Chaque samedi, un financier différent répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Martin Roberge, de Dundee.

Q Quel a été l'événement le plus significatif de la semaine?Malgré la bonne performance des indices boursiers, on observe encore des sorties de fonds nettes dans les fonds communs d'actions. En novembre, les investisseurs canadiens ont retiré plus de 500 millions de dollars, selon l'Institut des fonds d'investissement du Canada.

Depuis le début de l'année, on parle de retraits de plus de 5 milliards des fonds d'actions. Cela démontre que les particuliers sont encore très frileux à l'égard de la Bourse. Mais c'est aussi une indication qu'il reste encore une demande potentielle pour alimenter la croissance des actions. Car on dit souvent que le particulier est le dernier acheteur à la fin d'un cycle. On est peut-être plus proche du bas que du haut.

Q Quel indicateur observez-vous le plus attentivement en ce moment?

À l'échelle mondiale, tous les indicateurs liés au consommateur, soit la confiance des ménages, la création d'emplois, le nombre d'heures travaillées et le salaire horaire. Il faut s'assurer que la croissance économique soit soutenable et non pas seulement le résultat de stimuli fiscaux. Aussi, on souhaite que la croissance économique des pays émergents provienne de la demande interne et non seulement de la production industrielle.

Q Que feriez-vous avec 10 000 $ à investir?

Je les séparerais en trois blocs. Je mettrais la moitié (5000 $) en actions, soit 2500 $ dans des titres cycliques mondiaux (énergie, matériaux, technologie) et l'autre moitié dans des titres défensifs à dividendes élevés, comme Husky Energy ou les sociétés de télécommunications comme BCE, Rogers Communications et Telus.

Le rebond boursier a surtout profité aux secteurs cycliques et aux sociétés plus risquées. Même si les cycliques devraient encore surperformer, je pense qu'il y a actuellement de belles occasions d'achat de titres de qualité (sauf dans les services publics).

Avec le deuxième bloc de 2500 $, j'investirais à l'aide de fonds négociés en Bourse dans trois matières premières, soit le gaz naturel (GAS ou UNG), le pétrole (USO) et l'or (GLD).

Enfin, je mettrais le troisième bloc de 2500 $ dans des obligations de sociétés (XCB), qui vont encore profiter du resserrement des écarts de crédit.

Q Quel placement évitez-vous à tout prix?

Les obligations du gouvernement américain à long terme. Le maintien de conditions monétaires explosives aux États-Unis mettra beaucoup de pression sur les taux d'intérêt. C'est sans compter la crainte d'une décote des obligations américaines. La dette publique totale approche 400% du produit intérieur brut (PIB). C'est insoutenable!

Q Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus actuellement?

Il y a beaucoup de folklore boursier à propos du consommateur américain. Plusieurs pensent que la Bourse américaine est fragile parce que 70% de l'économie américaine repose sur le consommateur, qui est dans un mode de désendettement.

C'est un mythe!

En fait, les trois quarts des dépenses de consommation sont liés à des biens essentiels comme la nourriture, le loyer ou le chauffage, peu influencés par les conditions économiques. Seulement un quart des dépenses est lié à des produits discrétionnaires, comme les vêtements ou des cadeaux de Noël. Cela ne représente donc que 18% de l'économie américaine totale.

De toute façon, les Bourses nord-américaines ne sont plus le reflet des économies sous-jacentes. C'est un autre mythe!

L'indice S&P 500 de la Bourse américaine est beaucoup plus sensible à l'économie mondiale qu'on le pense. En fait, 40% des revenus des 500 plus grandes sociétés américaines (et le tiers de leurs profits) provient de l'étranger. Le phénomène est encore plus vrai à la Bourse canadienne.

L'année prochaine, les indices boursiers devraient croître beaucoup plus vite que les économies nord-américaines.