Au Canada, les épargnants peuvent dormir en paix: en cas de faillite d'une banque, leurs dépôts sont garantis par la société d'assurance-dépôts du Canada (SADC). Malgré tout, certains épargnants ont le sommeil léger...

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Il faut dire que ce ne sont pas toutes les épargnes qui sont protégées. Par exemple, la SADC couvre l'argent qui se trouve dans les comptes d'épargne et chèque, les dépôts à terme et les CPG de 5 ans et moins. Par contre, elle ne couvre pas les fonds communs, les actions, les obligations, les bons du trésor, ou encore les comptes en dollars américains.

Autre restriction majeure: la couverture de la SADC se limite à 100 000$ par déposant, par institution financière, dans sept catégories différentes de comptes (compte d'épargne, compte-conjoint, REER, FERR, CELI, etc.). Ainsi, un épargnant pourrait être couvert jusqu'à 700 000$ à l'intérieur d'une seule banque.

Mais beaucoup d'épargnants répartissent leurs dépôts dans plusieurs banques différentes, afin d'augmenter leur protection.

«La pratique de diviser ses dépôts est très répandue. Il y a même des programmes de gestion privée qui le recommandent pour sécuriser leurs clients. En répartissant leurs actifs dans quatre institutions différentes, ils font monter le plafond de 100 000$ à 400 000$», souligne le professeur Robert Pouliot, cofondateur de la Coalition pour la protection des investisseurs.

Mais cette pratique ne fait pas le bonheur de certains banquiers qui aimeraient conserver tous les actifs de leurs clients.

«Mon gérant de banque me conseille de ne pas déplacer une partie de mes économies vers une autre banque même si elles dépassent le montant maximum couvert par la SADC», raconte un épargnant.

Pour le convaincre, le banquier lui a servi cet étrange argument: l'assurance-dépôts, ne comptez trop là-dessus! De toute façon, il n'y aurait jamais assez d'argent pour rembourser tous les épargnants si une grande banque déclarait faillite.

Rien pour rassurer le client qui se demande maintenant si la SADC est vraiment à toute épreuve...

Voici de quoi le calmer. Depuis la création de la SADC en 1967, 43 institutions financières membres ont déclaré faillite. Les épargnants ont tous été indemnisés.

«Dans le cas des faillites des banques de l'Ouest, on a même remboursé les gens au complet, au lieu de se contenter du plafond à l'époque», rappelle M. Pouliot. Face aux pressions politiques, en 1985, Ottawa avait adopté une loi spéciale qui avait permis aux clients de la Banque Commerciale du Canada et de la Northland Bank d'obtenir des paiements additionnels.

Il est vrai que les faillites couvertes par la SADC ont toujours été d'une taille limitée. Le pire épisode est celui du Trust Prenor, en 1993, qui a déclenché des paiements de 818 millions de dollars. C'est relativement peu quand on compare aux 622 milliards d'actifs couverts par la SADC aujourd'hui.

Mais les épargnants peuvent vraiment dormir être tranquilles, insiste la porte-parole de la SADC, Sophie Roux. «Il n'y a absolument aucune crainte à y avoir: peu importe la taille de l'institution qui serait en défaillance, le régime de l'assurance-dépôts va s'appliquer», dit-elle.

La SADC dispose d'un fonds de contingence de 2,4 milliards de dollars. Et elle a une capacité d'emprunt auprès du fédéral de 18 milliards... et même plus avec l'aval du Parlement.

D'autres mécanismes de protection

*Au Québec, les membres du Mouvement Desjardins ont droit à une protection semblable à celle de la SADC, administrée par l'Autorité des marchés financiers.

*Le Fonds d'indemnisation des services financiers, également sous la gouverne de l'AMF, permet d'indemniser les victimes de fraude dans la distribution de produits financiers, jusqu'à hauteur de 200 000$. Mais le scandale de Norbourg a mis en lumière ses lacunes. En décembre, Québec a lancé des consultations afin de revoir les mécanismes de protection.

*Les clients des compagnies d'assurances peuvent compter sur Assuris, qui protège jusqu'à 200 000$ ou 85% des prestations. Lancé en 1990, Assuris n'avait couvert que trois faillites, dont celle de la société montréalaise Les Coopérants, en 1992. Un sauvetage de 180 millions. Mais en février, Assuris a annoncé qu'elle couvrirait les quelque 22 000 détenteurs de polices d'assurance, la plupart souscrites au Québec, d'Union du Canada Assurance-Vie.

Contrairement à la SADC, Assuris n'est pas une société d'État, mais plutôt d'un fonds créé par l'industrie. Il garde des réserves d'au moins 100 millions, mais peut hausser les cotisations de ses membres pour couvrir les dégâts plus importants.

*Enfin, les clients des courtiers sont aussi protégés des faillites. Le Fonds canadien de protection des épargnants (FCPÉ) qui est parrainé par l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières, assure jusqu'à un million de dollars. Il compte sur des réserves de 530 millions et peut hausser les cotisations de ses membres, au besoin.

Fondé en 1969, le FCPÉ a géré 18 cas de faillite, le plus récent étant celui de la division canadienne de la firme new-yorkaise MF Global qui s'est écroulée l'an dernier.