Le consommateur canadien ne doit pas être pris pour battu quand on le considère dans son ensemble. Il paraît même le plus résilient des moteurs de l'activité économique, les autres toussotant plutôt depuis le début de l'année.

En fait foi la valeur des ventes des détaillants, qui a bondi de 1% d'avril à mai, et de 2,7% en un an, en moyenne d'un océan à l'autre.

La faiblesse du huard écorne toutefois le pouvoir d'achat, au point où, exprimées en volumes, ces mêmes ventes ont augmenté de 0,4% seulement, précisait Statistique Canada hier.

Tous les magasins ne profitent pas également de ce goût retrouvé pour le magasinage, après les reculs observés en avril, tant en valeur qu'en volumes.

Les commerces des provinces victimes des déboires de l'industrie pétrolière écopent davantage. Depuis novembre, mois où les cours du brut se sont vraiment effondrés, les ventes des commerçants de Terre-Neuve-et-Labrador, du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta essuient tous des reculs de leur chiffre d'affaires.

À l'opposé, celles de cinq autres provinces sont en hausse.

En reste une qui se distingue à double titre: elle ne produit pas de pétrole (si peu que point, en fait!), et les ventes de ses détaillants reculent quand même depuis novembre, depuis un an même.

C'est le Québec. Malgré une augmentation marginale de 0,1% en mai, la valeur des ventes de ses détaillants recule de 0,2% depuis un an. Seuls les commerçants de l'Alberta et la Saskatchewan ont davantage de déveine.

Dans ces derniers cas, on peut comprendre que l'heure n'est pas aux emplettes. Le nombre de prestataires de l'assurance-emploi est en hausse de 61,3% depuis un an dans la province des sheiks aux yeux bleus et de 18,1% dans celle des cieux infinis.

Au Québec, le nombre a plutôt diminué de 2,2%, selon les données publiées aussi hier par l'agence fédérale.

Cela reste néanmoins en deçà de la moyenne canadienne de 3% et reflète bien l'atonie de l'économie québécoise.

On peut la constater autrement: le Québec comptait en mai 151 230 prestataires, soit environ 7000 de plus que l'Ontario dont la population active compte pourtant 3 millions de personnes de plus.

On ne s'étonnera donc pas que les magasins ontariens brassent de meilleures affaires: bond de 1,2% de leurs ventes en mai et de 5,0% depuis un an. Seuls ceux de Colombie-Britannique font mieux depuis un an.

Il y a autre chose qui ralentit sans doute la volonté des Québécois de courir les magasins, ne serait-ce que pour y chasser les aubaines. C'est l'augmentation des prix à la pompe, qui est plus élevée qu'ailleurs au pays.

Non seulement l'automobiliste québécois profite-t-il moins que l'américain de la baisse du prix du pétrole qui est fixé en dollars américains, mais encore faire le plein coûte plus cher qu'ailleurs au Canada.

Les taxes multiples y sont pour beaucoup, bien sûr. En plus, les prix de l'essence au Québec sont fixés à partir du cours du brut de mer du Nord, le Brent. Dans l'Ouest de même que partiellement en Ontario, les prix sont établis selon le cours du West Texas Intermediate (WTI).

Or, le cours du Brent dépasse celui du WTI, malgré sa qualité inférieure, à cause des immenses réserves de ce dernier, stockées à Cushing, en Oklahoma.

Détail frappant du rapport sur les ventes des détaillants en mai, les ventes des stations-service ont progressé de 1,9% durant le mois, à l'échelle du pays.

Il s'agissait de la deuxième augmentation seulement en un an. Comme les prix à la pompe ont bondi de 6,0% en juin après une hausse de 5,5% en mai, selon les données sur l'Indice des prix à la consommation, il est probable que les Québécois aient eu moins d'argent dans leurs poches pour leurs autres emplettes.

D'autant plus que les données sur l'emploi ont été bien vilaines au cours du mois...