Après une journée très éprouvante, hier, l'attention des marchés financiers demeurera tournée vers l'Europe aujourd'hui encore.

Analystes et investisseurs attendent la confirmation d'une première phase du plan de sauvetage de centaines de milliards d'euros pour la devise commune et la Grèce, au bord de la faillite.

Au coeur des préoccupations: est-ce que les principaux gouvernements européens seront plus unis sur les moyens pour endiguer la crise de dette souveraine qui menace la viabilité de l'euro? Car de l'avis général, cette unité a été compromise par l'annonce en début de semaine par l'Allemagne, de façon unilatérale, d'un interdit sur les transactions à découvert sur certains titres bancaires et obligataires.

Encore hier, les divergences étaient manifestes entre les ministres économiques et les chefs des principaux gouvernements de la zone euro.

«L'interdit décrété par l'Allemagne a accentué le sentiment d'une division de l'Europe, alors que la conjoncture financière requiert qu'elle soit plus unie que rarement auparavant», a déploré David Keeble, analyste à Berlin pour le Crédit Agricole, une importante banque française.

Pendant ce temps, aux États-Unis, l'annonce d'un rebond des demandes d'assurance chômage et du repli d'un important indicateur avancé ont ravivé des doutes sur la viabilité de la reprise économique.

Conséquence: le cumul de ces incertitudes en Europe et aux États-Unis s'est avéré très lourd sur les marchés boursiers et financiers.

Ces incertitudes ont provoqué une autre glissade majeure des principaux indices, qui ont cédé de 2% à 4% en Europe et en Amérique du Nord, notamment.

Alors que des investisseurs cherchaient refuge avec le dollar américain, le dollar canadien et l'euro ont encore été dépréciés sur le marché monétaire. Au point de susciter des rumeurs d'une intervention spéciale par la Banque centrale européenne (BCE).

«Tous les marchés sont pris dans un terrible tourbillon d'incertitudes. Toutes les catégories d'actifs financiers sont affectées», a résumé David Buik, analyste de marché chez BGC Partners, à Londres.

Une vraie correction

En Bourse, avec cet autre recul d'hier, les principaux indices nord-américains et européens se retrouvent désormais en vraie correction. C'est-à-dire en repli de plus de 10% depuis leurs sommets précédents atteints à la fin avril.

Pire encore, ces indices boursiers ont glissé sous leur moyenne des 200 séances précédentes. De l'avis de stratèges boursiers, ce passage constitue un signal de marché baissier qui pourrait s'accentuer pendant plusieurs semaines, sinon des mois.

Au Canada, malgré le meilleur état de l'économie et des finances nationales, le dollar et la Bourse n'ont pu résister à cette grande vague d'inquiétude. La raison? Les doutes accrus envers la reprise dans les économies avancées ont frappé les prix des matières premières, en particulier le pétrole.

«Le Canada a beau avoir un meilleur bilan économique et de meilleures banques. Mais qui achètera ses matières premières si l'économie du reste du monde est dans le pétrin?» a résumé Steven Conville, gestionnaire chez Macquarie Private Wealth, à Toronto.

En quelques heures, hier, les contrats à terme pour les livraisons d'or noir en juillet ont encore reculé de 3% à 70 $US le baril, le prix le plus bas depuis juillet 2009. Ceux de juin ont reculé de 2,7% à 68,01 $. En trois semaines à peine, le prix du pétrole s'est replié de 20%.

«Ça témoigne d'un virage de sentiment envers l'économie. Les Européens ont des problèmes financiers et les dernières statistiques de l'économie américaine sont mitigées», selon Adam Sieminski, économiste en énergie à la Deutsche Bank, à ses bureaux de Washington.

À la Bourse de Toronto, très influencée par les matières premières et le pétrole, l'indice S&P/TSX a subi sa sixième séance baissière consécutive.

Cet autre recul de 2,2% à 11 405 points a aussi rabaissé l'indice sous sa moyenne de 200 jours pour la première fois depuis un an.

Quant au dollar canadien, il a cédé encore 2,6% pour passer sous le seuil des 94 cents US. La baisse cumulative depuis un mois atteint maintenant 4,5%.

En contrepartie, il faut souligner que le dollar américain, encore en forte demande hier, a poursuivi sa hausse par rapport à toutes les principales devises.

«Les marchés sont dominés par les efforts de délestage du risque. Ce n'est pas un contexte favorable pour le dollar canadien», a indiqué Eric Lascelles, principal stratège monétaire à la banque TD, à Toronto.

Avec Bloomberg et l'Agence France-Presse