C'est le roman de la vie sans histoire de Marguerite. Âgée de 85 ans, elle ne s'est jamais mariée. Fille unique, elle a pris soin de ses parents âgés jusqu'à leur décès, faisant ainsi le sacrifice d'une famille. À 85 ans, elle habite seule la maison qu'elle a héritée d'eux, au sud de Montréal.

Elle en prend un soin attentif, et espère y vivre le plus longtemps possible. Elle utilise à l'occasion des services de popote roulante et d'aide à l'entretien du domicile. « Croyez-moi, elle est très en forme et possède tous ses moyens », assure la planificatrice financière Josée Jeffrey, qui est allée la rencontrer chez elle.

Marguerite sait qu'elle devra éventuellement vivre en résidence. En aura-t-elle les moyens ? se demande-t-elle, avec les appréhensions de son âge.

Elle aimerait alors revenir à Montréal, question de se rapprocher de ses centres d'intérêt. Pour l'instant, elle utilise le train et les transports en commun pour faire ses sorties culturelles à Montréal.

Car elle n'a jamais possédé d'auto. « On ne peut pas dépenser et épargner en même temps », a-t-elle confié à Josée Jeffrey. Cette frugalité lui a permis d'accumuler 275 000 $ en épargnes non enregistrées. Elle détient également un FERR de 26 000 $, plus quelque 8000 $ dans un CELI.

Objectif résidence

Marguerite dépense actuellement 28 000 $ par année. Le loyer en résidence lui coûterait environ 1600 $ par mois si elle demeurait en Montérégie, et 2000 $ si elle déménageait à Montréal.

Elle s'épargnerait toutefois les frais d'entretien et de chauffage de sa maison. « Pour vivre en résidence en banlieue, j'ai estimé que son coût de vie passerait de 28 000 $ à 39 000 $ », décrit Josée Jeffrey.

À 85 ans, elle a une chance sur deux d'être encore en vie à 93 ans (une sur quatre de l'être encore à 97 ans, et une sur dix d'atteindre 100 ans). « Elle aura donc besoin de son capital pour plusieurs années encore », soulève Josée Jeffrey.

Heureusement, Marguerite touche une rente de retraite du régime de son employeur, établie à 12 300 $. Elle y ajoute 8500 $ avec la rente de la RRQ, et 6200 $ avec la PSV.

La planificatrice a fait un premier test avec le coût de vie actuel de Marguerite. Elle suppose un taux d'inflation de 2,25 %, et applique un rendement de 4 % aux épargnes de Marguerite.

Le résultat est sans surprise. Grâce à ses rentes, qui totalisent déjà 27 000 $ avant impôt, elle peut soutenir un budget de 28 000 $ sans le moindre battement de cils d'émotion car les seuls intérêts de ses épargnes suffisent à combler le manque à gagner. Bref, ses fonds ne s'épuisent jamais.

L'ajout de 11 000 $ de frais supplémentaires pour la vie en résidence n'entamerait pas cette sérénité granitique. La vente de sa maison ajoutera en effet 235 000 $ à son pécule. « Certes, chaque année, elle devra puiser des sommes plus importantes dans son capital mais ce dernier est encore largement suffisant, sa vie durant », observe la planificatrice.

En fait, les fonds de Marguerite lui permettent de verser un loyer de 2400 $ par mois jusqu'à 100 ans... voire un peu plus si nécessaire.

Organisation des placements

Marguerite possède de nombreux placements garantis, dont les échéances s'étalent jusqu'en 2017. Ils lui procurent un rendement moyen de 3,4 %.

Elle vient d'ailleurs de renouveler pour un an une obligation à taux progressif, pour laquelle on lui recommandait une échéance de dix ans. « Dans dix ans, j'aurais 95 ans; je risque d'avoir besoin de mes fonds avant cet âge », a-t-elle dit à Josée Jeffrey. « Elle a bien raison », commente celle-ci, qui la félicite de sa sagacité. « Je lui recommande de renouveler ses placements avec des échéances différentes de sorte à toujours avoir des liquidités disponibles chaque année pour parer aux imprévus. »

Marguerite a déjà transféré un placement rapportant 4,2 % dans son CELI. Josée Jeffrey lui recommande de répéter l'opération chaque année avec les placements les plus rentables, en fonction des plafonds admissibles. « Elle profite donc au maximum de l'avantage fiscal de ce véhicule de placement. »

Marguerite a 85 ans, et une longue vie derrière elle. Devant, de nombreux jours tranquilles. Sans histoire.

LA SITUATION

Célibataire depuis toujours, Marguerite, âgée de 85 ans, veut demeurer dans sa maison le plus longtemps possible. Le moment venu, aura-t-elle les moyens de s'offrir une résidence de retraite à Montréal, pour un loyer probable de 2000 $ ? Elle se rapprocherait ainsi des concerts qu'elle affectionne tant, car elle n'a jamais eu de voiture.

« On ne peut pas dépenser et épargner en même temps. »

- Marguerite

LES DONNÉES

Marguerite, 85 ans

Coût de vie actuel : 28 000 $

Rente du régime de retraite de son employeur de 12 289 $

Rente de retraite de la RRQ : 8513 $

Pension de Sécurité de la vieillesse : 6203 $

Revenus de ses placements

FERR : 26 213 $

CELI : 8000 $

Placements non enregistrés : 274 817 $

Valeur marchande de sa propriété : 235 000 $, libre d'hypothèque

L'ANALYSE

Ses rentes de retraite et les épargnes qu'elle a réalisées en se privant de voiture permettent à Marguerite un loyer de plus de 2000 $... jusqu'à plus de 100 ans.

« Bien entendu, des soins de santé plus importants seront nécessaires et sont souvent difficiles à évaluer. »

- Josée Jeffrey, fiscaliste, planificatrice financière, Focus Retraite