À 56 ans, Suzanne est déjà à la retraite depuis trois ans. Une retraite forcée par la vente de l'entreprise qui l'employait. Son mari, Denis, qui touche un salaire de 66 000$, la rejoindra à la fin de l'année, à l'âge de 58 ans.

Il aura le choix entre une rente nivelée ou intégrée.

Quelle est la différence? Une rente nivelée demeure identique durant toute la retraite, hormis un possible ajustement à l'inflation.

Une pension intégrée prend en compte les rentes gouvernementales, qui commenceront à être versées entre 60 et 65 ans pour la RRQ, et à 65 ans pour la pension de la Sécurité de la vieillesse.

«Mais je trouve la baisse énorme», déplore Suzanne.

La rente nivelée de Denis serait fixée à 2011$ par mois, informe-t-elle. Une rente intégrée s'établirait à 2863$ jusqu'à 65 ans, puis baisserait ensuite à 1381$. «Est-il mieux de choisir une rente nivelée ou une rente intégrée?» demande-t-elle.

De son côté, Suzanne n'a aucun régime de retraite. «Il est certain que nous n'avons pas assez de sa caisse de retraite pour vivre, dit-elle. Nous devrons commencer à décaisser mon REER.»

Heureusement, pendant que les deux conjoints travaillaient et que le revenu familial se maintenait encore à 120 000$, une stricte discipline budgétaire leur a permis d'accumuler des épargnes confortables. Suzanne détient plus de 400 000$ en REER et 250 000$ en placements non enregistrés. Denis a de son côté amassé 170 000$ dans son REER.

Plus qu'une question de rente

«D'un point de vue purement mathématique, le point mort entre la rente nivelée et la rente intégrée sera atteint au cours de la 17e année, au moment où Denis aura 75 ans», nous apprend Marguerite Pernice, planificatrice financière à Gestion personnalisée Banque Nationale. «Par la suite, la rente nivelée sera plus avantageuse», calcule la planificatrice.

Avec un point de bascule à 75 ans, la décision devra donc tenir compte de facteurs comme «l'état de santé de la personne retraitée, les questions d'hérédité et de longévité familiale ainsi que l'espérance de vie, qui croît régulièrement», rappelle Marguerite Pernice.

Cependant, une telle décision ne se prend pas dans l'absolu. Il faut considérer l'ensemble du portrait financier durant les années de retraite... et notamment les subtiles nuances fiscales.

Au terme de cet examen, la planificatrice fait trois recommandations.

Elle suggère d'abord de déplacer chaque année le maximum autorisé d'épargne non enregistrée vers un Compte d'épargne libre d'impôt (CELI) - soit 5000$ par personne pour 2009. «Le fait de convertir des sommes non enregistrées en CELI viendra directement réduire le revenu imposable, car le rendement sur les sommes investies n'est plus soumis à l'impôt», indique Mme Pernice.

Elle rappelle également l'importance de profiter du fractionnement des revenus de retraite. Si Denis lui attribue une partie de sa rente de retraite, Suzanne pourra bénéficier elle aussi du crédit de revenu de pension de 2000$.

Enfin, contrairement aux intuitions de Suzanne, le couple devra retarder le plus possible les retraits des REER. «La plus grande part de leurs économies proviendra de l'ordre du décaissement», insiste notre planificatrice. «Il faudrait débuter par les placements non enregistrées, car le rendement généré par ces sommes est imposable dès le premier dollar, sauf pour le gain en capital, qui est imposable à 50%.»

Le couple s'intéresse ensuite au CELI, dont les retraits, contrairement aux REER, ne sont pas imposables. «Le retrait n'est pas perdu car, dès l'année suivante, si des liquidités sont disponibles, il est possible d'y réinvestir les sommes retirées», explique la planificatrice.

En dernier lieu, ils commenceront à puiser dans les épargnes enregistrées.

Projections

La planificatrice a appliqué ces trois recommandations dans les projections de retraite qu'elle a effectuées. Elle utilise d'abord le coût de vie de 50 000$ que le couple estime maintenir à la retraite. En tenant compte de l'inflation, et avec des rendements conservateurs sur les investissements, le choix de la rente nivelée leur laisse un capital de 2,8 millions à plus de 90 ans!

Deuxième essai avec la rente intégrée: dans les mêmes conditions, le capital restant est alors de 2,4 millions.

«Notre couple devrait opter pour la rente nivelée et procéder à l'optimisation fiscale», conclut la spécialiste.

Elle a fait une troisième projection pour savoir, dans ces conditions, quel serait le coût de vie maximal que les deux conjoints pourraient s'autoriser. Ses calculs montrent qu'ils seraient en mesure de dépenser 64 000$ par année, avec pleine indexation au coût de la vie. «Et je n'ai pas inclus la vente de la propriété!»

 

LES DONNÉES

Denis, 58 ans

Revenus d'emploi: 66 000$

REER: 170 000$

Suzanne, 56 ans

Retraitée (plus ou moins forcée) depuis trois ans

Aucun régime de retraite

REER: 415 000$

Épargne hors REER: 250 000$

Propriété: 500 000$

»La plus grande part de leurs économies proviendra de l'ordre du décaissement.»

Marguerite Pernice, planificatrice financière Banque Nationale

 

Écrivez-nous!

Vous aimeriez qu'un planificateur financier examine votre situation? Investissement, immobilier, retraite, héritage, impôt, crédit, budget... Quelle que soit la nature de vos questions, écrivez-nous! Les dossiers retenus seront analysés par un spécialiste, dans le cadre de la chronique «Sous la loupe».

Voici notre adresse : À vos affaires, 7, rue Saint-Jacques, Montréal (Québec) H2Y 1K9 ou notre courriel : avosaffaires@lapresseaffaires.com