On ne cesse de lire dans les médias financiers l'avis d'experts qui recommandent aux épargnants d'investir principalement dans les Fonds négociés en bourse (généralement des fonds indiciels). Comme si le fait de sélectionner les meilleures entreprises n'était plus la façon la plus efficace de faire fructifier ses économies. Ces fonds négociés en bourses (FNB) sont-ils vraiment la panacée ?

Investir dans des indices boursiers n'est pas nécessairement une mauvaise façon d'investir, car cela permet d'atteindre un bon niveau de diversification, tout en profitant de frais qui sont généralement assez bas.

Sauf qu'en procédant ainsi, vous achetez le meilleur et le pire, explique Philippe Leblanc, président de Cote 100, une entreprise québécoise spécialisée dans la gestion de portefeuille. Vous réaliserez de bons rendements lorsque les indices seront portés par une solide croissance économique, mais ces rendements pourraient diminuer lors des replis de marché causés par une récession, ou encore pire, par une crise financière ou géopolitique.

Pour éviter le pire, la meilleure façon demeure encore de se bâtir un bon portefeuille d'actions, selon Philippe Leblanc. À condition d'adopter la bonne approche, évidemment.

Les gestionnaires consultés s'entendent sur un point. Il faut sélectionner des titres avec l'intention de les conserver longtemps. Très longtemps même. « L'idéal est d'acheter des titres, dont on pense qu'on les conservera indéfiniment », dit Philippe Leblanc.

Par exemple, Alimentation Couche-Tard. « Nous avons acheté le titre il y a 10 ans parce qu'il respectait nos critères de sélection », dit-il. Ces critères sont un bon bilan financier qui comporte peu ou pas de dette, un historique de rentabilité et de performances financières de plusieurs années, et une évaluation attrayante. « Aujourd'hui, puisque rien n'a changé en ce qui concerne Couche-Tard qui nous a procuré un excellent rendement, on le garde », dit le gestionnaire.

Investir à très long terme est la clé du succès, croit également François Rochon, président de Giverny Capital, firme de gestion de portefeuille qu'il fonda en 1998. « Lorsque nous achetons un titre, notre horizon de temps est généralement de 5 à 10 ans », dit-il.

Les principaux critères qui le guident dans la sélection des titres sont les suivants : d'abord, investir uniquement dans les sociétés que l'on comprend bien. Puis, choisir celles qui possèdent ce quelque chose d'intrinsèque qui leur assure un avantage concurrentiel durable. De plus, il favorise les entreprises dont la direction est reconnue comme étant de grande qualité. Enfin, le prix doit être attrayant. « Nous tentons d'acheter à un prix inférieur à la valeur intrinsèque que nous accordons à la firme », dit le gestionnaire.

Les erreurs à éviter

Si plusieurs personnes ont peu de succès à se bâtir un bon portefeuille de titres, c'est souvent parce que leur approche n'est pas la bonne. Les gens, trop souvent, spéculent au lieu d'investir. « On cherche le profit rapide, et on se laisse attirer par les idées excitantes », dit François Rochon. « Ces gens font une analyse très superficielle, et investissent à la Bourse comme si c'était un casino », ajoute-t-il.

Une autre erreur fréquente est de suivre les modes, explique Philippe Leblanc. « On regarde dans le rétroviseur au lieu de regarder en avant », dit-il. Souvent, cela amène les investisseurs à concentrer leurs investissements dans un ou deux secteurs, et leurs portefeuilles manquent alors dangereusement de diversification.

Le jeu en vaut-il la chandelle ?

L'idée de bâtir un bon portefeuille repose sur le fait que l'épargnant désire obtenir un meilleur rendement que ce que les indices boursiers peuvent lui offrir. Mais est-ce réaliste ? Combien de fois nous ne sommes pas fait dire que la majorité des gestionnaires ne réussit pas à battre les indices ?

Si effectivement plusieurs gestionnaires ne battent pas leurs indices de référence, c'est surtout à cause des frais de gestion, signale François Rochon. Lui-même concède qu'en moyenne une année sur trois, le rendement qu'il réalise est inférieur à l'indice. Mais sur un horizon à long terme, le rendement de son portefeuille excède avantageusement l'indice. Toutefois, il faut être prêt à y mettre le temps, beaucoup de temps, et être patient, selon lui.

Pour Philippe Leblanc, c'est le rendement absolu qui compte. C'est-à-dire ce que vous rapporte le portefeuille, peu importe ce que le marché en général aura fait. Lorsque les marchés sont fébriles, la gestion prudente est moins performante. Mais lorsque la turbulence frappe les marchés, c'est là que l'investisseur à long terme qui aura su sélectionner les bonnes entreprises en tirera un avantage marqué.

PETIT LEXIQUE

Fonds négocié en bourse : fonds d'actions dont les parts peuvent être transigées en Bourse, comme des actions. Ce sont le plus souvent des fonds indiciels.

Fonds indiciel : fonds dont la composition vise à refléter la composition d'un indice. Le rendement du fonds sera généralement égal à celui de l'indice.

Fonds géré : fonds pour lequel un gestionnaire choisit les titres qui le composent. Le gestionnaire échange régulièrement les titres afin de profiter des occasions qu'offrent les marchés.