Une guerre de prix se dessine au Canada entre les transformateurs laitiers dans l'unique but de gagner des parts de marché auprès des détaillants, déplore le président et chef de la direction de Saputo, Lino Saputo fils.

Sans directement nommer des concurrents, l'homme d'affaires a estimé jeudi, en marge du dévoilement des résultats du quatrième trimestre, que certains prenaient des décisions qui défient toute logique depuis environ trois mois.

«C'est triste parce que les producteurs veulent obtenir un meilleur prix alors que certaines personnes dans notre industrie dévalorisent les produits laitiers, a dit M. Saputo, au cours d'un entretien téléphonique. Pour moi, c'est un crime.»

Au Canada, les principaux concurrents de la multinationale québécoise sont la coopérative Agropur et Parmalat. D'après M. Saputo, la situation actuelle ne se reflète même pas dans le prix des produits vendus aux consommateurs.

Même si ses concurrents sont agressifs, M. Saputo fils a affirmé que la compagnie allait garder son approche «responsable» et «disciplinée».

«Pour contrebalancer tout cela, nous pourrions explorer de nouveaux marchés et considérer d'autres clients afin de générer plus de profits même si notre volume est moins élevé», a-t-il affirmé, lors d'une conférence téléphonique avec les analystes.

Selon le dirigeant du transformateur, le contexte concurrentiel canadien ne devrait pas avoir une incidence négative sur la performance de l'entreprise dans ce marché à court ou moyen terme.

Fin cahoteuse

Malgré une deuxième moitié d'exercice plus difficile, l'année financière 2018 a été «profitable», a fait remarquer M. Saputo, évoquant le bénéfice net de 852 millions, ou 2,21 $ par action, en hausse de 16,6% sur un an.

Les revenus ont atteint 11,5 milliards, en progression de 3,4%, mais le profit ajusté, qui fait abstraction des éléments non récurrents, a fléchi de 3,7 %, à 704,2 millions, ou 2,18 $ par action.

Au quatrième trimestre, Saputo a été affectée par une hausse du prix du lait comme matière première, une baisse des prix de vente sur le marché des exportations ainsi qu'une augmentation de ses coûts de transport.

«Nous ne semblons pas voir la ligne d'arrivée, a dit le patron du transformateur laitier aux analystes financiers. Nous contrôlons ce que nous pouvons contrôler, mais cela risque de se poursuivre pendant le prochain exercice.»

Pour la période de trois mois terminée le 31 mars, Saputo a vu ses profits nets plonger de 21 %, en raison de coûts plus élevés et une diminution des prix sur les marchés d'exportation. Son bénéfice net a été de 130 millions, ou 34 cents par action, par rapport à 165,2 millions, ou 42 cents par action, lors du quatrième trimestre l'an dernier.

En excluant les éléments non récurrents, le bénéfice ajusté de Saputo a fléchi de 18,1 %, à 135,3 millions, ou 35 cents par action, alors que ses revenus ont légèrement progressé, à 2,74 milliards.

Les analystes sondés par Thomson Reuters tablaient sur un profit ajusté par action de 42 cents sur des revenus de 2,7 milliards.

Ces résultats ont été mal digérés par les investisseurs, puisqu'à la Bourse de Toronto, jeudi après-midi, l'action de la société a retraité de 4,3 %, ou 1,90 $, pour clôturer à 42,25 $.

Néanmoins, l'analyste Irene Nattel, de RBC Marchés des capitaux, ne s'est pas montrée étonnée des résultats du quatrième trimestre, étant donné que les défis de Saputo en territoire américain sont connus.

«Nous nous attendons à ce que la fluctuation du prix de l'action soit modérée compte tenu de la capacité de l'entreprise à redresser la barre», a-t-elle écrit dans une note envoyée par courriel.

Aux États-Unis, les revenus ont fléchi de 3,4 %, à 1,44 milliard, alors que dans le secteur international, les recettes ont été de 328,4 millions, en déclin de 12 %. Une hausse de 2,2 % a toutefois été observée au Canada, où le chiffre d'affaires a été de 980,9 millions.