Presque trois ans après sa création, les règles du CELI sèment encore la confusion. Depuis le 1er janvier 2009, 6,7 millions de Canadiens ont ouvert un compte d'épargne libre d'impôt.

Libre d'impôt? Oui, mais pas pour ceux qui ont eu le malheur de faire des contributions dépassant la limite de 5000$ par année. L'Agence du revenu du Canada (ARC) impose alors des pénalités de 1% par mois sur l'excédant, comme c'est le cas avec le REER d'ailleurs.

Par inadvertance, André Boucher a versé 5000$ en double dans son CELI. En 2010, sa conseillère financière lui a dit qu'elle avait droit de mettre 10 000$. Il est vrai que les droits de contributions inutilisés s'accumulent d'année en année. Ceux qui n'ont rien mis en 2009 avaient donc droit à 10 000$ en 2010.

Or, la cliente avait oublié qu'elle avait déjà investi 5000$ dans un CELI en 2009, dans une autre institution. Sa conseillère ne lui a jamais suggéré de vérifier combien elle avait contribué l'année précédente, et elle ne l'a pas non plus avertie des pénalités en cas de dépassement.

En août dernier, Mme Boucher a reçu une lettre de l'ARC qui lui réclame 450$ pour l'année d'imposition 2010. C'est six fois plus que les maigres intérêts de 75$ que son 5000$ «en trop» lui a rapportés.

Mais ce n'est pas tout. Comme Mme Boucher a ajouté 5000$ en 2011, elle s'attend à une autre facture d'environ 400$ pour l'année d'imposition 2011. «J'ai mis un gros X sur le CELI, dit-elle. J'ai l'impression que je n'en prendrai plus jamais.»

Mme Boucher n'est pas la seule à être dépitée. Bon nombre de Canadiens ont fait des contributions excédentaires parce qu'ils ont mal saisi les règles de retrait du CELI.

Un épargnant peut retirer ses épargnes de son CELI, quand bon lui semble, sans payer d'impôt. Par la suite, il a droit de remettre le même montant dans son CELI. Le hic, c'est qu'il doit attendre l'année suivante.

Ainsi, un contribuable qui met 5000$ dans son CELI, mais le retire la semaine suivante pour un achat qui ne se concrétise pas, doit attendre jusqu'à l'année suivante pour remettre le montant. Sinon, le fisc considérera qu'il a fait une contribution excédentaire de 5000$, même s'il n'a jamais eu plus de 5000$ dans son compte.

«Malheureusement, de nombreux contribuables n'ont pas bien compris ces règles», indique Paul Dubé, ombudsman des contribuables du Canada. L'été dernier, il a déposé un rapport spécial intitulé «Connaître les règles» pour faire le point sur la confusion et les nombreuses plaintes suscitées par le CELI.

L'ombudsman considère que, «l'ARC aurait dû être plus proactive en informant les Canadiens des conséquences fiscales du CELI».

En 2010, le gouvernement du Canada a reconnu qu'il y avait une véritable confusion. Pour l'année d'imposition 2009, l'ARC a donc expédié près de 73 000 lettres à des contribuables qui avaient versé trop d'argent dans leur CELI. Les épargnants ont eu l'occasion de se justifier, afin d'éviter les pénalités de 1% par mois.

De ce nombre, l'Agence a accordé un allègement d'impôt à environ 24 000 individus qui ont fourni une explication raisonnable en regard de leurs cotisations excédentaires, indique Philippe Brideau, porte-parole de l'ARC.

Ceux qui étaient en accord ou qui n'ont pas répondu à la lettre ont reçu un avis de cotisation. Par la suite, l'ARC a reçu 43 000 paiements.

Pour l'année d'imposition 2010, quelque 103 000 contribuables ont reçu une lettre du fisc, l'été dernier, leur demandant plus de renseignement sur leur compte. Cela représente 1,5% des gens qui ont un CELI, un pourcentage semblable à l'année précédente.

Le gouvernement reconnaît que, «le CELI est un programme relativement nouveau et, naturellement, il pourrait encore y avoir des malentendus quant aux règles, et que ces malentendus peuvent avoir mené par inadvertance à des cotisations excédentaires», dit M. Brideau.

Cette année encore, le gouvernement fera donc preuve de la plus grande souplesse possible envers les personnes qui ont véritablement mal compris les règles de cotisation du CELI.