Marie-Lise habite dans la maison de son conjoint de fait. Leurs budgets sont totalement indépendants et elle lui verse 300$ par mois en guise de loyer.

Mais elle ne possède elle-même aucun actif immobilier. «Je me rends compte qu'à ma retraite, tout mon argent sera dans des REER», observe-t-elle.

Âgée de 48 ans, elle a accumulé 46 000$ en REER et, lors d'un précédent emploi, 82 000$ dans un compte de retraite immobilisé (CRI). Elle détient 34 000$ dans le régime de retraite à cotisations déterminées de son employeur actuel.

«Je compte travailler jusqu'à 60 ans et j'aimerais à ce moment-là pouvoir ne pas payer de loyer et ne pas piger dans mes REER», explique-t-elle.

Pour y parvenir, elle songe à acheter une résidence secondaire.

«Elle m'appartiendrait et j'en assumerais tous les coûts, dit-elle. Je ferais construire un chalet à deux étages et j'en louerais une partie. J'estime le coût de construction à environ 275 000$, terrain inclus.»

Elle est prête à sacrifier une partie de ses dépenses de voyage pour l'occasion et elle n'aurait plus à verser un loyer à son conjoint, qui profiterait lui aussi de la seconde résidence.

«Est-ce que mon projet de construction est possible même sans liquidité? , demande-t-elle. Quelle serait la meilleure façon de financer ce projet?»

Courir deux lièvres?

Retraite ou chalet? L'objectif prioritaire de Marie-Lise est de prendre sa retraite à 60 ans. C'est celui auquel s'est d'abord attaquée la planificatrice financière Marguerite Pernice, de la Banque Nationale.

La conseillère suppose que Marie-Lise maintiendrait jusqu'à 60 ans la contribution de 7% de son salaire au régime de retraite de son employeur - le maximum permis.

Marie-Lise touche une prime annuelle moyenne de 3000$, qui serait systématiquement investie en REER. Enfin, elle participerait jusqu'à la limite autorisée au programme d'acquisition d'actions de son employeur, dans lequel elle détient déjà 6900$.

Marguerite Pernice inclut dans ce programme une somme de 125 000$ que Marie-Lise encaisserait vers 2030 - sa part de la maison de sa mère, dont elle contribue à l'hypothèque.

Notre planificatrice applique à tous les placements de Marie-Lise un rendement annuel de 4,5%, en accord avec son profil d'investisseur modéré. Elle prévoit en outre un taux d'inflation de 2,25% par année.

Dans un premier scénario, Marie-Lise conserve à la retraite son coût de vie actuel de 40 250$. Malheureusement, ses REER et ses actifs non enregistrés sont consumés à 73 ans. Le CRI et les fonds détenus dans son régime de retraite, transformé à 71 ans en Fonds de revenu viager, demeureront alors disponibles, mais les retraits annuels maximaux permis par loi ne suffiront pas à maintenir le coût de vie visé.

Un second scénario préconise une réduction du coût de vie de 15%, soit de 6038$ par année en dollars actuels. Cette fois, l'échéance est reportée à 81 ans.

Dans une troisième tentative, Marguerite Pernice a calculé à combien s'établirait cette réduction de manière à repousser l'épuisement des épargnes à 92 ans: Marie-Lise devrait restreindre ses dépenses de retraite de 25%, c'est-à-dire de 10 000$ en dollars actuels. Dur constat.

Comment dès lors introduire une résidence secondaire dans ce programme? La conseillère a d'abord cherché une marge de manoeuvre dans le budget. Pour ce projet, Marie-Lise récupérerait les 3600$ qu'elle verse actuellement en loyer à son conjoint et 2000$ qu'elle consacre aux voyages, pour un total de 467$ par mois.

Programme d'acquisition d'actions

Pour la mise de fonds, Marguerite Pernice a écarté l'avenue du Régime d'accès à la propriété (RAP). Une ponction de 25 000$ dans le REER, puis son remboursement de 1667$ pendant 15 ans, mettrait à mal la planification de retraite de Marie-Lise.

La mise de fonds proviendrait plutôt du programme d'acquisition d'actions de son employeur. Il faudrait toutefois compter quatre ou cinq ans pour accumuler les mêmes 25 000$, sachant «que la contribution de l'employeur n'est acquise qu'après 12 mois», précise la planificatrice.

Marie-Lise aurait ensuite 17 ans pour rembourser l'emprunt avant ses 70 ans, question ne pas étirer une telle dette trop avant dans la retraite.

Dans ses conditions, avec un taux d'intérêt de 5,69%, l'acquisition d'une (rare) résidence secondaire de 150 000$ générerait une mensualité hypothécaire de 952$ - le double de son budget. Une improbable propriété de 125 000$ exigerait encore 762$ par mois.

Et aucun montant n'est prévu pour l'entretien, l'électricité, les impôts fonciers, les droits de mutation, l'assurance prêt hypothécaire. Dans l'hypothèse où Marie-Lise louerait la propriété, un revenu - non garanti - de 5000$ serait encore insuffisant à couvrir ces frais et l'excédent de la mensualité hypothécaire.

Non, notre planificatrice recommande plutôt que Marie-Lise «continue de verser le maximum permis dans son régime de retraite et son programme d'acquisition d'actions, pour prendre sa retraite à 60 ans, comme elle le désire, en réduisant son coût de vie de 15 à 25%».

Elle ajoute une mise en garde: «En faisant un suivi rigoureux de son budget.»