Chaque samedi, un financier différent répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Vincent Delisle, de Scotia Capitaux.

À votre avis, quel est l'événement le plus significatif des derniers jours à la Bourse ?

Le «bruit» macro s'intensifie avec la persistance des problèmes de dette européenne et les signaux d'essoufflement aux États-Unis. Mais je retiens surtout que le dollar américain remonte face à l'euro, que le prix du pétrole se dégonfle et que la peur refait surface, comme en témoigne la remontée de l'indice VIX.

Ces événements caractérisent les phases défensives et ils avaient été absents du marché jusqu'à tout récemment. À notre avis, le mouvement défensif qui domine depuis la fin février entre en phase terminale. Depuis décembre 2010, notre objectif a été de réduire le niveau de risque dans nos portefeuilles-modèles. Nous prévoyons relever graduellement le contenu cyclique en second moitié de 2011.

Quel indicateur surveillez-vous le plus attentivement en ce moment ?

Le secteur manufacturier au Japon. La production industrielle affiche un repli notable (et suspect) aux États-Unis depuis le début du second trimestre et les problèmes d'approvisionnement en provenance du Japon, notamment dans le secteur automobile, sont en grande partie coupable.

Si la production reprend au Japon, les indicateurs manufacturiers américains (ISM) devraient se redresser au troisième trimestre et dissiper les craintes de récession. Dans ce contexte, les actifs cycliques devraient se reprendre.

Que feriez-vous avec 10 000$ à investir ?

Pour la portion du portefeuille destinée aux actions, je miserais sur les grandes capitalisations américaines et canadiennes, à l'aide des fonds négociés en Bourse SPDR S&P 500 (NYSE, SPY) et S&P/TSX 60 Index (Toronto, XIU). La fin de 2011 nous apparaît favorable pour les secteurs industriels, des fertilisants et de la technologie. L'énergie (lorsque le prix du baril touchera les 90$) devrait être préféré aux matériaux. J'échelonnerais mes achats en deux temps: maintenant et en août.

Quel placement évitez-vous à tout prix ?

Pour les six prochains mois, je réduirais le contenu en obligations. La fin du programme de rachat de la Fed (QE2) pourrait aussi nuire au prix de l'or. Les indices des pays émergents devraient aussi continuer à sous-performer tant que l'inflation ne sera pas mater en Chine, en Inde et au Brésil.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus présentement ?

Depuis la fin de 2008, le marché des actions et des obligations s'échangent le leadership à intervalle régulier, et tant les phases défensives (risk-off) que cycliques (risk-on) s'essoufflent rapidement. Les marchés sous-estiment l'importance d'être proactif. L'attrait des actions et des secteurs cycliques était très modeste en début d'année, mais il s'est considérablement amélioré au cours des dernières semaines. Aux niveaux de taux d'intérêts actuels, le marché sous-estime le profil risque-rendement des actions. Également, le secteur des services (88% de l'économie américaine) progresse bien.

Stratège financier depuis 15 ans, Vincent Delisle s'est joint à Scotia Capitaux en 2004. À l'aide d'une analyse macroéconomique, il met au point des stratégies de répartition d'actifs et des portefeuilles modèles d'actions, destinés à des gestionnaires de portefeuilles institutionnels et aux courtiers de Scotia McLeod.