Ah! L'appel des antipodes... Martin et sa conjointe Sandra, qui détient la nationalité australienne, songent à s'établir en Australie avec leurs deux jeunes enfants. Le couple y ferait un séjour de six mois à un an, question de tester le climat...

«Nous avons entendu dire de la part d'un conseiller financier qu'une perte de résidence (vivre 183 jours à l'extérieur du pays) entraîne avant notre départ une obligation de payer le gain en capital sur le triplex, basé sur la valeur du marché au moment du départ, s'enquiert Martin. Est-ce vrai?»

Il se demande également ce qu'il advient des impôts lorsqu'on habite et gagne sa vie à l'étranger. «Serait-il préférable de transférer notre triplex dans une fiducie, une incorporation? demande-t-il encore. Créer une entreprise qui gère le triplex?»

Il prévoit en outre fonder bientôt avec son père une entreprise de construction. «Je désire protéger nos actifs personnels en cas de pépins et certains m'ont parlé, encore une fois, d'une fiducie.»Questions fiscales

C'est Simon Thibault, planificateur financier chez BMO Groupe financier, qui sera notre guide dans notre aventure australienne.

Première observation. Si Martin et sa famille prévoient passer entre six mois et un an en Australie, ils n'entendent pas pour autant se séparer de leurs propriétés canadiennes. «Ils conservent donc le statut de résident canadien au plan fiscal, et par conséquent, ils devront payer des impôts au Canada», indique notre conseiller. Martin n'aura donc pas à se préoccuper du gain en capital réalisé jusqu'à présent sur son triplex.

Par contre, dès lors qu'il passera plus de six mois à l'étranger, Martin ne sera plus couvert par le régime d'assurance santé québécoise.

Les propriétés conservées au Canada font également en sorte que les revenus gagnés en Australie seront imposés au Canada, en vertu des ententes fiscales conclues entre les deux pays. Si les taux d'imposition australiens - donc les retenues à la source - sont inférieurs à ceux du Canada, Martin aura à payer la différence au fisc canadien.

Durant son absence, Martin prévoit louer la résidence familiale. Ces revenus s'ajouteront aux loyers de son triplex. Les impôts sur ces revenus locatifs seront payés au Canada. Puisqu'il louera sa maison durant son absence, celle-ci ne constituera plus sa résidence principale, exemptée de l'impôt du gain en capital. Martin devrait donc signaler le changement d'usage, sachant que l'accroissement de la valeur de la maison, pendant la période où sa famille ne l'habitera pas, sera sujet à l'impôt.

À l'inverse, s'il avait vendu tous ses biens et propriétés canadiennes et rompu tout lien avec le Canada, c'est en Australie qu'il aurait eu le plaisir de payer ses impôts.

À ce propos, Simon Thibault rappelle que l'année fiscale australienne s'étend du 1er juillet au 30 juin de l'année suivante.

Questions de fiducies

Une fiducie? En quelques mots, il s'agit d'une entité juridique distincte, dans laquelle quelqu'un transfère des biens ou des droits. On l'utilise fréquemment pour protéger certains actifs, par exemple dans le cas d'un propriétaire d'entreprise qui voudrait se prémunir contre d'éventuelles poursuites de ses clients.

Autre avantage, la fiducie peut réduire la charge fiscale totale des actifs qu'elle contient, en fractionnant ses revenus entre les divers bénéficiaires. Si les revenus ne sont pas distribués aux bénéficiaires, précise notre expert, ils seront imposables au taux maximal prévu par la loi.

«Puisque Martin prévoit créer une compagnie dans le domaine de la construction, donc susceptible de poursuites éventuelles, la création d'une fiducie aurait des avantages», observe-t-il encore. Le futur entrepreneur pourrait y transférer sa maison et son triplex. En les nommant bénéficiaires, il pourrait fractionner les revenus avec sa femme et ses enfants, lorsque ceux-ci atteindront leur majorité.

«Une structure de fiducie est très complexe et onéreuse à mettre en place, prévient-il toutefois. Martin devrait donc consulter un expert aux points de vue juridique et fiscal.»

Martin a évoqué la création d'une entreprise pour gérer son triplex. Notre conseiller suggère plutôt de la transférer dans une fiducie et de créer une nouvelle entreprise de gestion qui serait également propriétaire de la compagnie de construction. Les liquidités de cette dernière seraient transférées dans la compagnie mère, qui gérerait les placements et les futurs immeubles.

Compliquons encore: la compagnie de gestion pourrait être détenue dans la fiducie. Quand viendrait le moment de vendre l'entreprise de construction, chaque bénéficiaire pourrait avoir droit aux 750 000 $ d'exemption de gain en capital prévue par la loi.

Mais on rêve, on rêve... L'Australie est beaucoup plus concrète.

LES DONNÉES

Martin et sa conjointe songent à s'établir en Australie pour six mois à un an. Où devront-ils payer leurs impôts? Doit-il acquitter l'impôt sur le gain en capital réalisé jusqu'à présent sur son triplex?

«J'ai reçu différents sons de cloche à ce sujet et je ne sais plus à quel saint me vouer...»-Martin

LES PARAMÈTRES

Martin, 34 ans, citoyenneté canadienne

Sandra, 31 ans, citoyenneté australienne et canadienne

Revenu familial: 75 000 $ (incluant revenus locatifs)

Épargne: 20 000 $

Triplex acheté en 2003 (280 000 $), évalué en 2008 à 500 000 $

Hypothèque de 332 000 $

Maison achetée en 2008 (380 000 $)

Hypothèque de 99 000 $

LA RÉPONSE

Parce qu'ils conservent leurs propriétés au Canada, Martin paiera ses impôts au Canada, y compris sur les revenus qu'il gagnera en Australie. Aucun impôt à acquitter (pour l'instant !) sur le gain en capital réalisé avec le triplex.

«Si Martin avait quitté le pays en vendant maison, triplex, et tous ses autres biens, il n'aurait été imposé qu'en Australie puisqu'il n'aurait pas gardé d'attaches au Canada.»-Simon Thibault