L'appétit des investisseurs pour le risque a remonté en flèche en Bourse, même si l'économie «réelle» continue à se dégrader dans plusieurs régions du globe.

Selon une étude publiée hier par la Banque TD, l'aversion au risque atteint ces jours-ci son niveau le plus bas depuis l'éclatement de la crise financière il y a 10 mois. «Les marchés sont loin d'être aussi nerveux qu'ils l'ont été au premier et au second trimestre», a souligné Charmaine Buskas, économiste principale et auteure du rapport, en entrevue à La Presse Affaires.

 

La TD mesure l'aversion au risque avec un indice - le «radar» - qui grimpe au fur et à mesure que la panique s'empare des marchés.

L'indice, dont la moyenne historique se situe aux alentours de 100 points, est monté jusqu'à 300 l'automne dernier, au plus fort de la crise. Il vient tout juste de redescendre sous la barre des 200 points... à mi-chemin entre l'apocalypse et la normalité.

«C'est clair que l'appétit pour le risque a significativement augmenté depuis la crise du crédit», a résumé Mme Buskas.

Le recul de l'indice de la TD provient en bonne partie d'un rebond de la confiance envers les marchés émergents. Les Bourses chinoises, en particulier, suscitent beaucoup moins de craintes qu'il y a quelques mois. La prise de risque est toutefois réalisée avec beaucoup plus de «discernement» et de «prudence» qu'avant la crise, ajoute Charmaine Buskas. Une très bonne nouvelle selon elle.

Changement d'attitude des investisseurs

C'est à la mi-mars que le changement d'attitude des investisseurs s'est matérialisé sur les marchés, souligne Stephen Gauthier, gestionnaire de portefeuilles principal et stratège chez Demers Valeurs mobilières.

«Dans la deuxième et la troisième semaine de mars, on a constaté que le marché du crédit s'est ouvert de nouveau et que les programmes des banques centrales marchaient assez bien», a-t-il indiqué.

Les assises réelles de l'économie demeurent néanmoins fragiles et ne justifient pas un tel regain de l'enthousiasme - et de la prise de risque - en Bourse, dit M. Gauthier. «Quand on regarde par exemple les chiffres américains du chômage, c'est clair qu'aux États-Unis, il n'y a pas de reprise ailleurs que dans le marché boursier», poursuit-il.

D'après le gestionnaire, la reprise boursière observée depuis le début de l'année ne pourra être soutenue au cours des prochains trimestres. Il entrevoit de «bonnes corrections» en Bourse jusqu'au milieu de 2010, conséquences des maux de l'économie réelle.

«Sans reprise de la consommation, les profits des entreprises vont continuer à baisser, avance-t-il. Et ce que bien des gens ne réalisent pas, c'est que dans les 12 mois qui s'en viennent, nous allons voir un nombre record de faillites et de défaut de paiement sur les obligations aux États-Unis.»

Canadiens confiants

Malgré le piètre état de l'économie mondiale, les Canadiens envisagent les placements d'un oeil plus favorable qu'à l'automne dernier, selon un sondage publié hier par la Financière Manuvie.

L'enquête, réalisée auprès de 1003 Canadiens par la firme Research House (Environics) entre le 17 et le 22 juin, révèle que la confiance des investisseurs a grimpé envers neuf des 10 instruments de placement visés par l'étude.

«Nous constatons des signes laissant croire que les Canadiens sont de plus en plus optimistes à l'égard des placements après avoir favorisé des produits plus conservateurs au cours des six derniers mois, a déclaré Paul Rooney, président de Manuvie Canada. Ils affichent un intérêt croissant pour l'immobilier, les actions et les fonds de placement, même si les nouvelles économiques ont été déprimantes depuis la fin de l'année dernière.»

Manuvie mesure la confiance des investisseurs avec un indice maison, lancé en 1999. Il a atteint un sommet de 35 points au début des années 2000, est tombé à 11 points après les attentats de septembre 2001, puis a glissé à un creux historique de 5 points l'automne dernier.

L'indice a depuis effectué une solide remontée, pour s'établir à 20 points dans le dernier sondage.

L'enquête de Research House comporte une marge d'erreur de 3,1%, 19 fois sur 20.