Retourner sur les bancs d'école pour investir en soi-même et espérer augmenter son niveau de vie est un beau projet. Mais comment survivre à une année d'études sans salaire ?

Le problème

À 55 ans, Lucie travaille depuis plusieurs années dans le monde communautaire. Mère seule d'un garçon de 22 ans qui fait des études universitaires, elle doit subvenir seule aux besoins de son enfant. Elle possède un condo et a quelques dettes, principalement sur sa marge de crédit. « J'aimerais augmenter mon revenu pour avoir plus d'argent pour mes loisirs et aussi pour ma retraite », souligne Lucie.

Pour ajouter des cordes à son arc et obtenir un poste mieux payé, elle compte donc retourner aux études. « J'ai commencé à chercher un emploi étant donné que mon contrat de travail se termine bientôt et j'ai réalisé qu'il me manquait certaines connaissances pour accéder aux postes auxquels j'aspirais », explique-t-elle. Grâce à sa formation, elle croit pouvoir obtenir un salaire de 50 000 $ par année.

Récemment, elle a terminé un programme court de deuxième cycle dans ses temps libres. « À un seul cours à la fois, ce n'était pas si pire, indique-t-elle. Par contre, j'aimerais en faire trois par session, et ce serait trop avec le travail en plus. »

Comme son contrat de travail se termine en juillet, la prochaine rentrée est un bon moment pour se lancer. Elle a donc fait une demande d'admission à l'INRS pour suivre un programme de DESS (diplôme d'études supérieures spécialisées) qui pourrait être transformé en maîtrise éventuellement. « J'ai vu qu'ils offraient des bourses pour les étudiants, ça pourrait m'aider », note-t-elle. Elle pensait boucler le reste de son budget grâce au programme gouvernemental de prêts et bourses.

Quant à sa retraite, elle est bien loin d'avoir envie de la prendre pour l'instant. « Je vois des gens qui travaillent jusqu'à 70 ou 75 ans, et je trouve ça vraiment inspirant, note-t-elle. J'aimerais bien travailler aussi longtemps. » Elle a donc l'intention de retarder ses demandes au Régime de rentes du Québec et à la Sécurité de la vieillesse du Canada.

La solution

Malheureusement, l'INRS offre des bourses uniquement aux étudiants inscrits à la maîtrise et au doctorat, et non à ceux inscrits au DESS. De plus, même si Lucie décidait de s'inscrire à la maîtrise, rien ne garantit qu'elle obtiendrait une aide financière. Cela dépendrait entre autres de son dossier scolaire. De plus, comme elle ne sera pas disponible pour occuper un emploi, elle n'aura pas droit à l'assurance-emploi. Néanmoins, il y a d'autres façons d'atteindre ses objectifs.

Une simulation réalisée sur le site de l'Aide financière aux études montre que Lucie pourrait obtenir environ 3300 $ en prêt et 9800 $ en bourse pour l'année 2018-2019. Pour y avoir droit, elle devra toutefois suivre au moins quatre cours (12 crédits) par session afin d'être considérée comme étudiante à temps plein. Sinon, elle n'aura droit à aucune bourse. Comme elle aura besoin d'environ 30 000 $ pour payer ses dépenses, y compris ses cours, ces sommes seront insuffisantes.

Elle pourrait toutefois combler le manque à gagner en retirant des sommes de son REER. « Le Régime d'encouragement à l'éducation permanente (REEP) permet de retirer 10 000 $ par année jusqu'à un maximum de 20 000 $ pour étudier à temps plein, explique David Truong, conseiller au Centre d'expertise de Banque Nationale Gestion privée 1859. Il faut ensuite rembourser les montants retirés du REER à raison d'un dixième du montant total par année jusqu'à ce que le solde soit à zéro. »

Lucie pourrait donc retirer 10 000 $ en 2018 et 9000 $ en 2019. Elle aurait ainsi les sommes nécessaires pour étudier l'esprit en paix. « Sa marge de crédit pourra lui servir de coussin de sécurité », note M. Truong.

L'impact sur la retraite

Si Lucie n'allait pas aux études et conservait le même salaire, ses économies actuelles lui permettraient de maintenir son train de vie jusqu'à 83 ans environ. « Ce qu'elle va recevoir des régimes publics et de son petit régime de retraite de son employeur va pratiquement équivaloir à ses dépenses actuelles, souligne M. Truong. Sauf que ce dernier n'est probablement pas indexé à l'inflation. D'un autre côté, son fils va probablement voler de ses propres ailes et le condo va être fini de payer. Donc même sans augmentation de salaire, je ne serais pas trop craintif. »

Par contre, si elle décroche vraiment un poste dont le salaire est de 50 000 $ par année à la suite de ses études, sa situation sera plus avantageuse. « Elle va rentrer assez vite dans son argent, c'est un très bon investissement, note M. Truong. Elle aura un surplus de plus de 14 000 $ par année jusqu'à ses 70 ans. » Elle devra rembourser son prêt étudiant et son REEP, bien entendu, mais pas la bourse qu'elle aura reçue.

« Elle va pouvoir mettre plus d'argent de côté pour sa retraite tout en augmentant un peu son niveau de vie d'ici là », indique M. Truong.