Twitter a pour la première fois gagné de l'argent, une nouvelle susceptible d'apaiser les interrogations récurrentes sur son modèle économique et qui enflammait l'action à Wall Street.

Le réseau social a annoncé jeudi avoir dégagé un bénéfice net de 91,1 millions de dollars au quatrième trimestre 2017, contre une perte nette de 167,1 millions à la même période un an plus tôt.

Le chiffre d'affaires trimestriel a progressé de 2% à 732 millions de dollars, supérieur aux pronostics qui étaient de 687 millions.

Cette performance «prouve que Twitter est là pour durer», estime Jennifer Grygiel, professeure à l'Université de Syracuse (est). «Beaucoup de personnes en doutaient».

À Wall Street, le titre a bondi de 12,15% à 30,18 dollars. En séance, il avait atteint le seuil de 35 dollars, un plus haut depuis juillet 2015.

Depuis son entrée en Bourse en novembre 2013, la plateforme de communication préférée du président américain Donald Trump a enchaîné les pertes à chaque trimestre, avivant les spéculations sur sa vente éventuelle pour survivre face à l'explosion de jeunes pousses aux dents longues et au succès fulgurant -- Snapchat et Instagram.

Déterminé à convaincre de sa capacité à transformer sa fréquentation en revenus, notamment par le biais de la publicité et des données vendues aux annonceurs, Twitter s'est fixé pour objectif de renouer avec la rentabilité en 2017.

«Nous avons atteint notre objectif de rentabilité» et réalisé une «fin d'année solide», s'est félicité jeudi le patron Jack Dorsey.

Pour séduire au-delà des personnalités des médias et du monde politique, Twitter a décidé de doubler la longueur maximale des tweets, la faisant passer de 140 à 280 caractères, et nouer des partenariats avec des médias et des organisateurs des événements socioculturels pour les diffuser en direct sur la plateforme.

Ces initiatives semblent porter leurs fruits. L'allongement des caractères par exemple «minimise certaines des complexités» dénoncées par les utilisateurs, a expliqué jeudi M. Dorsey, lors d'une conférence téléphonique avec les analystes. «Plus important encore ça permet aux gens de mieux exprimer leurs pensées et opinions».

Encore du chemin

Jennifer Grygiel estime pour sa part que Twitter reste une «plateforme des médias à part». «Les influenceurs et les drogués de l'info viennent sur Twitter en raison de sa fonction de microblogue qu'on ne trouve nulle part ailleurs».

Après avoir douté de sa viabilité, les milieux financiers semblent vouloir également donner une nouvelle chance au réseau social en saluant notamment son recours de plus en plus à l'intelligence artificielle pour répondre aux besoins et attentes des utilisateurs.

Richard Greenfield, analyste chez BTIG Research, cite par exemple la nouvelle fonction repoussant à l'utilisateur les tweets et informations susceptibles de l'intéresser.

L'intelligence artificielle a «rendu l'expérience utilisateur plus intéressante», conclut cet expert.

Twitter a toutefois encore du chemin à parcourir pour s'inscrire durablement dans la rentabilité.

Le nombre d'utilisateurs mensuels, baromètre surveillé de près par les annonceurs, a certes augmenté de 4% en un an à 330 millions, mais il a stagné comparé au troisième trimestre et est en dessous des 333 millions attendus par les analystes. Facebook affiche 2,1 milliards d'utilisateurs mensuels.

Le réseau social explique que c'est de tradition d'enregistrer une stagnation des utilisateurs en cette période là de l'année et qu'il a été affecté par des modifications effectuées par Apple sur son moteur internet Safari. Ces deux facteurs ont réduit le nombre d'utilisateurs de 2 millions.

Twitter affirme également avoir intensifié sa traque de faux comptes, de pourriels et de «bots».

Le groupe, comme Google et Facebook, est par ailleurs sous le feu des critiques de nombreux parlementaires américains qui estiment qu'il a servi de plateforme à la désinformation venue de Russie pendant la campagne présidentielle américaine de 2016.

Il est régulièrement aussi accusé de laisser prospérer le harcèlement des femmes, la propagande raciste ou celle des jihadistes sur sa plateforme.

«Nous sommes déterminés à rendre Twitter sûr et sommes (en conséquence) en train de clarifier nos politiques», a tweeté le groupe.