Chaque samedi, un financier répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Jean-Paul Giacometti, de Gestion de placements Claret.

À votre avis, quel est l'événement le plus significatif des derniers jours à la Bourse?

Nous sommes à mi-parcours de la période des résultats de fin d'année 2012 et les entreprises publient des résultats meilleurs que ce que prévoyaient les analystes. Les profits ne sont plus en hausse, certes. Mais parce que c'est moins mauvais qu'attendu, c'est favorable pour la Bourse. Surtout face au contexte défavorable des gros défis économiques et financiers qui persistent chez les particuliers et les gouvernements.

Quel indicateur suivez-vous le plus attentivement en ce moment?

C'est la croissance du bilan de la Réserve fédérale américaine (Fed), c'est-à-dire son avoir en titres de dette du gouvernement américain. Elle en achète encore pour des sommes énormes, ce qui injecte beaucoup de liquidités dans l'économie afin de soutenir une relance encore timide.

À court terme, ces achats de la Fed sont une bonne chose pour l'économie et le marché boursier. Ça pourrait durer plus longtemps que prévu, mais certainement pas indéfiniment. Du moins tant que Washington ne résoudra pas concrètement ses graves problèmes budgétaires et fiscaux.

Que feriez-vous avec 10 000$  à investir?

Le plus pertinent pour les petits investisseurs, à mon avis, est de maintenir une approche de «portefeuille permanent» dans leurs placements. Ça se résume à une répartition d'actifs qui varie autour de 25% en dépôts à court terme, 25% en obligations, 25% en actions et 25% en or.

Un tel portefeuille doit être rebalancé périodiquement (achats ou reventes) lorsqu'une catégorie d'actifs s'éloigne trop de la pondération ciblée.

Mais c'est une recette simple pour les petits investisseurs qui veulent obtenir un rendement positif et plus régulier à moyen terme de leur portefeuille.

C'est aussi de plus en plus accessible en utilisant, par exemple, des fonds indiciels à frais moindres.

Quel placement évitez-vous à tout prix?

J'en aurais deux.

D'abord, les obligations gouvernementales à long terme. Leurs taux d'intérêt sont tellement bas que leur rendement général est négatif après l'impôt et les frais d'achat. En clair: vous perdez de l'argent avec ce type de placements à revenu fixe.

Le second placement à éviter est ce qui concerne le marché de l'immobilier résidentiel, parce qu'il est déjà bien au-delà des huit ans de durée habituelle d'un cycle haussier.

Quand c'est rendu que les REIT (fiducies immobilières) offrent un rendement au comptant d'à peine 5%, ça veut dire que vous payez très cher, historiquement, pour un tel placement.

C'est le même problème avec les prix des duplex ou triplex à logements.

Rendu à un multiple de 12, 13 et même 15 fois les loyers annuels, ça commence à être très cher, historiquement, et donc beaucoup plus risqué.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus actuellement?

À court terme, c'est la force de l'économie américaine. Parce qu'en dépit des réductions de dépenses et d'emplois parmi les divers niveaux de gouvernements aux États-Unis, le taux de chômage baisse au lieu de monter. Ça veut dire que des entreprises ont recommencé à embaucher.

À long terme, les marchés sous-estiment l'impact négatif de ne pas s'attaquer rapidement au problème de la dette nationale aux États-Unis.

Ça pourrait durer encore des années. Mais l'histoire nous montre que les périodes d'injection massive de liquidités dans l'économie (banque centrale, déficit public) ont souvent mené à de graves tensions sociales. Ça commence à se manifester dans certains pays d'Europe.

Jean-Paul Giacometti est gestionnaire de portefeuille chez Gestion de placements Claret, à Montréal. Cette firme de gestion privée pour gens fortunés supervise quelque 800 millions en actifs financiers.