Naïveté, sans doute. Inattention, sûrement.

Impulsivement, nous nous étions fié à l'emballage, qui montrait des sucettes glacées au yogourt (trempées dans le chocolat, tout de même) d'un format en apparence tout à fait standard.

La surprise est venue au moment de consommer: la lilliputienne sucette était une fois et demie plus petite que sur l'illustration.

Il est vrai que l'emballage - de format normal malgré son modeste contenu - indiquait bien qu'il contenait six mini-barres. Le poids affiché de 55 g était inférieur au standard de 88 g.

L'amélioration - disons l'optimisation - de l'image est une pratique très courante dans l'emballage alimentaire. Ainsi, les boîtes de biscuits ont coutume de montrer un appétissant biscuit plus grand que nature. On prend soin d'indiquer en caractères infinitésimaux «agrandi pour montrer les détails». Utile et pertinent, en effet: tout le monde inspecte son biscuit à la loupe avant de le gober.

Notre boîte de sucettes au yogourt mentionne pour sa part «agrandi pour montrer la texture». Texture? Il s'agit d'une illustration numérique qui montre un enrobage de chocolat aussi uniformément lisse qu'une bulle de savon!

L'effet miam!

Sombre complot? Non! assure Louis Giguère, directeur principal, marketing, innovation et recherche à l'agence de communication et marketing Enzyme, spécialisée en alimentation. Dans les emballages alimentaires, assure-t-il, «il n'y a aucune intention de tromperie sur le format, ou sur les ingrédients montrés dans le plat.»

«En réalité, poursuit-il, les photos surdimensionnées sur les emballages sont là pour créer, comme disent les Chinois, un appetite appeal.» L'objectif est d'amener l'eau à la bouche, de créer un gargouillis stomacal.

«L'effet de grossissement crée de l'impact, décrit-il. Les couleurs sont bien saturées. On s'assure d'avoir du contraste.»

Tout le monde connaît le jeu, dit-il, et sait que l'image de l'emballage n'est pas une parfaite illustration du contenu. (Sauf quelques naïfs qui s'étonnent de trouver des mini-sucettes glacées dans un emballage de mini-sucettes glacées.)

Notons tout de même au passage que Häagen-Dazs n'a pas senti le besoin d'enfler ses mini-friandises comme la grenouille de la fable. Son emballage les montre même un rien plus petites qu'en réalité.

Mais revenons à notre propos. C'est cet effet «miam» qui justifie que sur l'emballage d'un plat congelé de spaghetti aux courgettes, toutes les courgettes sont apparentes, alors qu'elles devraient être également distribuées dans les pâtes. Appetite appeal. Et peut-être un peu de: «Wow, c'est bourré de courgettes!»

Le même principe s'applique d'ailleurs aux biscuits aux pépites de chocolat. Une étude statistique nous démontrerait sans doute que le nombre de pépites illustrées sur les biscuits nous mène à l'extrême limite des probabilités.

Pourquoi ne pas laisser le véritable contenu s'exprimer au travers d'une fenêtre? «Ce ne sont pas tous les produits qui sont à leur avantage quand on les montre pour vrai», informe Louis Giguère. Certains le sont: les tranches de prosciutto ont fière allure dans l'emballage transparent qui leur sert d'écrin. À l'inverse, s'il était vu au travers de son emballage, un plat congelé laisserait tout à fait froid.

Cependant, une nouvelle tendance s'installe, observe-t-il: le clean label. «On retire des éléments de l'emballage pour ne mettre que les allégations pertinentes, dans un environnement où on peut retrouver facilement l'information qu'on cherche.»

Il cite en exemple les céréales Kashi. «On essaie d'évoquer des attributs de naturalité et de pureté.»

Car il y a un risque à utiliser la baguette magique.

«Aussi séduisant que puisse être l'emballage, il ne pourra qu'assurer une première vente», rappelle Sylvain Allard, directeur du programme de graphisme de l'UQAM. «Ensuite, c'est le produit qui doit livrer. La fidélisation du client sera inversement proportionnelle à l'écart entre la promesse et l'expérience du produit.»

Plus jamais de mini-sucettes.

Photo La Presse

La sucette glacée se montre une fois et demie plus petite que sur l'illustration, laquelle donne l'impression qu'il s'agit de sucettes de format standard. Il est vrai que l'emballage de format normal malgré son modeste contenu indiquait bien qu'il contenait six mini-barres.

Photo La Presse

Le premier biscuit que nous avons extrait de notre emballage témoin, pour les besoins de cette photo, était nettement plus chiche en pépites que celui de l'illustration. Un malheureux hasard, sans doute.

Photo La Presse

Une nouvelle tendance : le «clean label», un graphisme épuré qui met l'accent sur l'information essentielle