C'est le titre automobile le plus électrisant des deux dernières décennies : le constructeur américain de voitures sportives électriques Tesla Motors est en train de mettre le feu à la Bourse américaine.

Les actions de Tesla ont septuplé de valeur depuis que l'entreprise californienne a atteint la rentabilité, le printemps dernier, du jamais vu dans l'industrie automobile au cours des 20 dernières années. Mieux, elles valent 15 fois plus qu'à leur entrée à la Bourse du NASDAQ, en 2010, ce qui en fait l'introduction boursière la plus spectaculaire depuis 2006.

Tesla, qui a touché un sommet de 265 $ US à la fin du mois de février, a déjà défoncé le prix cible moyen sur 12 mois de 231 $ US établi par la communauté financière. On remarque des écarts énormes entre la plus basse évaluation, de 68 $ pièce selon Daiwa Securities, et celle, optimiste, de Dougherty & Company, qui lui donne une valeur potentielle de 325 $ US.

Le choeur des analystes est partagé entre détenir (sept recommandations), acheter (six suggestions) et vendre (trois propositions). C'est notamment le premier choix de la firme new-yorkaise Morgan Stanley parmi tous les constructeurs automobiles, mais le dernier choix du japonais Daiwa.

Au cours actuel, l'entreprise d'Elon Musk, qui a vendu quelque 23 000 voitures l'an dernier à plus de 70 000 $ US pièce, pèse maintenant plus de 31 milliards US en Bourse. C'est plus de la moitié de la valeur boursière de General Motors, qui a tout de même vendu près de 11 millions de voitures (480 fois plus) l'an dernier.

Des batteries moins chères

L'engouement des spéculateurs pour Tesla est attribué à de possibles développements pour ses batteries. Selon l'analyste Adam Jones, de Morgan Stanley, cela pourrait l'amener à « mettre le trouble » non seulement dans l'industrie automobile, mais dans les secteurs adjacents. Juste retour puisque l'entreprise a elle-même été secouée en Bourse l'automne dernier quand trois incendies se sont produits sur des batteries de ses berlines Model S.

Elon Musk doit bientôt dévoiler un projet de giga-factory avec Panasonic. L'usine de batteries, qui serait la plus grande du monde, fabriquerait de petites batteries légères pour la troisième génération de voitures Tesla, mais aussi pour les ménages qui pourraient emmagasiner de l'énergie en se raccordant à des réseaux électriques intelligents. L'ambitieux projet fait dire à certains analystes que la réelle valeur de Tesla ne réside pas tant dans l'automobile que dans la production de batteries.

Les investisseurs ont aussi été réconfortés par l'indice de satisfaction presque parfait compilé par l'influent magazine américain Consumer Reports qui en a fait le véhicule par excellence de l'année 2014, ainsi que par les cinq étoiles obtenues par la Tesla S aux tests de sécurité routière américains. La firme Barclays a récemment rappelé que la sécurité était le dernier point sensible de l'entreprise centrée sur le haut de gamme.

L'iCar

Depuis quelques mois, de persistantes rumeurs font par ailleurs état d'un rapprochement entre Tesla et Apple, toutes deux de Californie. La possibilité d'un rachat a été écartée par Apple qui aurait eu de meilleures occasions de concrétiser le rêve de l'iCar de Steve Jobs. Le géant de Cupertino pourrait par contre apporter son expertise concernant l'interface graphique de l'écran qui occupe une grande partie du tableau de bord des Tesla ou peut-être pour la gestion énergétique des batteries.

La berline sportive Model S est l'automobile électrique la plus populaire et occupe le troisième rang des voitures de luxe les plus vendues (après Mercedes et BMW), aux États-Unis. Le constructeur vise à doubler son rythme de production annuelle à 40 000 unités à la fin de 2014, quand la Tesla attaquera les routes d'Europe et d'Asie. L'analyste James Albertine, de la firme Stifel, doute cependant que l'entreprise de niche puisse devenir un jour un constructeur généraliste.

Tesla, dont le premier roadster avait fait la joie de l'acteur Leonardo DiCaprio, finalise un Model X, un multisegment qui sera basé sur la même plateforme et qui sera donc offert à peu près aux mêmes prix. Un modèle un plus plus petit, qui devrait coûter moitié moins, est dans les carnets d'ici 2020.

Dix ans après sa création, l'entreprise californienne ne dégage cependant toujours pas de bénéfices. Le constructeur a encore perdu 74 millions sur ses recettes de 2 milliards, l'an dernier. Mais pour Elon Musk, son mythique fondateur qui y a investi toutes ses économies, la récompense est au tournant de la rue. Sa participation de 23 % au capital lui vaut aujourd'hui une fortune estimée à 12 milliards US.