Un grand frisson a traversé les parquets boursiers de toute la planète, hier. L'éclosion de la grippe porcine, au Mexique, a fait frémir les investisseurs qui commençaient à peine à reprendre confiance, depuis un mois et demi.

La Bourse de Mexico a perdu presque 5% à l'ouverture des marchés, puis elle s'est ressaisie pour clôturer en baisse de 3,3%. L'indice phare de la Bourse américaine, le S&P 500, a perdu 1,01%. En Espagne, où l'on a identifié un premier cas européen de grippe porcine, l'indice IBEX a perdu 1,25%.

 

Au Canada, le S&P/TSX composé a glissé de 1,6%, un réveil brutal après sept semaines consécutives de hausse qui avaient permis à la Bourse de reprendre 24% depuis son creux du 9 mars.

La baisse d'hier a été surtout causée par les sociétés pétrolières, comme l'action d'EnCana, par exemple, qui a cédé 2,5%. Les marchés craignent que la grippe porcine freine l'industrie du tourisme et du transport, réduisant, du coup, la demande pour le pétrole. D'ailleurs, le prix du baril a baissé de 2,4%, pour clôturer à 50,14$US.

Les titres des transporteurs aériens, des hôteliers et des croisiéristes ont aussi été amochés. Les investisseurs se sont débarrassés des actions de certains producteurs de viandes, même si les autorités ont assuré que la maladie ne se transmettait pas par la consommation de porc.

«Si les craintes s'accentuent, l'industrie du divertissement et des services non essentiels verront aussi une baisse de leurs activités», avance Sherry Cooper, économiste en chef aux Marchés des capitaux BMO. Elle cite les restaurants, les parcs thématiques et les cinémas.

Mais elle assure que, pour l'instant, il n'y a pas lieu de s'inquiéter outre mesure. «Il ne faut pas présumer que la grippe porcine deviendra une pandémie», dit-elle. Pas de panique!

L'expérience du SRAS

Il reste que les investisseurs gardent en mémoire les conséquences du syndrome respiratoire aigu sévère, il y a six ans.

La crise du SRAS s'est soldée par des dépenses et des pertes commerciales totalisant 60 milliards de dollars, à l'échelle mondiale, selon des estimations de l'Organisation mondiale de la santé. Et la crise a eu de sérieuses répercussions à la Bourse.

«La crainte d'une pandémie a eu un impact très tangible sur les marchés boursiers, lorsque le SRAS est apparu en 2003», rappelle Stéfane Marion, économiste et stratège en chef, à la Financière Banque Nationale.

Au cours de la première phase de l'épidémie du SRAS, l'indice S&P 500 a perdu 14,7%. Les premiers cas sont apparus dès novembre 2002. Mais c'est réellement en janvier 2003 que la Bourse a flanché, soit lorsque le nombre de personnes atteintes s'est multiplié.

À l'époque, on redoutait une pandémie mondiale, semblable à la grippe espagnole qui a décimé des dizaines de millions de personnes en 1918. Finalement, la contagion n'a jamais atteint les proportions que l'on redoutait, même si le SRAS a emporté quelque 800 personnes dans le monde.

À partir de mars 2003, les craintes ont diminué et la Bourse a récupéré toutes ses pertes, remontant de 24% au cours de la seconde phase de l'épisode du SRAS, soit de mars à juillet 2003.

«Même si l'Organisation mondiale de la santé n'a retiré son alerte qu'au cours de l'été 2003, la Bourse a commencé à se relever dès que le nombre de nouveaux cas s'est mis à diminuer», souligne M. Marion.

Qu'en sera-t-il, cette fois, avec la grippe porcine?

D'une part, les pays et les entreprises sont mieux préparés, justement grâce à l'expérience du SRAS. Mais d'autre part, l'économie mondiale est beaucoup plus fragile, constate Mme Cooper. «La dernière chose dont nous avons besoin, dit-elle, c'est une raison supplémentaire de restreindre nos dépenses, d'arrêter de voyager et d'imposer des restrictions au commerce international.»