Pourquoi contracte-t-on de l'assurance? Pour limiter les conséquences financières d'un malheur. Depuis quelques années, les produits d'assurances se sont tellement multipliés qu'on oublie leur véritable raison d'être.

On a tous besoin d'assurer son logement et sa voiture, en cas de dommages ou de vol. Mais ensuite, quelles sont les priorités? Tout dépend de votre situation personnelle. En évaluant vos besoins, vérifiez d'abord les protections que vous avez déjà grâce à une assurance collective au travail, à votre carte de crédit ou à votre association professionnelle.

Puis, essayez d'imaginer les pires scénarios catastrophes, et leurs conséquences financières...

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Jonathan, 30 ans. Célibataire sans enfant, travailleur autonome

L'INCONTOURNABLE

Assurance invalidité

Jonathan est cloué à un fauteuil roulant après un accident de ski. Il est incapable de travailler. C'est un désastre pour sa situation financière. «Le plus grand risque pour un travailleur de 30 ans, c'est de perdre son revenu. S'il gagne 50 000$ par année, et qu'il ne peut pas travailler pendant 20 ans parce qu'il est invalide, ça représente un manque à gagner de 1 million de dollars, dit Gaétan Veillette, planificateur financier pour le Groupe Investors. Si vous assurez votre maison qui vaut 250 000$, ça serait la moindre des choses d'assurer vos revenus, qui valent 1 million.»

LES SUPERFLUES

Assurance vie

Jonathan meurt heurté par une voiture. Sa famille et ses amis sont dévastés. Mais comme personne ne dépendait financièrement de lui, il ne laisse personne dans la misère. Bien sûr, ses plus proches parents devront payer ses funérailles, ce qui pourrait tout de même justifier une petite somme d'assurance vie.

Assurance solde de crédit

Après la mort de Jonathan, ses parents découvrent qu'il a un solde impayé de 10 000$ sur sa carte de crédit. Le jeune homme aurait-il dû prendre l'assurance proposée par l'émetteur de sa carte, qui rembourse la totalité du solde en cas de décès ou maladie grave, et effectue les remboursements mensuels en cas de perte d'emploi ou d'invalidité?

Non, répond Denis Preston, planificateur financier, formateur et consultant en gestion des risques. «Dans les cas où les dettes sont plus importantes que les actifs, la famille n'a qu'à refuser la succession, explique-t-il. Si on prend une assurance solde de crédit, c'est la banque qu'on protège: on s'assure qu'elle sera payée si on meurt.»

Caroline Arel, directrice générale adjointe d'Option consommateurs, a déjà rencontré une femme qui avait un solde de 15 000$ sur sa carte de crédit et qui payait 108$ par mois en frais d'assurance, une somme qui aurait plutôt dû servir au remboursement de sa dette.

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Maude, 39 ans, et Antoine, 37 ans: Conjoints de fait, parents de deux enfants de 1 et 6 ans, salariés

LES INCONTOURNABLES

Assurance vie

Maude est emportée par une maladie fulgurante. Antoine se remet péniblement de sa mort, tout en s'occupant de leurs deux enfants. Sa conjointe rapportait à la maison un revenu de 50 000$. L'assurance vie qu'il touche à la suite de sa mort lui permet de maintenir le niveau de vie de la famille. «Généralement, on devrait s'assurer pour un montant qui permet de couvrir les besoins financiers des enfants jusqu'à ce qu'ils soient indépendants», souligne Denis Preston.

Assurance invalidité

Antoine s'enfonce dans une profonde dépression. Il lui est impossible de travailler. Grâce à l'assurance collective dont il bénéficie au travail, il touche l'équivalent de 60% de son salaire en prestations d'invalidité. La famille doit réduire ses dépenses, mais elle n'est tout de même pas acculée à la faillite.

LES SUPERFLUES

Assurance vie pour les enfants

Lili, 1 an, meurt subitement pendant son sommeil. Ses parents sont inconsolables. Cette mort a-t-elle des conséquences sur les revenus de Maude et Antoine? Non. «Au contraire, un enfant est une dépense pour la famille, fait remarquer Denis Preston. Ça semble macabre de le dire ainsi, mais la mort d'un enfant a pour effet de réduire les dépenses.»

