Inspiré par Gérard Depardieu, vous songez à déplacer votre fortune à l'étranger? Mais à quel point est-ce compliqué?

«Il y a des façons pour les gens d'affaires de payer des impôts dans d'autres pays où les taux sont plus bas, explique Ben Jeske, associé de la firme Ravinsky Ryan Lemoine. Mais ça ne fonctionne que pour les revenus d'entreprise. Pour les revenus de placement, il n'y a pas vraiment de façon légitime, à moins qu'on cesse d'être résident canadien. Même chez les gens d'affaires au Canada, peu sont capables de structurer leur entreprise pour gagner des revenus à l'étranger. C'est difficile de le justifier, de faire semblant qu'on a de vraies activités à l'étranger avec des revenus importants. Oui, une grande entreprise peut avoir une filiale marketing aux Bahamas, mais c'est une solution moins envisageable pour les PME.»

Alors, comment faire pour ne plus être résident canadien, tel un Gérard Depardieu, qui pourrait déménager en Belgique ou en Russie pour payer moins d'impôts? Ou un Corey Hart, qui habite depuis plusieurs années aux Bahamas avec sa conjointe Julie Masse?

1- Changer son nom pour celui de Gérard Depardieu!

C'est bien connu, les gens connus ont des passe-droits! Dans les restaurants, les discothèques et même quand vient le temps de demander un visa de résidence. «Gérard Depardieu n'aurait pas de problème à obtenir sa carte verte aux États-Unis, note Ben Jeske. Tout comme d'autres artistes, musiciens et scientifiques renommés. Dans la plupart des pays, il existe des programmes de visa pour gens célèbres. C'est faisable pour

monsieur et madame Tout-le-Monde d'en obtenir, mais c'est moins facile.»

2- Vendre sa maison

Pour déplacer son argent en toute légalité, il ne faut plus avoir d'adresse au pays, preuve qu'on n'habite plus au Canada. «Il faut couper tout lien de résidence, dit Ben Jeske. Mais c'est plus délicat quand on a une famille. Les gens qui veulent garder une résidence doivent la louer à quelqu'un qui n'est pas un membre de leur famille. Autrement, Revenu Canada peut prétendre qu'ils résident toujours ici.»

Doivent-ils rendre leur passeport? «Non, car une telle initiative n'a rien à voir avec la citoyenneté; contrairement aux États-Unis où, si on veut quitter le pays, on cesse d'être citoyen.»

3- Bye-bye carte soleil!

Les Québécois qui renoncent à être résidents canadiens doivent aussi se départir de leur carte d'assurance maladie. Ils doivent rendre leur permis de conduire. Mais ils peuvent conserver leur numéro d'assurance sociale. Car même un ancien résident a le droit de récupérer les sommes versées au régime des rentes du Québec, par exemple.

Pour les REER, on a le choix: on peut garder les sommes versées dans notre REER au Canada ou les sortir pour les transférer. «Dès qu'on sort l'argent, on paie 25% d'impôts, dit Ben Jeske. Ce pourcentage est réduit si on est résident de certains pays avec une convention fiscale différente, comme les États-Unis, où c'est 15%.»

4- Établir une résidence permanente ailleurs

«Si on reste 183 jours ou plus au Canada par année, on est considéré comme résident canadien d'un point de vue fiscal», précise Jean Sébastien Lebrun, avocat d'affaires et fiscaliste, associé de Ravinsky Ryan Lemoine.

«Si on quitte le Canada et qu'on redevient résident canadien moins de deux ans suivant notre départ, Revenu Canada soutient qu'il ne croit pas qu'on a vraiment quitté le pays», ajoute Ben Jeske.

Une fois qu'on a établi une résidence ailleurs, il y a toutefois des conséquences fiscales liées à la cessation de sa résidence ici. «La personne doit déclarer tous les biens en capital accumulés pas encore réalisés, dit Ben Jeske. Car elle devra payer les gains si elle sort ses placements appréciés.» Une exception? Les biens immobiliers (résidentiel, commercial). Car lorsqu'on vend sa maison, le gain est exempt d'impôts.

5- Appeler son banquier

La Suisse? La Russie? La Belgique? Les îles Caïmans? Foi de Gérard et des Canadiens qui gagnent plus de 138 000$ par année et qui sont imposés à 49,97%, les endroits où on paie moins d'impôt ne manquent pas! «Ce n'est pas très difficile de prendre son argent et de le transférer ailleurs, note M. Lebrun. Pour que ce ne soit pas considéré comme de l'évasion fiscale, il ne faut plus être canadien et avoir payé ses dettes.» On appelle simplement son banquier pour qu'il transfère nos avoirs dans une banque de notre choix. «Généralement, les gens vont avoir plus confiance dans les succursales des banques canadiennes à l'étranger», dit M. Lebrun.