Chaque samedi, un financier différent répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Jean Duguay, de Gestion de placements Eterna.

Fort de 25 ans d'expérience en finances, Jean Duguay est vice-président placements et gestionnaire d'actions canadiennes et américaines chez Gestion de placements Eterna. La firme gère des actifs de 600 millions, à Montréal et à Québec. Relancée il y a 10 ans, Eterna est issue d'une institution qui a ses racines à Québec depuis 1928.  

À votre avis, quel est l'événement le plus significatif des derniers jours à la Bourse?

 

La Bourse de Shanghai a perdu 6,7 % lundi dernier, sa plus forte baisse depuis l'été 2008. C'était un peu normal après une hausse de 65 % au cours des six derniers mois. Mais la baisse de l'indice chinois a ramené le spectre d'une correction boursière.

Le plongeon a ébranlé la confiance des gestionnaires qui ont peur de revivre une correction importante. Les Bourses mondiales se sont repliées durant une partie de la semaine. C'est préoccupant car la reprise économique mondiale est fortement liée à la reprise économique qu'il y aura en Asie.

 

Quel indicateur surveillez-vous le plus attentivement en ce moment?

 

Ces dernières semaines, nous avons surveillé de près les résultats trimestriels des entreprises: les profits ont été en baisse, mais pas autant que ce que le marché prévoyait. En ce sens, la saison a donc été positive.

Aussi, on a eu beaucoup de bonnes nouvelles économiques: aux États-Unis, les salaires ont augmenté pour la première fois depuis un an ; les ventes de maisons neuves ont augmenté de 9,6 % le mois dernier (on reste à un niveau très faible, mais c'est la première hausse depuis très longtemps).

La situation semble s'améliorer graduellement. Il s'agit de voir si cette tendance-là va se poursuivre. Au cours des prochaines semaines, on va suivre les données économiques américaines, notamment la confiance des consommateurs, les ventes au détail, l'indice des prix de production.

 

Que feriez-vous avec 10 000 $ à investir?

 

Nous croyons à un scénario de reprise économique. Dans ce contexte-là, l'achat d'actions de compagnie est notre premier choix. Mais à court terme, nous sommes conscients qu'il pourrait y avoir des périodes de corrections, comme cette semaine. La Bourse a remonté très rapidement depuis six mois : au-delà de 40 %. C'est normal qu'il y ait des reculs temporaires.

Dans des replis de marché, j'en profiterais pour investir dans les secteurs plus cycliques qui profiteront de la relance, comme les matériaux et le pétrole (Suncor Énergie, Canadian Natural Resources), la technologie (Microsoft, Intel, Research in Motion) et les institutions financières (Wells Fargo, Bank of America, Moody's).

Même s'il y a eu un redressement important de la valeur des actions, particulièrement du côté des financières américaines, il reste de bonnes possibilités de rendement.

 

Quel placement évitez-vous à tout prix?

 

Le cash! Les taux sont inférieurs à 0,5 %. C'est vraiment pour ceux qui pensent que les Bourses vont s'effondrer.

Et en deuxième lieu, je réduirais aussi la portion en obligations, car elles risquent de procurer des rendements un peu plus décevants avec la perspective d'une hausse des taux d'intérêt.

 

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus actuellement?

 

Depuis la crise financière, il y a énormément de liquidités qui dorment. Tout le monde a accumulé de l'argent. Les fonds souverains et les régimes de retraite ont des sommes énormes à réinvestir. Quand ils vont remettre cet argent-là au travail, ce sera positif pour la Bourse.