Les compagnies d'assurances, qui sollicitent souvent les parents dès la naissance de leur poupon, soutiennent que l'assurance sur la vie de l'enfant permet aux parents de payer les frais funéraires, de prendre congé pour faire leur deuil et de protéger «l'assurabilité» du jeune pour l'avenir. Mais les experts notent que ça ne devrait pas être une priorité. Pour les familles, après l'assurance vie et invalidité, le plus important est de rembourser ses dettes et d'épargner. «Quand on a des enfants, il est beaucoup plus utile d'investir dans un régime enregistré d'épargne-études (REEE)», souligne Monette Milewski, présidente du Groupe M. Bacal, courtier en assurance de personnes.

Assurance hypothèque

Lorsqu'ils ont contracté leur hypothèque, Maude et Antoine n'ont pas souscrit à l'assurance offerte par leur banque, pour couvrir le solde de leur prêt en cas de décès, et payer leurs mensualités en cas d'invalidité. Ils ont plutôt vérifié que les assurances qu'ils possèdent déjà couvrent l'ensemble de leurs besoins financiers, comme le recommande Monette Milewski.

«Les primes à payer sont fondées sur le montant initial de la dette. À mesure que vous remboursez la dette, les primes restent généralement inchangées, même si, au fil du temps, le montant du prêt ou de l'hypothèque à rembourser diminue», fait également remarquer, sur son site web, l'Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC).

Assurance mort accidentelle

Si Maude était morte dans un accident et qu'elle avait été couverte par ce type d'assurance, l'indemnité d'assurance vie aurait été doublée. «Mais les risques de mourir dans un accident sont très faibles, soutient Monette Milewski. Elle devrait se trouver très loin dans la liste des priorités.» Seulement 4,3% des décès au Canada sont causés par des accidents.

«La vraie question à se poser est: est-ce que mes proches auront une diminution de leur niveau de vie si je décède, dit Denis Preston. Si oui, on évalue quel montant d'assurance est requis pour maintenir le niveau de vie. Ce montant ne sera pas différent si on meurt accidentellement.»

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Angélique, 67 ans, et Raoul, 69 ans

Mariés, parents de trois enfants adultes, retraités

L'INCONTOURNABLE

Aucune!

Depuis qu'ils sont à la retraite, Angélique et Raoul ne touchent plus de salaire. Ils reçoivent des prestations gouvernementales et de leurs régimes de retraite, et comptent sur leurs REER. «Lorsque l'un des deux meurt, ils ne perdent pas de capacité à gagner un revenu, explique Denis Preston. Leurs prestations de retraite et leurs REER sont transférés au conjoint.»

Donc, il n'est pas nécessaire d'avoir de l'assurance vie ou invalidité à la retraite, selon l'expert. Pour ceux qui ont des revenus suffisants, certaines assurances peuvent tout de même être envisagées.

LA FACULTATIVE

Assurance soins de longue durée

Raoul souffre de la maladie de Parkinson. Son état s'aggrave au point où Angélique ne peut plus lui donner les soins nécessaires. Il a besoin de soins à domicile, ou de déménager dans un centre de soins de longue durée. S'il possède une assurance soins de longue durée, il aura droit à des prestations dès qu'il n'est plus autonome.

Cependant, les primes à payer sont assez élevées, surtout pour les personnes âgées. Une étude du Conseil sur le vieillissement d'Ottawa conclut que seules les personnes disposant de revenus et d'avoirs «considérables» devraient envisager une telle assurance.

LA SUPERFLUE

Assurance maladie grave

Angélique apprend qu'elle souffre d'un cancer. Si elle possède une assurance maladie grave, elle recevra une somme forfaitaire, qu'elle peut utiliser à sa guise (payer des soins privés, laisser un héritage à ses proches, etc.). Une vingtaine de maladies parmi les plus courantes et les plus graves sont couvertes par cette assurance.

Mais les experts sont divisés à son sujet. «Ce n'est pas la cause qu'il faut assurer, mais les conséquences financières», dit Denis Preston. Si vous êtes atteint d'une maladie qui ne fait pas partie de la liste, vous n'aurez rien. «Souscrire à ce type d'assurance, c'est comme avoir une assurance habitation qui ne couvre que le salon en cas d'incendie, mais pas les autres pièces,» illustre le planificateur financier.

Vous avez une question au sujet de vos finances personnelles? Vous planifiez l'achat d'une maison, l'arrivée d'un enfant, une année sabbatique, travailler à votre compte, régler vos dettes, prendre votre retraite ou tout autre projet qui demande une utilisation judicieuse de votre argent?

Écrivez-nous à souslaloupe@lapresse.ca