De plus en plus de Québécois sont prêts à ouvrir leur portefeuille pour être soignés. Et pas seulement les plus fortunés.

C'est le cas d'Alida Saint-Jean, qui a payé 16 000$ pour le remplacement d'une hanche dans une clinique privée de Laval en mai dernier. En fait, ce sont les quatre enfants de la dame de 87 ans qui se sont cotisés pour assumer les coûts de l'opération, puisque ses revenus de retraite sont insuffisants pour absorber une telle facture. «Ça faisait deux ans que j'avais de la difficulté à marcher, explique cette arrière-grand-mère toujours très active. Mais lorsque j'ai appelé dans les hôpitaux pour tenter d'avoir un rendez-vous, on m'a dit que l'attente était de deux ans ou plus avant d'avoir une place en chirurgie. C'était trop long.»

Plusieurs entrepreneurs ou travailleurs autonomes font aussi le calcul que le temps passé dans une salle d'attente avant de voir un médecin leur coûte très cher.

«Dernièrement, une jeune mère de famille monoparentale qui était serveuse dans un restaurant a payé 100$ pour une consultation, raconte le Dr Luc Bessette, propriétaire de la clinique Créa-MED, au centre-ville de Montréal, où plus de 5000 patients ont ouvert un dossier. Si cette femme était allée aux urgences, elle aurait sacrifié une journée de travail. Pour elle, c'était plus rentable de payer pour éviter une longue attente.»

Il reste que tout le monde n'a pas les moyens de payer 16 000$ pour le remplacement d'une hanche. «C'est certain. Mais pour un entrepreneur ou un travailleur saisonnier dans la construction, par exemple, c'est peut-être plus intéressant de payer plutôt que d'arrêter de travailler pendant plusieurs mois et de perdre des clients», répond le Dr Nicolas Duval, un orthopédiste qui soigne de 400 à 500 patients par année dans sa clinique de Laval, la seule au Canada à offrir cette procédure au privé.

Les assureurs font parfois le même calcul. Chez Desjardins, on a déjà payé le recours à une clinique privée pour obtenir un traitement plus rapide pour un client qui recevait des prestations d'invalidité de son assurance collective, explique Caroline Phemius, porte-parole de Desjardins Sécurité Financière. Ça peut être une décision payante, pour accélérer le retour au travail et diminuer la somme versée en prestations.

La place du privé dans le domaine de la santé suscite bien des débats. Mais pour une personne qui a mal, qui est malade, qui doit cesser ses activités à cause d'un problème de santé, la question prend une autre dimension. Plusieurs sont prêts à garder la vieille voiture un peu plus longtemps, ou à reporter à plus tard un voyage dans le Sud, afin de pouvoir payer la clinique où on s'occupera rapidement de leur problème. «Les gens dépensent plus annuellement pour l'entretien de leur voiture, ou chez le coiffeur, que lors d'une visite ici, illustre le Dr Bessette. Pourtant, le seul véhicule que vous risquez de garder jusqu'à la fin de votre vie, c'est votre corps.»

QUELQUES EXEMPLES DE TARIFS

> Installation d'une prothèse de la hanche ou du genou : 18 000$

> Coloscopie : 500$

> Visite à domicile d'un omnipraticien : 195$ en semaine, 245$ le week-end

> Consultation en clinique avec un omnipraticien : de 100 à 300$

> Examen gynécologique : 175$

> Consultation téléphonique : de 50 à 80$

> Bilan de santé complet : 500 à 1800$

> Chirurgie de la cataracte : de 2000 à 3000$ par oeil

LE RÉSEAU PUBLIC HONNI

Selon un sondage mené par l'Institut Environics, dont les résultats ont été dévoilés la semaine dernière, les Québécois sont plus nombreux que les autres Canadiens à vouloir avoir la possibilité de payer pour des soins de santé privés, lorsque les mêmes services dans le réseau public ne sont pas accessibles assez rapidement.

APPUI AU PRIVÉ

Ensemble du Canada : 54%

Québec : 66%

Ontario: 46%

Alberta 48%