moitié d'année. C'est du moins ce que croient plusieurs experts.