Chaque samedi, un financier répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Frédéric Imbeault, vice-président, marchés asiatiques, à la firme d'investissement Hexavest, à Montréal.

À votre avis, quel est l'événement le plus significatif des derniers jours à la Bourse?

Le plus marquant est le retour du scepticisme des investisseurs à la suite de la crise bancaire à Chypre et de la faiblesse des récentes données économiques aux États-Unis. En effet, depuis quelques mois, les investisseurs ont souvent minimisé les risques économiques et financiers tout en accentuant l'impact des bonnes nouvelles. Cela a permis à certains indices boursiers de rejoindre des sommets seulement atteints avant la crise financière de 2008, et ce, malgré une crise européenne qui perdure et la mollesse de l'économie mondiale.

Quel indicateur suivez-vous le plus attentivement en ce moment?

Les données économiques américaines. Si la reprise américaine est bien en selle, elle permettra d'atténuer la crise des dettes souveraines en Europe. Sinon, les investisseurs seront grandement déçus et les indices boursiers mondiaux en souffriront.

Que feriez-vous avec une somme de plusieurs milliers de dollars à investir?

Dopée par les liquidités des banques centrales, la quasi-totalité des catégories d'actifs affiche depuis l'automne 2011 des rendements élevés dans un mouvement haussier généralisé, ce qui est très rare et souvent un signe d'une correction des cours à venir. Par conséquent, j'opterais pour une approche assez prudente, comprenant des obligations à court terme et de l'or, tout en attendant un environnement boursier moins euphorique. À ce moment-là, j'achèterais des titres boursiers plus défensifs qui offrent de bons rendements en dividende.

Quel placement évitez-vous à tout prix?

L'immobilier canadien et les titres de ressources qui ont été très en vogue dans la dernière décennie et, par conséquent, très à risque d'une correction continue et d'un délestage massif des investisseurs. Les prix payés pour ces types d'actifs sont peu attrayants, selon plusieurs indicateurs. Aussi, le sentiment des investisseurs est encore trop optimiste malgré les changements de tendances de fond, notamment la réduction de matières premières des Chinois et la détérioration attendue de l'économie canadienne.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus actuellement?

Les investisseurs négligent trop à mon avis l'ampleur de la crise européenne qui perdure et le risque de révision à la baisse des bénéfices des entreprises qui sont anticipés par les analystes. Par ailleurs, les mauvais chiffres du marché de l'emploi qui ont été divulgués aux États-Unis et au Canada hier prouvent un peu notre stratégie actuelle de prudence face aux risques économiques sur les marchés.

Frédéric Imbeault est vice-président, marchés asiatiques, à la firme d'investissement Hexavest, à Montréal. Cette firme spécialisée dans les actions internationales gère 15 milliards en actifs pour une clientèle d'investisseurs institutionnels.