Mieux vaut guérir que prévenir... mais on est rarement trop prudent. La mort est une certitude qui prend trop souvent par surprise. Ses conséquences doivent être planifiées.

Première étape : faire le point sur sa santé. Financière, bien sûr.

Regardons les choses en face.

« Est-ce que notre décès va entraîner des conséquences négatives autour de nous ? », pose la notaire Guylaine Lafleur, du cabinet de planification financière Bachand Lafleur, groupe-conseil. « Est-ce que des personnes sont dépendantes de nous financièrement ? Une planification successorale, c'est pour s'assurer de bien protéger les personnes qui nous sont chères. »

La démarche s'apparente à celle d'une planification financière : elle commence par un bilan et un budget. Quelques étapes, autant d'éléments de réflexion.

- Quel est votre bilan patrimonial ?

- Où en êtes-vous ? Énumérez votre actif : immeubles, rentes de retraite, assurances vie, épargnes, investissements, régimes de retraite...

Et votre passif : emprunt hypothécaire, marge et cartes de crédits, autres créances et obligations...

On réunira également les documents pertinents : testaments actuels, contrat de mariage ou jugement de divorce, documents hypothécaires...

- Quel est votre coût de vie actuel ?

Il s'agit d'établir un budget au moins sommaire, pour savoir à combien s'élèvent les dépenses actuelles du ménage.

- Quelle serait l'influence d'un décès sur ce coût de vie ? 

« On doit être capable d'évaluer, à notre décès, quelles sont les dépenses qui vont être maintenues pour les personnes qui nous survivent », indique Guylaine Lafleur. Peut-être une des deux voitures deviendra-t-elle superflue, par exemple. Mais certaines dépenses peuvent s'accroître : faudra-t-il inclure de nouveaux frais de garde ?

- Quel appoint faut-il procurer ? 

Quelles obligations doivent être remplies ? L'emprunt hypothécaire est-il déjà soutenu par une assurance prêt ? Considérant le nouveau budget et les revenus du conjoint survivant, quel appoint faudrait-il lui procurer ? « On doit lui permettre aussi de faire de l'épargne, pour éventuellement prendre sa retraite », souligne Me Lafleur.

- Pendant combien de temps ? 

Ce soutien se maintiendra peut-être jusqu'à la fin des études du plus jeune enfant ? Ou jusqu'à ce que la maison soit payée ? Jusqu'à la retraite ? « C'est de cette façon qu'on va travailler pour établir quel est le besoin en assurance de la personne. »

- Quels sont les objectifs successoraux ?

Ici se posent les questions fondamentales. Qui devez-vous protéger ? À qui voulez-vous céder vos biens ? Dans quelles proportions ? Comment voulez-vous soutenir ou avantager vos enfants mineurs ? Souhaitez-vous réduire l'impact fiscal à votre décès ?

- On mélange le tout...

Ces paramètres et objectifs seront pris en compte dans une planification articulée autour de deux axes : une couverture d'assurance vie et une planification testamentaire.

« Le testament est la dernière chose qu'on rédige, mais on en discute en cours de route à plusieurs niveaux », observe Guylaine Lafleur.

On construit ainsi une structure qui répond à l'ensemble des besoins du testateur et de ses héritiers. « Malheureusement, il y a des gens qui ne se rendent jamais à cette étape. Ils ont une belle structure mais ils n'ont jamais fait leur testament. »

Ils sont au point mort.

Question : Quelle est la différence entre la planification successorale et la planification testamentaire ?

Réponse : la seconde succède à la première. Ou elle la conclut, pour être plus précis. « La planification successorale est plus large, décrit Me Guylaine Lafleur. Elle inclut l'analyse des impôts au décès, le coût de vie des survivants, l'analyse des besoins en assurance vie. » La planification testamentaire complète ce processus avec la rédaction d'un testament.

Un problème d'arithmétique

La cliente de la notaire Guylaine Lafleur avait fait ses devoirs. Mal.

Dans son testament, elle voulait d'abord faire de petits legs à plusieurs personnes et organismes.

Sans conjoint, elle désirait laisser le reste de son patrimoine à ses enfants, qui avaient alors 15 et 18 ans.

Ennui : il n'y aurait plus de reste. C'est ce qu'a révélé la projection de Me Lafleur.

« Elle voulait aider tout le monde qui avait été gentil avec elle et elle pensait qu'elle était riche parce qu'elle avait de l'assurance vie », raconte la notaire.

Mais la dame, dont la générosité excédait les connaissances fiscales, n'avait pas songé à l'impôt prélevé sur ses REER. Une partie de sa résidence était locative, donc soumise à l'impôt sur le gain en capital. « Après tous les legs et les impôts, il n'y avait plus assez d'argent. Les deux principales personnes qu'elle voulait protéger ne recevaient rien. »

Voilà à quoi sert une planification successorale.

*

Un parent décède au sein d'une jeune famille. De combien le coût de vie diminue-t-il ?

A. 5 %

B. 20 %

C. 40 %

D. 50 %

Réponse : B. C'est un ordre de grandeur, bien sûr. Mais il fait réfléchir : si, au sein d'une jeune famille avec enfants, un des parents décède, le coût de vie de la famille se réduira d'environ 20 %.

*

TROIS ÂGES

La planification successorale se préoccupe pour nous de cette désagréable éventualité : que se passerait-il si je décédais demain ?

Les conséquences varient avec l'âge, d'où la nécessité d'en faire la révision aux principales étapes de la vie.

Par exemple...

35 ans

Les enfants et les dettes hypothécaires font lourdement sentir leur poids sur le budget. Il faut songer aux éventuelles études postsecondaires. « À 35 ans, c'est souvent l'âge où les besoins d'assurance vie sont les plus élevés », constate Me Guylaine Lafleur.

Si c'est le dernier parent survivant qui décède, il faudra prévoir un tuteur pour les enfants mineurs, peut-être une fiducie testamentaire pour la gestion et la distribution progressive du patrimoine.

55 ans

Les études des enfants sont peut-être terminées, la maison est souvent payée. Les obligations essentielles sont nettement moins préoccupantes. « Ce qui inquiète, ce sont les impôts qu'il faudrait payer au décès », souligne Me Lafleur. Encore une fois, l'assurance vie peut venir à la rescousse.

75 ans

« En principe, si on a les moyens financièrement de prendre notre retraite, on ne devrait pas avoir besoin d'assurances », énonce Guylaine Lafleur.

Mais d'autres questions se posent. Prévoyez-vous faire un don de bienfaisance par testament ? Avez-vous un testament biologique pour les soins terminaux ? Comment seront couverts les frais funéraires ?

À qui s'adresser ?

La planification successorale devrait être menée par un planificateur financier compétent en la matière. Puisqu'elle se conclut par la rédaction d'un testament, elle devra tôt ou tard inclure un juriste, le plus souvent notaire. Mieux vaut très tôt que tard, d'ailleurs. Un conseiller en sécurité financière prendra en charge la finalisation des besoins d'assurance vie.