Chaque dimanche, un financier répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Marc L'Écuyer, chez Cote 100 à Saint-Bruno-de-Montarville.

LE SECTEUR DE L'ÉNERGIE DEVIENT MOINS RISQUÉRICHARD DUFOURLA PRESSEQuel a été l'événement le plus significatif des derniers jours en Bourse ?

La nouvelle de la semaine à mon avis est la faiblesse de la production industrielle aux États-Unis qui ne semble pas se limiter au secteur de l'énergie. Avec le repli enregistré en mars de 0,6 %, il s'agit de la première baisse trimestrielle depuis 2009, en recul de 1 %. Cette nouvelle confirme la tendance d'une croissance économique plus faible au premier trimestre et par le fait même un report de la première hausse de taux de la part de la Réserve fédérale américaine (Fed) au mois de septembre au plus tôt.

Quel indicateur suivez-vous le plus attentivement ?

Nous sommes inquiets de la forte hausse de l'endettement des sociétés nord-américaines. La faiblesse des taux d'intérêt et la pression des investisseurs incitent les dirigeants à augmenter le niveau d'endettement, ce qui pourrait amener de mauvaises surprises dans l'avenir, surtout si on assiste à une normalisation des taux d'intérêt au cours des prochaines années.

Que feriez-vous avec plusieurs milliers de dollars à investir ?

Après cinq années de croissance exceptionnelle, je crois que les marchés sont bien évalués et qu'il faut être sélectif dans le choix de ses actions. Il faut privilégier les sociétés qui sont des leaders dans leur secteur d'activités, qui sont peu endettées et dont les dirigeants ont fait leurs preuves.

Des sociétés comme Canadian Western Bank, Stantec ou Canadian Utilities, qui ont été affectées par le repli des cours de l'énergie sont de bons choix en ce moment pour le long terme.

En outre, je pense qu'il y a moins de risque que d'investir directement dans le secteur de l'énergie, surtout depuis que l'Arabie saoudite ne joue plus son rôle de stabiliser les prix, ce qui a pour conséquence d'augmenter le risque à la baisse pour les producteurs nord-américains.

Quel placement évitez-vous à tout prix ?

À l'inverse, il faut éviter les sociétés qui ont beaucoup de dettes et dont les modèles d'affaires ont beaucoup de levier. Ces sociétés ont généralement réalisé de bons rendements dans les dernières années, mais je crois que le rendement anticipé pour ces sociétés ne justifie pas le niveau de risque accru.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus ?

Les marchés sous-estiment les effets négatifs d'avoir conservé les taux d'intérêt à 0 % pendant plus de cinq ans. Sur une si longue période, il y a fort à parier que plusieurs investisseurs ont été forcés de prendre des risques pour réaliser un rendement décent. Les nouvelles émissions d'obligations de pacotille (junk bonds) ont atteint de nouveaux sommets depuis deux ans. En outre, ces obligations sont souvent émises avec des clauses allégées qui diminuent le niveau de protection des détenteurs. Il est difficile de prévoir sous quelles formes se manifesteront les excès, mais on peut en avoir un avant-goût avec les milliards investis dans les sociétés oeuvrant dans le pétrole de schiste.

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QUI EST-IL ?

Marc L'Écuyer est gestionnaire de portefeuille au sein de la firme Cote 100 à Saint-Bruno-de-Montarville. Il s'occupe de la gestion des portefeuilles et de l'allocation des actifs en plus de siéger au comité de placement de Cote 100. Avant de se joindre à Cote 100, il y a une douzaine d'années, il était analyste à la Financière Banque Nationale.