«Je suis une jeune retraitée de 51 ans», lance Marie-Andrée.

En 2009, elle avait eu la chance de cumuler 30 ans de service et 50 ans d'âge. Le total magique de 80 lui donnait droit à une pleine retraite. C'est l'avantage d'une entrée rapide sur le marché du travail et d'une fidélité obstinée à son employeur.

Sa rente de retraite lui procure un revenu annuel de 33 000$ par année.

Elle détient un duplex d'une valeur de 415 000$, grevé d'une hypothèque de 170 000$. Le logement lui fournit un revenu d'appoint de 660$ par mois.

Son conjoint Mario, avec lequel elle est mariée depuis un an, n'habite au Canada que depuis une dizaine d'années. Il travaille dans le milieu communautaire pour un salaire d'environ 30 000$. Bien qu'il ait le même âge que Marie-Andrée, il ne pourra vraisemblablement pas prendre sa retraite avant encore 15 ans.

Il est propriétaire d'un chalet d'une valeur de 100 000$, hypothéqué à hauteur de 45 000$. Il consacre environ 2000$ par année à ses REER. En incluant un héritage qui reste à recevoir, ses épargnes totalisent 107 000$.

Marie-Andrée veut continuer à voyager, mais elle n'a pas de vision claire de ses dépenses. «Je voudrais aller voir des spectacles et aller au théâtre plus souvent, faire des rénovations à la maison mais il me semble toujours être au sou près, déplore-t-elle. Je reste paralysée parce que je ne sais pas ce que je peux entreprendre.»

Elle s'inquiète également pour l'avenir. «Serons-nous capable lors de sa retraite de vivre tous les deux avec ma pension et nos avoirs communs?»

Rigueur budgétaire

«La décision de retraite de Marie-Andrée n'était pas uniquement motivée par l'atteinte du chiffre magique, mais aussi par une maladie douloureuse qui restreint sa capacité de soutenir un emploi régulier», précise d'abord le planificateur financier François Morency, président d'Aviso, les conseillers financiers.

Les contraintes budgétaires exprimées par Marie-Andrée ne sont pas confirmées par les chiffres que notre planificateur leur a demandé de produire.

Le bilan du couple montre un excédent de 7000$ des revenus sur les dépenses. «Mais est-ce qu'il se réalise?» s'interroge le planificateur. «On peut toujours arriver avec un surplus budgétaire théorique. Mais s'il n'est pas géré, il sera dépensé de toute façon.»

Ainsi, les deux conjoints inscrivent chacun 1200$ au rang des dépenses de voyage à l'étranger. On a beau savoir qu'ils privilégient les échanges de maison et de voiture avec des correspondants européens, on suspecte que ces chiffres soient sous-évalués.

Le conseiller suggère à ce propos une comptabilité familiale, où les dépenses seront soigneusement compilées, et où les surplus seront assignés à des objectifs précis.

Peut-être serait-il profitable, pour mieux gérer les surplus du ménage, que les budgets des deux conjoints soient combinés. Bruno contrôle ses dépenses avec une grande rigueur, une vertu dont le ménage pourrait profiter davantage. «Le couple peut conserver des comptes de banque séparés, mais la gestion peut être centralisée par l'un des membres du couple, suggère François Morency. Chacun peut définir ses objectifs financiers et établir des priorités personnelles.»

Les travaux de rénovation auxquels Marie-Andrée fait allusion s'élèvent au bas mot à 50 000$, incluant la réfection d'un mur de brique. Parce que ses revenus sont fixes et qu'elle n'est pas en mesure de faire face à des imprévus importants, François Morency lui recommande d'augmenter l'hypothèque d'un montant équivalent pour compléter tous les travaux en même temps. Avec un amortissement sur 25 ans, cet emprunt augmentera la mensualité hypothécaire de 263$. La moitié des intérêts, ceux attribuables à la partie locative de l'édifice, seraient déductibles des revenus de location.

La retraite de Bruno

Comment se présentera la retraite de Bruno, dans 15 ans? «Puisqu'il a vécu au moins 10 ans au Canada, il aura droit à sa pleine pension de la Sécurité de la vieillesse lorsqu'il aura 65 ans, et ce, à la condition expresse de vivre encore au Canada lors de la demande», signale François Morency.

N'ayant pas contribué suffisamment à la RRQ, il n'aura pas droit à 65 ans à la rente maximale. Il pourrait toutefois choisir de travailler cinq ans de plus pour l'augmenter.

Il consacre présentement 2000$ par année à ses REER. Le surplus budgétaire annoncé dans l'exercice budgétaire devrait servir à accroître sa cotisation.

L'écart entre les retraites des conjoints et l'inconfort budgétaire militent tous deux en faveur d'une autre avenue: Marie-André pourrait travailler à temps partiel.

«À la retraite, le travail n'a plus le même impact, fait valoir François Morency. Si on a seulement besoin de gagner 20 ou 30% du revenu qu'on faisait auparavant, on peut faire d'autres choses bien plus intéressantes, qui ne nous étaient pas permises du temps où on travaillait à temps plein.»

Marie-Andrée souhaite léguer son duplex à ses enfants, mais peut-être devra-t-elle sacrifier ce voeu. Quand Bruno sera parvenu à la retraite, il sera sans doute nécessaire de vendre les propriétés pour acheter une seule résidence moins coûteuse. Selon l'évolution de son état de santé, Marie-Andrée pourrait alors utiliser une partie du capital pour acheter une rente viagère à risque taré.

«La prestation d'une rente à risque taré peut augmenter en fonction de votre état de santé, décrit notre conseiller. Si vous êtes atteint d'une maladie qui affecte votre longévité, alors la rente est bonifiée par un facteur multiplicateur, dans des proportions extrêmement intéressantes.»

Tout cela à revoir à intervalle régulier.