Mine de rien, des petites créances jusqu'à la Cour suprême, la protection des consommateurs s'est renforcée depuis quelques années. Voici, dans cette série de trois articles, sept causes, emblématiques ou tout simplement éducatives, qui l'ont démontré.

Après quelques jugements marquants, soutenus par des centaines de petites victoires aux petites créances, et des droits mieux connus, la cause des consommateurs québécois se porte plutôt bien ces temps-ci. C'est du moins le constat que font la plupart des experts consultés par La Presse, au premier chef Sarah Maillé, porte-parole de l'Union des consommateurs.

« On remarque que les tribunaux sont de plus en plus sensibles à la cause des consommateurs », résume-t-elle. Les jugements que citent constamment les spécialistes en droit de la consommation, dont deux se sont conclus devant la Cour suprême depuis 2012, sont pourtant très peu connus du commun des mortels. Qui peut résumer de mémoire les demandes de Richard contre Time, Savoie contre Vidéotron ou Marcotte contre BMO ?

« Les cas qui ont le plus d'impact, ce sont souvent des dossiers très longs et très compliqués », dit Mme Maillé.

ENLEVER SON CHAPEAU DE JUGE

Ces trois causes ont notamment posé des jalons importants sur le degré très bas d'information qu'il faut attendre du consommateur moyen, sur l'impossibilité de modifier le coeur d'un contrat et sur l'application élargie de la Loi sur la protection du consommateur (voir écran suivant). Pour Me François Lebeau, avocat spécialisé en droit de la consommation, la cause Richard contre Time a montré les juges sous un autre jour.

« Le juge doit enlever son chapeau de juge et se mettre dans la peau d'un consommateur bien ordinaire, bien moyen, qui est crédule et qui a peu d'expérience. Cette notion est quelque chose qui a un impact formidable sur le droit de la consommation. »

- Me François Lebeau, avocat spécialisé en droit de la consommation

Moins spectaculaires, mais probablement encore plus efficaces, les améliorations apportées au traitement des petites créances, qui comprennent depuis 2015 des réclamations jusqu'à 15 000 $, ont permis à quelques milliers de consommateurs d'obtenir gain de cause. Une notion peu connue il y a une décennie, la garantie légale, est entrée peu à peu dans le vocabulaire courant.

BONNE MOYENNE

L'an dernier, l'Office de la protection du consommateur (OPC) a posé une nouvelle pierre en mettant en ligne, en collaboration avec la Société québécoise d'information juridique (SOQUIJ), des résumés de jugements montrant la portée de cette garantie légale, selon les catégories d'appareils. On y retrouve la durée de vie « raisonnable » à laquelle un consommateur est en droit de s'attendre au moment de l'achat, et donc le remboursement auquel il a droit si l'appareil fait défaut de façon prématurée.

Ces jugements, provenant de la division des petites créances de la Cour du Québec, ne forment pas une jurisprudence à proprement parler. « Mais il y a des situations où les juges prennent la peine de faire des jugements fort élaborés, auxquels leurs collègues juges vont se référer », précise Me Lebeau.

Bien qu'il ne dispose pas de statistiques précises sur le sujet, Charles Tanguay, porte-parole à l'OPC, assure que les consommateurs qui portent leur cause aux petites créances ont « un taux de réussite assez intéressant ».

Son organisme les aide dès le départ en leur fournissant une trousse explicative qui contient en outre un formulaire pour rédiger une mise en demeure.

« On fait un suivi par sondage et on constate qu'une fois sur deux, les litiges se règlent à l'étape de la mise en demeure », indique-t-il.

Même si les petites créances se distinguent par une procédure allégée, sans avocat, « ça ne dispense pas le consommateur de faire ses devoirs, d'établir la preuve, rappelle le porte-parole de l'OPC. Ça peut demander un certain investissement en temps, mais on voit que parfois, l'investissement en aura valu la peine ».