Révoltes dans les pays arabes, envolée du pétrole, catastrophe au Japon, autant d'événements anxiogènes pour les marchés financiers qui affichent pourtant une étonnante résistance depuis le début de l'année.

Le CAC 40 gagne 3% depuis le 1er janvier. Même optimisme en zone euro avec un gain de 2,5% de l'Eurostoxx 50 (les 50 plus grandes capitalisations boursières) et à New York, où le Dow Jones s'est adjugé près de 4,5%.

«Il y a encore deux ans face à un tel déluge de mauvaises nouvelles, les marchés boursiers auraient sans doute dévissé de plus de 10%», estime Christian Parisot, analyste chez Aurel.

Pendant la crise qui a suivi la faillite de Lehman Brothers, il y avait une véritable panique. Pour preuve, l'indice VIX, qui mesure la perception du risque par les marchés, s'était envolé à 81 en novembre 2008.

Rien de tel cette fois-ci où à chaque secousse géopolitique, les Bourses ont accusé le coup, mais très provisoirement, note l'économiste.

Ainsi, le séisme et le tsunami dévastateurs du 11 mars au Japon, suivis par l'accident de la centrale nucléaire de Fukushima, ont fait chuter les marchés pendant quatre séances consécutives, mais ceux-ci ont immédiatement effacé leurs pertes et l'indice VIX n'est monté qu'à 19.

«Les professionnels se sont mis très vite en quête de nouveaux relais de croissance», souligne Philippe Waechter, directeur des études économiques chez Natixis AM.

La santé retrouvée des entreprises en 2010 soutient les marchés depuis le début de l'année, incitant les investisseurs à rapatrier leurs capitaux, placés dans les pays émergents pendant la crise financière.

En France, par exemple, 38 des plus grosses capitalisations boursières ont dégagé des bénéfices de plus de 80 milliards d'euros, un bond de 70% par rapport à 2009. Et les marchés boursiers sont encore «largement sous-valorisés par rapport à la qualité des actifs qui les composent», remarque M. Parisot.

La reprise économique qui devrait être meilleure qu'attendu incite aussi à l'optimisme.

«Au printemps 2010, on craignait une récession, or il y a en toile de fond une croissance mondiale assez forte», commente Franck Nicolas, directeur de l'allocation d'actifs chez Natixis AM. Le Fonds monétaire international (FMI) a d'ailleurs récemment relevé sa perspective de 4,2% à 4,4% pour 2011.

«Les différents chocs sont plutôt perçus comme des aléas temporaires avec lesquels il faut jongler», analyse M. Waechter.

Même le drame qui a secoué le Japon, troisième économie mondiale, n'est pas perçu dans l'immédiat comme un réel danger pour la reprise économique.

«Les catastrophes naturelles peuvent se révéler positives pour l'économie, car les travaux de reconstruction dopent la demande», notent les analystes du cabinet de conseil britannique Capital Economics.

Les événements qui secouent le monde arabe n'ont pas, davantage, réussi à ébranler durablement le moral des investisseurs pour l'instant.

Ces tensions ont certes fait flamber les cours du pétrole qui flirtent avec leurs sommets historiques, mais «le marché ne croit pas à une hausse durable», commente M. Waechter, «du moins tant qu'aucun gros pays producteur ne sera touché».

D'une manière générale, «ces crises, sans en sous-estimer la gravité, servent de terrain favori aux opérateurs pour spéculer», souligne, fataliste, Franklin Pichard, directeur de Barclays Bourse.

De l'avis des experts, les marchés ne sont toutefois pas à l'abri d'une correction brutale si les tensions inflationnistes notamment en Chine conduisaient les banques centrales à relever encore leur taux ou si la crise de la dette en zone euro, qui frappe maintenant le Portugal, s'aggrave encore.

Au plus fort de la crise grecque en mai 2010, le marché parisien avait chuté de 11% en une semaine.