Le produit: Le Petit Robert pour iPad

Le hic: Le client a payé 3,39$ de TVQ sur son achat de 37,99$

«Lors de l'achat d'un livre on ne paie pas de taxe provinciale au Québec. Pourquoi alors payer la TVQ sur un livre électronique?» - Serge

Au bout du compte: Pour l'instant, seuls les livres imprimés sont détaxés au provincial. Mais le Conseil consultatif de la lecture et du livre recommandera à la ministre de la Culture de revoir la taxation des livres numériques.Vous pensez faire des économies en bouquinant sur votre iPad? Il est vrai que le livre électronique se vend en moyenne 25% moins cher que son équivalent papier. Mais le gouvernement du Québec efface une partie de ce rabais avec la taxe.

>>>> Suivez Stéphanie Grammond sur Twitter.

Fin septembre, Serge a acheté Le Petit Robert pour iPad, en vente à 37,99$ dans le iTunes Store. Il a été surpris d'avoir à payer les deux taxes: 5% de TPS (1,90$) et 8,5% de TVQ (3,39$).

«J'ai donné le Petit Robert en version papier à ma mère récemment et je n'ai pas payé la taxe provinciale. Pourquoi alors payer la TVQ sur un livre électronique?» se demande-t-il.

En effet, les livres bénéficient d'une mesure de détaxation au provincial. Par livre, on entend même les agendas, les livres de musique en feuilles et les livres de jeux comme des livres à colorier ou des livres contenant des sudokus, des mots croisés, etc.

Toutefois, les consommateurs doivent surveiller leur facture de près lorsqu'ils achètent des livres ailleurs que dans une librairie.

«Il y a encore des détaillants qui ne savent pas que le livre n'est pas taxable au Québec. Ils taxent le livre comme n'importe quel autre produit», déplore Hervé Foulon, président du Conseil consultatif de la lecture et du livre (CCLL).

Par contre, il ne faut pas s'étonner de payer les taxes sur les journaux et les périodiques qui ne sont pas considérés comme des livres.

Autre nuance: en librairie, on trouve de plus en plus de livres vendus avec un autre produit, des crayons de couleur, des pierres à massage ou un thermomètre à cuisson par exemple. Cette pratique a incité Revenu du Québec à revoir les règles du jeu. Depuis le 1er novembre, il faut payer la TVQ lorsqu'on achète un livre accompagné d'un produit taxable.

Néanmoins, le livre reste détaxé s'il est vendu avec un CD-ROM ou un droit d'accès à un site internet. Par exemple, il peut s'agir d'un dictionnaire qui est vendu avec un CD qui en reprend le contenu, ou encore d'un livre de recette accompagné d'un CD qui fait la démonstration de quelques recettes.

Mais pour bénéficier de la détaxation, le livre doit rester l'élément principal. Ainsi, le client qui achète uniquement un CD-ROM contenant un dictionnaire devra payer la TVQ. Idem si le client télécharge une application ou un livre numérique: la taxe provinciale s'applique.

«Un livre numérique n'est pas un livre imprimé, il ne peut donc pas être visé par la mesure de détaxation à l'égard des livres imprimés», confirme Valérie Savard, porte-parole de Revenu Québec.

C'est donc deux poids, deux mesures. «Tant que le livre numérique n'en était qu'à ses premiers balbutiements, ce n'était pas une grande préoccupation. Sauf que le livre numérique est en train de prendre des parts de marché intéressantes, et ça devient de plus en plus préoccupant», avoue Richard Prieur, directeur général de l'Association nationale des éditeurs de livres (ANEL).

«Il faut qu'il y ait une logique au niveau politique entre le livre numérique et le livre papier. Ce serait incohérent qu'il y ait une taxe pour l'un et pas pour l'autre», renchérit M. Foulon.

Justement, le Conseil consultatif de la lecture et du livre recommandera, ces jours-ci, à la ministre de la Culture de revoir la taxation des livres numériques. Le CCLL fera aussi des recommandations sur la réglementation du prix des livres, l'autre grand dossier de l'heure.

Plusieurs pays de l'OCDE ont déjà adopté une politique du «prix unique» pour empêcher de vendre un livre en dessous du prix fixé par l'éditeur, une pratique courante dans les grandes surfaces qui vendent les best-sellers à rabais, mettant en péril les petites librairies qui offrent une grande diversité de livres.

Par ailleurs, la France s'est déjà engagée à la réduire la taxe sur les livres numériques, présentement taxés à 19,6%, pour la ramener au même niveau que la taxe sur les livres imprimés à partir de janvier prochain. Mais au début de la semaine, le premier ministre François Fillon a annoncé que la taxe réduite sur les livres, tant imprimés que numériques, grimperait de 5,5% à 7%, mesures d'austérité obligent.

Au Québec, les amateurs de livres ont bien failli goûter à une hausse de taxe. Cet automne, beaucoup de rumeurs ont couru à l'effet que la TVQ reviendrait sur le livre, une industrie de près de 800 millions de dollars par année.

Mais l'industrie est montée aux barricades. «On l'a échappé belle!» assure M. Foulon. Tant mieux pour tous ceux qui iront bouquiner au Salon du livre de Montréal cette semaine.